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lundi 31 mars 2025

Transformations de Jay Kamen (1988) - ★★★★★★☆☆☆☆

 


 

Parmi les nombreuses productions estampillées Empire International Pictures l'on trouve Ghoulies de Luca Bercovici, Troll deJohn Carl Buechler, TerrorVision de Ted Nicolaou, From Beyond de Stuart Gordon, Crepozoids de David DeCocteau, Intruder de Scott Spiegel ou encore Prison de Renny Harlin. De la série B, voire X, Y ou Z dans le meilleur et le pire des cas. Transformations de Jay Kamen se trouve à lisière des uns et des autres, mêlant comme parfois chez le distributeur Charles Band, différents univers empruntant à la science-fiction, l'horreur ou le fantastique. Dans des décors que l'on raccordera parfois à ceux des séries L'âge de cristal et Battlestar Galactica, l'astronaute John Wolf (Wolfgang Shadduck dans la version originale) est aux commandes d'une navette qui vient s'échouer à la surface de la colonie pénitentiaire Hephaestus IV. Une planète qui ''accueille'' en majorité des criminels exilés afin d'y travailler de force dans des mines. Là, John Wolf (Rex Smith) fait la connaissance de la très jolie Miranda (Lisa Langlois). Jeune infirmière née illégalement sur Hephaestus IV . En effet, alors que les femmes transférée à la surface de la planète sont en général stérilisées pour ne pas avoir d'enfants, la mère de Miranda fut épargnée par le médecin qui s'occupa d'elle durant sa grossesse. Aujourd'hui infirmière devant assumer seule les soins des habitants de la planète, la jeune femme est chargée de veiller sur John, lequel est contraint de demeurer sur place jusqu'à la réparation de sa navette. Les règles ici sont simples : à la première transgression des lois qui régissent Hephaestus IV, c'est la mort. Ce qui n'empêchera pas notre vaillant héros de quitter sa chambre d’hôpital pour aller faire un tour dans le bar de la station...L'on découvre un chaud lapin en la personne de John. Il faut dire que tout autant qu'elles soient grimées comme des créatures humanoïdes vaguement extraterrestres, les actrices sont souvent d'une grande beauté et d'un physique agréable. John va en profiter pour s'assurer que son ''matos'' fonctionne encore depuis qu'il a atterri sur la planète. Mais ce que lui et les habitants de Hephaestus IV ne savent pas encore, c'est qu'il est atteint d'une étrange maladie particulièrement contagieuse qui provoque une horrible mutation. La ''Transformation'' du titre, laquelle est en relation directe avec un ''rêve'' étrange qu'il fit à bord de son engin... Travaillant plus tard sur la supervision sonore de longs-métrages populaires comme À la poursuite d'Octobre Rouge de John McTiernan, Mort ou vif de Sam Raimi ou encore Independence Day de Roland Emmerich, Jay Kamen a durant sa carrière, multiplié les casquettes :


Monteur, auteur d'une bande originale pour le court-métrage Not Your Time qu'il réalisa lui-même en 2010, producteur et parfois même acteur pour son propre compte, le réalisateur signe avec Transformations une comédie de science-fiction horrifique visiblement à petit budget. Comme semblent l'indiquer les décors et les costumes. Techniquement largué, le long-métrage est un salmigondis d'idées et d'approches visuelles et esthétiques empruntées ici et là, que l'on retrouve donc parfois dans les séries évoquées plus haut mais aussi dans ce qui deviendra beaucoup plus tard l'un des fonds de commerce de la science-fiction sur grand écran : la dystopie. S'il n'est pas le premier à évoquer l'hypothèse de transformer une planète en prison puisque John Carpenter en avait déjà posé les bases avec le génial New-York 1997 en 1981, il précède de quatre années le ALIEN³ de David Fincher qui ne sera donc réalisé que quelques années plus tard ou ces films futuristes qui prennent pour cadre des prison spatiales comme Fortress 2 : Réincarcération de Geoff Murphy en 2000, Dante 01 de Marc Caro ou Lock Out (Sécurité maximale) de James Mather et Stephen St. Leger. Transformations fait œuvre de parent pauvre du genre et n'apparaît donc pas très sérieux. D'autant plus que le personnage incarné de manière plutôt légère par Rex Smith n'arrange pas les choses. Notons que parmi les interprètes secondaires l'on retrouve l'acteur Patrick Macnee, rendu célèbre pour le rôle de John Steed dans la série télévisée britannique Chapeau melon et bottes de cuir dès le début des années 1960 en Angleterre. Doté d'effets-spéciaux parfois cradingues directement liés à la lente mutation du héros ou à la créature qui en est directement la cause, le film de Jay Kamen n'est pas déplaisant à regarder. Et ce, même si les quelques séquences ''horizontales'' sont filmées sans trop d'engouement. On rêve à l'idylle entre John et Miranda qui décidément envoûte par son charme. Une Miranda qui, dans la version française, change subitement et étrangement de prénom pour s'appeler ensuite Muriel ! Bref, Transformations est une petite série B sympathique qui mérite d'être découverte... une fois, pas deux !

 

mardi 11 mars 2025

Companion de Drew Hancock (2025) - ★★★★★★★★☆☆

 


 

Pour son tout premier long-métrage, le réalisateur et scénariste américain Drew Hancock a signé l'une meilleures surprises de ce début d'année 2025. Difficile en effet de n'y point voir un mélange des genres si intelligent que Companion réunira aussi bien les amateurs de comédies, de thrillers que certains fans de science-fiction. Il va par contre dès le départ falloir se faire à l'idée de ne surtout pas avoir la curiosité de jeter un œil à la bande-annonce. Pire, une fois que l'erreur aura été commise, certains twists survenant lors du récit n'auront pas tout à fait la même saveur. Il devient par conséquent assez compliqué d'évoquer Companion sans être contraint d'en révéler certains soubassements. Dès lors, quel type d'informations peut-on divulguer sans se retrouver sous un flot d'insultes lancées par celles et ceux qui ne l'auraient pas encore découvert ? Et bien pour commencer, que le film budgété à hauteur de dix millions de dollars est tout d'abord incarné par la très craquante Sophie Thatcher qui à l'image interprète Iris, la compagne de Josh (Jack Quaid, fils des acteurs Dennis Quaid et Meg Ryan) dont elle est follement éprise. Le couple est convié à retrouver trois amis dans la luxueuse propriété d'un certain Sergey (Rupert Friend), un riche homme d'affaire qui les accueille donc chez lui pour quelques jours. Iris est angoissée à l'idée de se retrouver ainsi en réunion. D'autant plus que la compagne de leur hôte (Megan Suri dans le rôle de Kat) l'accueille assez froidement. Pour compléter le tableau, Eli (Harvey Guillén) et Patrick (Lukas Gage) forment un couple homosexuel lui aussi très amoureux. Je sais déjà ce que certains penseront d'emblée au fil du récit. Déployant une configuration qui semble entrer de plain-pied dans la mouvance Woke, Companion se satisfait suffisamment de son ton très second degré pour que l'approche semble-t-il parfois très opportuniste ne gâche absolument pas le spectacle. Tourné dans un cadre aéré et lumineux, le long-métrage de Drew Hancock démarre donc comme une sempiternelle réunion de camarades qui le temps d'un week-end feront la fête avant que ne survienne un imprévu. Sauf que la voie que choisi l'auteur est beaucoup plus nuancée. Bon, maintenant, très chers amis, permettez-moi d'en révéler un peu plus sur son contenu. Et si vous ne l'avez pas encore vu, je vous conseille d'arrêter tout de suite la lecture de cet article.


[SPOIL]. Dès le lendemain de leur arrivée chez Sergey, Josh conseille à Iris d'aller se détendre au bord du lac qui jouxte la propriété. Rejointe rapidement par l'hôte des lieux, celui-ci se montre particulièrement entreprenant. Témoignant d'ailleurs de la complicité de sa compagne Kat et du petit ami d'Iris ! Agressée sexuellement puis étranglée, la jeune femme se défend en sortant de sa poche un couteau (dont la présence, rassurez-vous, n'est pas inopinée) avant ce l'enfoncer dans la gorge de Sergey [fin du SPOIL]. Une fois de retour dans la demeure et le haut du corps ensanglanté, Iris affirme que Sergey a tenté de la tuer et qu'elle n'a fait que se défendre. Si jusque là Companion avait tout de la comédie gentillette et propre sur elle, le film prend évidemment un nouveau ton avec ce meurtre particulièrement graphique. Un drame qui va mettre en lumière une vérité à laquelle le spectateur qui avait eu la bonne idée de ne pas regarder la bande-annonce ne s'attendait certainement pas. [SPOIL] En effet, l'on découvre avec effarement qu'Iris n'est pas tout à fait la jeune femme qu'elle semblait être jusque là. D'où l'aspect ''fantastique'' du film se référant à un certain type de science-fiction très à la mode convainquant la domotique et la robotique. Au sujet de cette dernière, l'on apprend donc que la jeune femme est un androïde. Une thématique et une attitude notamment de la part de Josh qui posent le problème de l'asservissement de la femme par l'homme qui dans le cas présent exploite sexuellement et domestiquement celle qui partage sa vie. Représentation parfaite de la femme à laquelle, comble de l'ironie, le compagnon réduit son pourcentage d'intelligence à 40%, Iris symbolise ainsi ces femmes brutalisées et soumises aux hommes et dont elles font régulièrement les frais de la misogynie et du patriarcat [fin du SPOIL]. Une fois mise en évidence la non réalité organique d'iris, le film aurait pu reposer sur ce simple constat pour n'être plus qu'une histoire de révolte et de vengeance de la femme/machine envers l'homme qui la contrôle. Mais non puisque le réalisateur et scénariste imagine une diabolique machination qui va tourner court et être à l'origine d'une succession d'événements tournant au carnage. Companion parvient à se renouveler sans cesse et nous offre ainsi un spectacle très divertissant et sans temps morts. Bref, une œuvre hybride où se côtoient humour noir, thriller et science-fiction dystopique. Un régal...

 

lundi 24 février 2025

Proximity d'Eric Demeusy (2020) - ★★★★★☆☆☆☆☆

 


 

Premier long-métrage du réalisateur, scénariste, producteur et concepteur d'effets-spéciaux américain Eric Demeusy, Proximity aborde le sujet de l'abduction d'un jeune adulte par des extraterrestres. En ouverture l'on assiste à l'enlèvement d'un bûcheron prénommé Carl à la toute fin des années soixante-dix. Une séquence pleine de bruit et de fureur qui ne laisse rien présager de bon. Trop d'effets démonstratifs tuant directement dans l’œuf tout mystère propre au phénomène. L'auteur n'engage donc pas le récit dans l'hypothèse du doute concernant la réalité de cette disparition. Selon lui, les petits hommes gris, verts ou... marrons (!!!) existent bel et bien et n'en déplaise à ceux qui doutent encore de leur existence, il va désormais falloir vivre avec cette certitude sans que jamais l'on ne puisse mettre en contradiction les paroles ou les preuves du jeune protagoniste avec l'éventualité selon laquelle tout ne relèverait que de la paranoïa ou du complotisme. Cinquante ans plus tard, un bolide s'écrase sur notre planète. Du moins les premières images semblent-elles aller dans ce sens avant que ne réapparaisse devant les yeux de l'ingénieur en informatique Isaac (l'acteur Ryan Masson), cette même soucoupe volante qui apparu en 1979 devant ceux de Carl. Armé d'une caméra, le jeune homme est alors confronté à un alien qu'il parvient à filmer avant de prendre la fuite. Une échappée qui ne lui servira à rien puisque Isaac sera abducté avant de réapparaître trois jours plus tard sans avoir le moindre souvenir de ce qu'il a vécu durant les soixante-douze dernières heures. Par chance, sa caméra elle aussi est revenue de cet intrigant ''voyage'' qu'il a fait les soixante-douze dernières heures. Et avec elle, le témoignage vidéo de l'événement. Partageant les images sur Internet, lesquelles deviennent très rapidement virales, celles-ci vont attirer autant de sceptiques que de croyants. Invité (piégé?) sur un plateau de télévision, Isaac témoigne... en vain... Au fil du récit, le jeune homme fait la connaissance de Sara (Highdee Kuan) qui comme lui paraît avoir vécu la même expérience ainsi que celle de Zed (Christian Prentice), un pirate informatique qui de son côté va aider les deux jeunes gens à entrer en contact avec Carl qui depuis sans enlèvement et sa réapparition vit retranché en un lieu gardé secret et qui depuis passe le plus clair de son temps à ''écouter les étoiles''.


Alors que le petit groupe ainsi formé attend le retour prochain des extraterrestres, des agents du gouvernement sont lancés à leurs trousses... En réalité, entre l'abduction d'Isaac et l'apparition de cette intelligence venue d'une autre galaxie, il va s'en passer des choses. Beaucoup (trop) de choses à vrai dire. Une cascade d'événements plus ou moins crédibles ou admirables selon que le spectateur se situe ou non du côté des passionnés d'ufologie se référant à des phénomènes décrits de manière réalistes. Le principal défaut d'Eric Demeusy et donc de Proximity est cette gourmandise avec laquelle l'auteur ajoute des données qui sortent le film du cadre strict de la science-fiction. D'un côté, le film décrit vaguement le traitement infligé aux victimes d'enlèvements par des extraterrestres. Isaac et Sara portent effectivement un émetteur sous la peau et des radios révèlent notamment chez le jeune homme une fracture interne qui n'a rien de commun avec ce que rencontrent en général les victimes de chutes ou d'accidents. L'on a droit en outre à la présence d'une organisation gouvernementale dédiée à l'étude des phénomènes extraterrestres qui va notamment piéger Isaac. Une organisation au sein de laquelle l'on retrouve les habituels ''Men in Black'' mais aussi de manière plutôt curieuse et pittoresque, des androïdes dont la voix et l'apparence déclencheront sans aucun doute possible, des barres de rire auprès des spectateurs. Proximity est donc plus qu'un pur film de science-fiction drainant tout un tas de poncifs parmi lesquels il est tout de même heureux de constater que les extraterrestres n'apparaissent pas comme d'affreuses créatures insectifères. D'un autre côté, sans doute fasciné par la franchise Star Wars et ses Stormtroopers, le réalisateur crée des machines dont les railleries qu'elles génèrent raisonneront bien après la fin de la projection. À cela, Eric Demeusy ajoute à son jeune héros un super-pouvoir, des antagonistes caricaturaux au possible mais aussi, une bande son parfois imbitable. Entre pop ultra-commerciale à destination du public adolescent et envolées se distinguant par une approche aventureuse se rattachant davantage à l'univers d'Indiana Jones que de la science-fiction, Proximity demeure une œuvre parfaitement innocente. On ne s'y ennuie effectivement pas mais le mélange des genres et des idées finit d'en faire un film totalement oubliable une fois le récit arrivé à terme...

 

mercredi 19 février 2025

Cassandra de Benjamin Gutsche (2025) - ★★★★★★★★☆☆

 


 

Alors oui, la série créée par Charlie Brooke, Black Mirror fut il y a quelques années porteuse de mauvaises nouvelles au sujet des dérives de l'Intelligence Artificielle. Mais il ne faudrait pas oublier que les dystopies qu'y décrivaient son créateur, les différents réalisateurs ainsi que les scénaristes ne reposèrent pas toutes sur des concepts totalement innovants. De 2001, l'odyssée de l'espace de Stanley Kubrick en passant par Mondwest de Michael Crichton en jusqu'aux récents M3GAN de Gerard Johnston et T.I.M de Spencer Brown, nombreuses furent les œuvres à mettre en scène des technologies avancées prenant le pas sur ceux qui étaient à l'origine de leur conception. Il ne suffit donc pas de citer Black Mirror pour se faire une idée de ce que recèle Cassandra, cette nouvelle série germanique qui après Dark de Baran bo Odar et Jantje Friese confirme que l'Allemagne est en bonne position dans le domaine de la science-fiction à l'échelle internationale (contrairement à la France qui parfois ose proposer comme alternatives, des daubes de l'ampleur de L'homme parfait de Xavier Durringer). Ici, il n'est plus question d'évoquer le voyage dans le temps mais l'implication de la domotique et de la robotique dans le foyer d'une famille qui essaie de se reconstruire après un drame épouvantable. David et Samira Prill ainsi que leurs deux enfants Fynn et Juno s'installent dans leur nouvelle demeure. Une habitation que l'on doit à l'origine à l’architecte autrichien Richard Joseph Neutra, concepteur de la Kemper House qui sert donc en partie au récit. En partie, oui, car le réalisateur allemand Benjamin Gutsche n'a pu profiter que des extérieurs de la bâtisse tandis que les origines des intérieurs demeurent apparemment encore un mystère. Un ''secret'' qui alimente ce que d'aucun de celles et ceux qui ont déjà découvert la série peuvent considérer d'environnement très intrigant même si l'on imagine que l'équipe chargée de donner aux intérieurs une patine rétro-futuriste y sont pour beaucoup dans l'étrangeté de cet univers domestique. Entre ces écrans de télévision qui semblent se référer à de vieux postes à tubes cathodiques, cet ascenseur dont la manifeste présence est encore (selon moi) à l'étude ou cette pièce très curieuse dont l'élaboration semble avoir comme principale source d'inspiration certains décors et objets du Shining de Stanley Kubrick, nul doute que la demeure des Prill est un personnage à part entière.


Mais plus encore que l'anxiété que génère cet environnement, c'est bien la présence de Cassandra, interprétée par l'excellente Lavinia Wilson, qui va être au centre de toutes les inquiétudes. Alors que David et sa famille s'installent dans une demeure qui depuis cinquante ans est demeurée à l'abandon, c'est en explorant les différentes pièces qui la composent qu'ils découvrent un vieux modèle de robot dont le fonctionnement fut interrompu à la suite du décès des précédents propriétaires de la maison. La particularité de cette machine que les Pritt vont choisir de remettre en marche est qu'elle est directement raccordée à tout un ensemble de systèmes électroniques tous reliés entre eux. Cassandra semble donc être le ''cerveau'' du réseau qu'elle peut à loisir contrôler à distance. Sans être affreusement décevants, les débuts de cette mini-série en six épisodes laissent l'impression que l'on est face à une énième proposition de science-fiction dystopique au centre de laquelle un ou plusieurs individus vont être confrontés à un robot domestique défaillant. Et d'une certaine manière, il s'agit effectivement de cela. Mais là où le créateur de Cassandra a réussit le pari d'oser assumer un concept finalement presque vieux comme le monde puisque déjà abordé à maintes reprises, c'est sans doute en amenant son idée vers une voie retravaillée en profondeur. Je m'explique : ici, il ne s'agit pas tant d'opposer une mère de famille (Mina Tander dans le rôle de Samira Prill) à une machine dont l'inquiétant comportement serait simplement causé par des dysfonctionnements mais d'offrir à cette dernière l'occasion de montrer aux spectateurs qu'elle est peut-être plus que cette boite de conserve comme elle est parfois surnommée. Et donc, davantage qu'un programme informatique à l'origine uniquement disposé à accomplir des tâches prédéfinies. Alors que la série tourne tout d'abord presque exclusivement autour des membres de la famille Prill (complétée par les acteurs, Michael Klammer, Joshua Kantara et la jeune Mary Tölle), Cassandra prend un virage inédit en plongeant de nouveaux personnages cinquante ans plus tôt. La famille qui justement, un demi-siècle en arrière fut celle qui vécut dans cette même demeure. Sont ainsi introduits les trois membres de la famille Schmitt. Une famille totalement dysfonctionnelle. Le récit est donc partagé entre les événements présents et ceux du passé et Cassandra mue alors pour passer de la stricte dystopie horrifique au drame familial et au thriller !


Benjamin Gutsche signe avec cette nouvelle série, une véritable réussite où le rétro-futurisme des décors côtoie un scénario qui brasse dans un univers de science-fiction, des idées neuves et d'autres qui le sont déjà beaucoup moins (le thème de l'homosexualité non assumée par exemple). En intégrant les personnages incarnés par Franz Hartwig et par Elias Grünthal mais également pour la seconde fois l'actrice Lavinia Wilson, le réalisateur donne du sens à toute une série d'événements qui se produisent dans le présent et au point de vue de Cassandra, laquelle agît en conséquence comme le ferait une mère un peu trop... protectrice. La série aurait pu être absolument parfaite si seulement quelques éléments n'étaient pas venus défaire un système d'écriture mettant tout en œuvre pour que le récit ne souffre d'aucunes invraisemblances. Mais à vouloir en faire trop et à préférer parfois donner dans le ''spectaculaire'' plutôt que dans la sobriété et le réalisme, Benjamin Gutsche finit par multiplier les faux pas. Si l'emprise de Cassandra sur la jeune Juno justifie le fait que ses parents acceptent de laisser ''allumée'' la machine (la gamine ayant besoin de se reconstruire, sa nouvelle ''amie'' pourrait l'y aider selon eux), lorsque cette dernière commence à révéler sa véritable nature et fait montre d'une attitude très inquiétante, n'importe qui de censé aurait pris la décision de couper court à ses agissements. Heureusement, Samira est là pour veiller sur les siens. Mais pour combien de temps puisque son époux commence à voir surgir chez elle des problèmes psychologiques qui pourraient expliquer la situation ? Si la paranoïa supposée de la mère et l'absence de soutien de David sont plutôt bien menés et si toute la partie qui se déroule cinquante ans en arrière est véritablement bouleversante (bien qu'un peu caricaturale à force d'enfoncer le couteau bien profond dans le dos d'une femme et de son enfant confrontés à un mari et un père absolument monstrueux), le dernier épisode termine d'envoyer la série dans les pires travers du genre. Je n'en dirai pas davantage pour ne pas spolier la fin du récit et malgré certains défauts qui pourraient s'avérer rédhibitoires, il n'en est pas moins certain que Cassandra est une brillante réussite. Anxiogène et poignante, la série aurait, sans ses quelques absurdes excès, mérité le titre de l'une des plus remarquable dystopies de ces dernières années...

 

samedi 15 février 2025

Elevation de George Nolfi (2025) - ★★★★★☆☆☆☆☆

 


 

Entre le bruit et l'odeur, on a désormais droit à tout en matière de science-fiction. A Quiet Place de John Krasinski et ses supers prédateurs guidés par le son qu’émettent les survivants de notre espèce après que des créatures monstrueuses aient décimé la quasi totalité de l'humanité et des espèces animales terrestres. Bird Box de Susanne Bier dans lequel une mère et ses deux enfants tentent de survivre dans un monde ou voir et regarder sont devenus synonymes de danger. The Silence de John R. Leonetti dans lequel, cette fois-ci, des créatures ''ptérodactyliennes'' coordonnent leurs attaques au son que produisent une fois encore nos congénères. En janvier dernier a débarqué sur Prime Video un concept pas tout à fait neuf puisqu'il repose à son tour sur le sens aigu d'envahisseurs là encore monstrueux et hybrides semblant être le croisement de plusieurs créatures d'origines diverses. Il ne s'agit cependant pas d'une civilisation venue d'une autre galaxie puisque apparemment, d'immenses gouffres sont apparus sur notre planète pour libérer voilà plusieurs années des monstres qui vivaient jusque là sous la croûte terrestre. Et bé, ça commence bien. Et généralement, lorsque l'on dit que ça commence bien, ben... faut comprendre l'inverse. C'est donc sans aucun sens de l'imagination que les scénaristes John Glenn, Kenny Ryan et Jacob Roman s'y sont mis à trois pour nous pondre un script d'une cataclysmique pauvreté. Déjà que jusqu'ici le concept de créatures ayant développé des capacités d'adaptation en fonction de certains sens afin de traquer l'Homme avait très rapidement montré ses limites (ce qui n'empêcha pas de voir surgir une suite puis une préquelle au long-métrage de John Krasinski), les trois hommes n'ont apporté comme seule nouveauté au moulin du genre pratiquement prédéfini qu'est la science-fiction horrifique. Celle de créatures guidées par le souffre dégagé par leurs proies. Ce fameux dioxyde de carbone que n'importe lequel d'entre nous rejette lors de toute expiration. En indiquant très précisément à quelle hauteur sur terre les dites créatures ne peuvent aller au delà, une frontière invisible est ainsi créée et permet aux survivants de connaître des temps de répit avant de se lancer dans de périlleuses aventures lorsqu'il s'agit de se réapprovisionner en nourriture. Ou comme ici, en médicaments puisque comme cela est très souvent le cas, le jeune fils du héros est atteint d'une maladie grave qui le condamne à utiliser des filtres à oxygène qui viennent régulièrement à manquer.


Le père de Hunter (Danny Boyd Jr.) est incarné par l'acteur et producteur américain Anthony Mackie qui depuis une vingtaine d'années enchaîne les rôles au cinéma où il s'est notamment vu offrir le rôle du super-héros Le Faucon dans plusieurs longs-métrages de l'univers cinématographique Marvel entre 2014 et 2019. À ses côtés, les actrices Morena Baccarin et Maddie Hasson qui interprètent respectivement les rôles de Nina et de Katie. Une brune et une blonde qui dans cet univers post-apocalyptique et dystopique ne trouvent rien de mieux à faire que de se crêper le chignon ! Alors que la première est convaincue de pouvoir créer une arme qui pourra débarrasser l'humanité restante de ces créatures apparemment invulnérables aux armes à feu, le trio d'adultes va devoir descendre de leur refuge situé au sommet d'une montagne (comme toutes les communautés de la régions qui ne communiquent plus qu'à l'aide de drapeaux!) pour trouver en ville les filtres dont a besoin le fils de Will qu'incarne donc Anthony Mackie. L'occasion pour nos trois personnages de passer par diverses étapes de stress puisqu'ils seront confrontés aux dites créatures. Ouais, bon, ben c'est vraiment pas terrible tout ça. Et si Elevation ne dure que quatre-vingt dix minutes, au bout d'une demi-heure on commence déjà à en avoir marre tant les personnages sont mal campés et mal caractérisés. La mise en scène est d'un classicisme qui confine à l'ennui et les dialogues d'une vacuité étourdissante ! Allez, on va tout de même reconnaître que le film est parfois amusant. En effet, bien involontairement d'ailleurs, il arrive que l'on pouffe de rire devant quelques absurdités. Comme lors de cette séquence qui suit la séparation de Will qui retourne au refuge et de Nina restée dans un laboratoire afin de tester diverses munitions de sa propre conception. Will perd le contrôle de sa voiture et se retrouve alors à pieds et poursuivi par trois créatures. Alors qu'il vient d'utiliser inutilement les quelques cartouches qui lui restait, au moment où il aurait dû rendre son dernier souffle, voilà que survient tout à coup Nina, enfin prête à en découvre avec les bestioles ! L'arrivée de la jeune femme étant temporellement incohérente, forcément, ça pause question sur le sérieux de l'écriture des trois scénaristes et sur la mise en scène de George Nolfi. Mais bon, c'est pas trop grave vu que même sans cette drôlissime coquille, le film serait demeuré de toute manière d'une indigence crasse. Un film à éviter, donc. Surtout si l'on connaît déjà les quelques exemples de cités plus haut...

 

vendredi 14 février 2025

You are not Alone (Vous n'êtes pas seuls) de Philippe Lupien et Marie-Hélène Viens (2024) - ★★★★★★★☆☆☆

 


 

Depuis plus de dix ans maintenant, les québécois Philippe Lupien et Marie-Hélène Viens collaborent ensemble pour apporter leur vision du septième art. Un travail de longue haleine qui après être transparu à travers trois courts-métrage a fini par aboutir en 2024 avec You are not Alone (Vous n'êtes pas seuls), leur premier long-métrage. Une œuvre étrange, qui apparemment ne sait pas très bien sur quel pied danser puisque les deux réalisateurs y abordent deux aspects de la nouvelle vie quotidienne d'un jeune homme qui supporte mal sa séparation d'avec son ancienne petite amie. D'un côté, la rencontre tout à fait crédible entre Léo Biron (Pier-Luc Funk) et Rita St-Laurent (Marianne Fortier) et de l'autre, la convergence entre l'attitude du jeune homme qui se sentait littéralement disparaître et l'arrivée de John (François Papineau), un chauffeur de taxi qui un soir l'aida à réparer sa voiture et qui depuis ne cesse d'avoir d'inquiétantes intentions à son sujet. Des motivations qui ne semblent avoir rien de commun avec les faits-divers criminels qui touchent n'importe quelle société dite ''civilisée''. Non, ici, il s'agit plutôt d'évoquer l'hypothèse d'une tentative d'abduction par un extraterrestre se cachant sous les traits d'un homme d'une cinquantaine d'années. Les deux réalisateurs et scénaristes faisant ainsi des économies de moyens sur des effets-spéciaux qui auraient sans doute coûté trop chers s'ils avaient dû faire appel à des maquillages prosthétiques ou à l'emploi d'images de synthèse... Ici, le côté surnaturel du récit est emballé sous la forme la plus pure qui puisse exister : quelques éclairages bien sentis et une posture parfois (involontairement) amusante de François Papineau suffisent presque à concrétiser la présence sur le sol canadien (et peut-être même mondial, qui sait), d'une civilisation extraterrestre dont on ne saura d'ailleurs jamais les véritables intentions. Hostile ou bienveillant, il n'empêche que John se montre particulièrement insistant. Au point de retrouver sa ''proie'' jusque dans ce nouveau foyer qui l'accueil. Ce petit appartement où vit la délicieuse Rita, une jolie jeune femme qui au commencement n'avait fait que commander une pizza (Léo est livreur pour le compte d'une propriétaire de pizzeria campée par Sandrine Bisson) et qui lors de la livraison semble être tombée sous le charme de Léo. Un... ''coup de foudre'' que partagera d'ailleurs instantanément le jeune homme.


L'arrivée de Rita arrive donc à point nommé, au moment où Léo lâche littéralement la bride avec sa propre existence et son entourage. Se reconstruisant peu à peu auprès de celle qui deviendra par la force des choses sa nouvelle petite amie, l'un et l'autre vont finir par devoir affronter celui qui traque le garçon. Leur amour survivra-t-il à cette étrange expérience ? La conclusion nous le dira très certainement. Mais jusque là, Philippe Lupien et Marie-Hélène Viens nous plongent avec You are not Alone au cœur d'une intrigue amoureuse assez touchante. Entre la rencontre, les premiers regards, suivi du premier échange de salives et jusqu'à cette séquence où le couple se retrouve dans le lit de Rita, les deux réalisateurs filment avec application la relation entre ces deux êtres qui l'un comme l'autre semblaient attendre chacun de leur côté qu'arrive celui et celle qui allait leur permettre enfin de pouvoir vivre pour eux et pour l'autre. De ce point de vue là, nulle doute que de nous conter une belle histoire d'amour entre deux jeunes adultes est un projet parfaitement accompli. Ce qui semble par contre beaucoup moins évident lorsqu'il s'agit de souligner la sous-intrigue tournant autour de John et Léo. Entre ce nouvel exemple de Body Snatcher, ce sous-genre de la science-fiction sublimé en 1978 par l'indétrônable Invasion of the Body Snatchers de Philip Kaufman, et sa victime, Léo, le compromis qui a pris dix ans de l'existence de leurs auteurs pour aboutir à l'objet que nous avons devant les yeux est de l'avis de certains, le point faible du récit. Et il est vrai que dans le fond, la présence de John à l'écran dans ce qui demeurera sans doute comme une belle histoire d'amour mais un piètre film de science-fiction, reste futile. Il ne s'en dégage pas moins de You are not Alone une atmosphère presque unique que l'on ne rencontre généralement que dans ce type très original de science-fiction, où les repères habituels sont gommés au profit d'une approche inédite. La bande musicale de Pierre-Philippe côté où la photographie d'Ariel Méthot n'y étant évidemment pas étrangers. Avec ses cent-cinq minutes, on aurait pu croire que le film allait tomber dans un ennui sans fin, mais même si certains reprochent justement au long-métrage sa lenteur, celle-ci participe souvent de l'envoûtement généralisé que procurent le rythme parfois neurasthénique, l'ambiance sonore, la photographie ou plus simplement la remarquable interprétation de ses deux principaux acteurs. Une très belle surprise...

 

dimanche 9 février 2025

W Nich Cala Nadzieja de Piotr Biedron (2023) - ★★★★★★★★☆☆

 


 

Premier long-métrage écrit et réalisé par le cinéaste polonais Piotr Biedron, W Nich Cala Nadzieja que l'on peut traduire par ''Tout l'espoir est en eux'' mais qui à l'échelle internationale a été traduit sous le titre The Last Human met en scène ce que l'on suppose être l'une des toutes dernières survivantes à une apocalypse mondiale. Une catastrophe d'ampleur cataclysmique qui n'a permis qu'aux plus riches d'entre nous de fuir la surface de notre planète à bord de fusées lancées à destination d'une hypothétique planète pouvant les accueillir. Eve (mouarf!) survit sur un plateau désertique situé dans les hauteurs alors qu'en dessous, toute trace de vie a disparue. L'air y est devenu irrespirable et ces territoires désolés sont désormais devenus accessibles uniquement armé d'un masque à oxygène. Par mesure de protection, cette base construite par le propre père de l'héroïne il y a des années est gardée par Arthur. Un robot programmé pour veiller sur la jeune femme mais dont le logiciel interdit de tuer quiconque tente de pénétrer les containers disposés sur place et qui font office d'abri. Cependant, Eve est régulièrement contrainte de donner le change à Arthur à travers des mots de passe qui changent tous les trois mois. Alors qu'elle revient d'une expédition hors de la base, la jeune femme a oublié que celui qui était encore actif le jour précédent a changé. Inscrit à l'intérieur d'un fascicule qui regroupe les codes passés et à venir, celui-ci est précieusement conservé dans l'un des containers en question. Voici donc Eve incapable de donner le nouveau mot de passe à Arthur qui désormais lui interdit l'accès à l'abri ainsi qu'à tout ce qu'il contient ! Sous ses allures de long-métrage de science-fiction dystopique banal en ce sens où il regroupe des thèmes sur-employés et donc usés, le minimalisme qu'arbore W Nich Cala Nadzieja permet à son auteur de se concentrer essentiellement sur des approches philosophiquement passionnantes.


Alors que le film remporte en 2023 les Prix Electrolux du meilleur film environnemental et de la Meilleure réalisation au festival du film polonais ainsi que le Prix Méliès au Festival du film de Trieste, W Nich Cala Nadzieja profite de l'occasion qui est donnée à son interprète féminine pour interroger son personnage sur la question des Droits de l'homme s'agissant de l'accueil ou non d'une réfugiée dite ''politique'' alors qu'elle sera elle-même contrainte de supporter ce titre à des fins de tromperie face à un robot dont le programme semble inaliénable. C'est d'ailleurs là toute la complexité des rapports que va développer le polonais, partant ainsi d'un postulat de base où le ''passe-temps favori'' de notre héroïne sera de tenter ''d'humaniser'' la machine à travers toute une série de questions dont les concepts demeurent encore très flous pour Arthur. D'où la question : peut-on éduquer une machine pourtant programmée pour des tâches bien définies ? Piotr Biedron répond à cela à travers des attributions faites au robot et dont ce dernier est inconscient des conséquences que peuvent avoir ses prérogatives. Sans manichéisme ou presque, W Nich Cala Nadzieja prend la forme d'une science-fiction très intelligente où ne prévalent ni l'action, ni les effusions de sang. Le réalisateur et scénariste met donc en place deux personnages. D'un côté, Eve, qu'interprète l'actrice Magdalena Wieczorek et de l'autre, Arthur, incarné dans l'ombre par Jacek Beler puisque l'acteur n'y donne que de la voix. Dans une esthétique cyberpunk plutôt sobre sous un soleil de plomb martelant un plateau désertique qui aurait tout aussi bien pu servir de point de vue en hauteur à la franchise Mad Max de l'australien George Miller, Piotr Biedron oppose la conscience humaine à un programme informatique dont l'ambivalence donne parfois le vertige. Où comment une jeune femme se retrouve coincée face à une machine construite pour veiller sur elle mais lui interdisant l'accès aux vivres pour défaut d'accession au nouveau mot de passe ! La sobriété avec laquelle le cinéaste investit le cadre lui permet de tout miser ou presque sur la relation entre la femme et la machine. Entre la conscience organique faite de discernement et un software prévu pour n'accomplir que les tâches qui furent intégrées à son programme informatique. Brillant...

 

lundi 3 février 2025

Ils sont parmi nous de Jérôme Léger (2024) - ★★★★★★★☆☆☆

 


 

Sans même avoir lu le plus petit synopsis qui soit ni même avoir jeté un œil à la moindre bande-annonce, à la seule évocation de son titre, la série québécoise Ils sont parmi nous semble d'emblée désigner la possibilité d'une rencontre extraterrestre entre les protagonistes du récit et des êtres venus d'une galaxie lointaine. La Classification de Hynek s'agissant de l'observation d'ovnis ou mieux encore d'une rencontre rapprochée avec les passagers de l'un d'entre eux (dont la plus extraordinaire demeure celle du troisième type), jusqu'à ce que nous soient très officiellement révélées d’hypothétiques rencontres avec des petits hommes verts ou gris, le doux rêveur qui espère chaque fois qu'il lève la tête vers le ciel tomber sur un Objet Volant Non Identifié doit pour l'instant ronger son frein et passer par la fiction pour donner corps et réalité à sa passion. Clémence Dargent et Martin Douaire créèrent en 2021 l'excellente série française OVNI(s) réalisée par Antony Cordier. Laquelle se basait sur le Groupe d'études des phénomènes aérospatiaux non identifiés plus connu sous l'acronyme Gepan et dont la spécificité est comme son nom l'indique d'étudier le phénomène Ovni depuis la seconde moitié des années soixante-dix. S'agissant de la série québécoise créée cette fois-ci par Jérôme Léger et Raphaël Côté, les personnages principaux du récit évoluent au sein de la fantaisiste Agence Canadienne de la Conformité Aérospatiale. Dirigée par Jocelyn Terreault (Gildor Roy), l'A.C.C.A connaît des heures douloureuses depuis que le ministre de la sécurité René Ryan (Stéphane Crête) a pris la décision de fermer et de mettre un terme au financement de l'agence une bonne fois pour toute. Alors que certains membres de la petite équipe en sont réduits à se demander ce qu'ils vont devenir, c'est précisément le jour de l'annonce de la fermeture de l'A.C.C.A que Béatrice Thomas (Julianne Côté) est engagée à l'agence. Devant le désarroi de certains de ses nouveaux collèges et de Jocelyn Terreault, la jeune femme envisage l'idée de monter de toute pièce une fausse apparition d'ovni dans le ciel afin d'intéresser l'opinion publique et ainsi faire revenir le ministre sur sa décision. Le soir même, elle et son nouveau patron se rendent dans un champ et enregistrent le drone que Béatrice a emporté avec elle, lequel a l'allure d'une petite soucoupe volante.


Filmant la séquence, le duo (enfin, surtout Jocelyn) se rend bien compte du désastreux résultat et décide de retourner à l'agence sans pour autant exploiter leur enregistrement. Pourtant, non loin de là, un couple d'influenceurs a assisté au vol du drone sans soupçonner la présence de Béatrice et de son patron. Persuadés d'avoir filmé une soucoupe volante, les deux jeunes gens vont alors partager leur découverte sur les réseaux sociaux... Réalisé par Jérôme Léger et produite par la société de production de cinéma et de télévision canadienne Pixcom fondée par Jacquelin Bouchard en 1987, Ils sont parmi nous est une mini-série fort sympathique pour laquelle va sans doute falloir prendre quelques précautions avant de lancer sa projection. En effet, la particularité de l'accent québécois et d'une partie du vocabulaire employé contraindra sans doute tout ou partie du public hexagonal à regarder les huit épisodes de la saison agrémentés de sous-titres. À défaut de quoi, l'expérience risque de se révéler compliquée. Et même, si l'on finit par s'accoutumer à l'idée de jongler entre ce que l'on entend et ce qui est écrit au bas de l'image, il faudra sans doute malgré tout un court moment d'adaptation. L'une des particularités de Ils sont parmi nous s'inscrit dans la courte durée des épisodes qui oscillent entre dix et quinze minutes pour un total se rapprochant finalement de celle d'un téléfilm ou d'un long-métrage cinéma. Essentiellement tournée dans les locaux de la dite A.C.C.A, la série ressemble à un ersatz de Caméra café (sans sa machine à boissons) où l'humour est ici aussi très présent. Au vu de l'évolution de l'intrigue il va évidemment difficile de ranger Ils sont parmi nous dans le genre science-fiction tant le sujet tient de la supercherie. L'on passe un très agréable moment devant une poignée d'interprètes et de personnages fort sympathiques (en dehors de l'excellent Stéphane Crête qui incarne un ministre de la sécurité parfaitement imbuvable !). La courte durée n'est en soit pas vraiment gênante puisque le réalisateur va droit à l'essentiel. Les coupures causées par les génériques de débuts et de fin sont relativement courtes et ne laissent donc pas le temps au téléspectateur de ''sortir'' du concept. Notons que la toute fin laisse la porte ouverte à une éventuelle seconde saison que l'on espère découvrir très bientôt...

 

dimanche 2 février 2025

Silo - saison 2 de Graham Yost (2024) - ★★★★★★★★☆☆

 


 

À l'issue de la première et brillante saison de la série de science-fiction américaine Silo, son créateur Graham Yost avait déployé lors de la conclusion, l'idée selon laquelle il existait de nombreux autres endroits comme celui où vivent les protagonistes. L'héroïne Juliette Nichols (Rebecca Ferguson) avait été contrainte et forcée d'aller s'occuper du nettoyage de la caméra extérieur. Laquelle avait fait le choix de n'en rien faire et d'aller explorer ce qui pouvait se cacher au delà de la colline. Cette ''frontière'' qu'aucun de ceux qui furent jetés dehors avant elle ne parvinrent à atteindre. À l'intérieur du Silo 17, les habitants devinrent témoins de la scène et les plus proches amis de Juliette, convaincus qu'elle avait pu y survivre. Dès le 15 novembre 2024 et jusqu'au 17 janvier dernier, la plateforme Apple TV+ a diffusé l'intégralité des dix épisodes de la seconde saison. Et en faisant aventurer son héroïne dans un second Silo, Graham Yost permet à cette nouvelle fournée d'être découpée en deux parties bien distinctes. Car l'on retrouve bien évidemment tous les protagonistes de la première saison mais aussi de nouveaux personnages, eux, issus de ce second silo dont on devine le sort qui lui fut accordé dès l'entrée de Juliette à l'intérieur. Une réplique que l'on aurait pu supposer de parfaite si un événement d'ampleur exceptionnelle n'avait pas pousser ses habitants à se réfugier à l'extérieur pour y mourir dans d'atroces conditions. Silo saison 2 repousse de très loin les conditions de vie de ses habitants. Entre un Tim Robbins plus magistral que jamais dans le rôle du maire Bernard Holland et que le créateur de la série implique davantage que lors de la précédente saison. L'on retrouve également le rappeur américain Common dans le rôle de Robert Sims ou l'excellent Chinaza Uche dans celui du nouveau shérif Paul Billings qui depuis le départ de Juliette a pris sa place. Alors que dans le principal silo où s'était jusque là située l'action lors des dix premiers épisodes diffusés pour la première fois à partir du 5 mai 2023 toujours sur Apple TV+ la révolte gronde de plus en plus, la question de la viabilité à l'extérieur n'est plus la seule et unique raison de douter de la part de ses habitants puisque beaucoup émettent un doute quant à la sincérité de ses dirigeants.


Tandis que diverses stratégies de conquêtes se développent au sein de la population, Juliette explore ce nouveau silo dont la désagrégation est l'un des aspects les plus remarquables de cette nouvelle saison. Résultat d'une révolte dont les conséquences se lisent sur chaque mètre-carré. Des décors sombres, formidablement dégradés, amples et pourtant claustrophobes qui rendent à côté la vie du silo où vivent les compagnons de Juliette presque envisageable. Alors que l'on retrouve la totalité des interprètes présents lors de la première saison, l'arrivée de notre héroïne dans ce nouveau silo offre l'opportunité de faire connaissance avec un nouveau protagoniste en la personne de Solo. Personnage complexe brillamment incarné par le méconnaissable Steve Zahn. Cette partie du scénario, qu'il s'agisse de Solo lui-même, de l'endroit où il vit et des découvertes primordiales que Juliette aura l'occasion de faire lors de son long périple dans ces angoissants dédales est le parfait miroir de ce que sont en train de vivre ses compagnons. Un préambule à la catastrophe qui pourrait éventuellement se produire cette fois-ci dans le silo numéro 17. Silo saison 2 pénètre encore davantage l'esprit du spectateur et cela en dépit de quelques défauts qui à force de marteler la ''toute puissance'' de l'héroïne finit au bout du compte par la décrédibiliser. En effet, si Rebecca Ferguson demeure irréprochable, son personnage est traité de manière un peu trop ostentatoire. Figurant plus que jamais la super-héroïne sur laquelle repose les attentes du (des) silo(s), Juliette survit à tout. Une infection plus proche de la gangrène que de la simple petite coupure au doigt, à une fléchette plantée dans l'épaule, à un accident de décompression suite à une plongée en profondeur et, dans ce dernier cas, à ce qui aurait logiquement dû la condamner à l'hypothermie et donc... à la mort. Imaginez : Juliette au fond d'un silo dont la partie inférieure est inondée sur des dizaines de mètres de profondeur, sans combinaison adaptée, les bras nus et, cerise sur le gâteau, une remontée en apnée ! Bref, invraisemblable. Mais fort heureusement l'on parvient à mettre de côté ces absurdités tant cette seconde saison demeure passionnante. Des enjeux, nombreux, et surtout des personnages tour à tour attachants et monstrueux. La palme de la plus formidable crapule revenant évidemment sans conteste à Tim Robbins !

 

mercredi 1 janvier 2025

Omni Loop de Bernardo Britto (2024) - ★★★★★★★☆☆☆

 


 

Space-opera, Dystopies, Uchronies, Cyberpunk, Post-Apocalypse, Guerres intergalactiques, Voyages dans le temps... La science-fiction est d'un point de vue littéraire et cinématographique, un vaste champ d'expérimentations qui permet à tout à chacun de trouver son bonheur sans pour autant que les amateurs de l'un ou l'autre de ses sous-genres ne donnent du coude à leurs voisins. Concernant le Voyage dans le temps, celui-ci se définie parfois lui-même en sous catégories. Du simple fait de voyager dans le passé ou dans le futur en passant par certains phénomènes comme les boucles ou les paradoxes temporels. Si la récurrence de cette dernière est quasiment systématique et agit de la même manière que l'effet papillon (lequel consiste en une succession d'événements perturbés par une action provoquée antérieurement), les boucles temporelles lui apportent majoritairement matière à modifier le futur à travers des actions se produisant dans le passé. L'un des plus remarquables exemples de ce que l'on nomme ''Boucle de causalité'' ou ''Paradoxe de l'écrivain'' demeure le formidable Prédestination des frères Michael et Peter Spierig sorti en 2014. Plus connu et sans doute beaucoup plus ludique en ce sens où les phénomènes qui s'y produisent sont parfaitement simples à comprendre, l'on retiendra également le génial Un jour sans fin de Harold Ramis qui lui vit le jour en 1993. Une approche du genre beaucoup plus ''Familiale'' que l'on conseillera donc en priorité à toutes celles et ceux qui voudraient pour la première fois de leur existence se pencher sur ce genre véritablement passionnant. Le voyage dans le temps et les boucles temporelles connaissant depuis un certain nombre d'années une recrudescence au cinéma et à la télévision (et pas une ''recrue d'essence'' comme il m'est déjà arrivé de l'écrire, sic!), le regain d'intérêt du public vis à vis d'un sujet qui, sans mauvais jeu de mots, à tendance à tourner en rond, donne parfois naissance à des œuvres tout à fait inattendues. À l'image de l'un de ses tout derniers représentants, intitulé Omni Loop, et dans lequel, le réalisateur et scénariste brésilien Bernardo Britto offre une très intéressante alternative à la grosse machinerie américaine. S'il s'agit là encore d'évoquer le Voyage dans le temps ainsi que les Boucles temporelles, celui-ci les envisage d'une toute autre façon.


La partition musicale analogique de la compositrice américaine Kaitlyn Aurelia Smith participe à merveille à l’émulsion entre les personnages, le récit et le sujet des Boucles temporelles...


Phénomène souvent incontrôlé auxquels les protagonistes des récits tentent généralement d'échapper, l'héroïne ici incarnée par la formidable Mary-Louise Parker reproduit la ''séquence'' de manière indéfinie afin de résoudre l'une des questions fondamentales qui se posent lorsque l'opportunité de revenir en arrière pour changer certains faits se présente. Un désir ouvertement prononcé par Zoya Lowe, l'héroïne en question, mais également une contrainte forcée puisque cette quinquagénaire se sait condamnée à mourir dans cinq jours. Cinq pas plus. Et autant de journées qu'elle revit, inlassablement, en avalant une étrange gélule qui la fait donc revenir dans un tout récent passé. Ancienne physicienne, Zoya a travaillé il y a longtemps sur cette étrange gélule dont elle avait découvert une boite à moitié remplie dans le jardin familial alors qu'elle n'était encore qu'une adolescente. Découvrant lors de son premier usage le pouvoir de celle-ci, elle en usa lors de ses ''brillantes'' études lui ouvrant par la suite les portes d'une grande entreprises de recherches scientifiques. Ici, le temps est une monnaie dont le prix n'est pas négociable. À moins que Zoya ne parvienne à déterminer la composition de la gélule afin que le voyage de cinq jours se transforme en mois et pourquoi pas, en années. Elle va pour cela demander de l'aide à Paula (excellente Ayo Edebiri), une jeune étudiante en sciences qu'elle va tout d'abord tenter de convaincre de l'existence de cette boucle temporelle dans laquelle elle s'est enfermée afin que la jeune femme l'aide à résoudre l'épineux problème de cette gélule qui restreint le voyage dans le passé à cinq jours... Plus qu'une œuvre de science-fiction, Omni Loop est un drame très touchant, évoquant la famille et renvoyant donc le genre à certaines de ses fondations : tout reprendre depuis le début afin de modifier certains événements. Comme ici, les rapports de Zoya vis à vis de sa fille Jayne (Hannah Pearl Utt) qu'elle a quelque peu délaissée au profit de son métier. Le duo formé par Mary-Louise Parker et Ayo Edebiri est très touchant. Au fil de l'épreuve qu'elles vivront ensemble, leur relation deviendra presque celui d'une mère et de sa fille. Dénué de tout effet-spécial ou presque (''l'évaporation'' de Zoya ou ce trou noir qui la ronge), Omni Loop est une grande réussite, toute en émotion et en sensibilité. Parfois intimiste sans jamais être rébarbatif mais aussi très ludique dans la forme que prend le montage du récit. L'on notera en outre la présence inattendue de l'acteur Harris Yulin dans le rôle du professeur Duselberg. Bref, Bernardo Britto réussit le pari de mêler drame et science-fiction. Une brillante démonstration portée par l'émouvante interprétation de ses deux principales protagonistes...

 

dimanche 15 décembre 2024

The First de Beau Willimon (2018) - ★★★★★☆☆☆☆☆

 


 

Le funeste destin de la série The First m'évoque une chanson. L'Aquoiboniste de Jane Birkin. En fait, tout dans cette série américaine de science-fiction créée par Beau Willimon et diffusée pour la première fois sur la plateforme HULU renvoie ne serait-ce qu'au titre de cette sympathique mélodie écrite et composée par Serge Gainsbourg. Cet aquoibon dont se parent souvent les producteurs lorsqu'un programme cinématographique ou télévisuel ne remplit ni le cahier des charges, ni les poches de leurs créanciers ! Aquoibon donner aux spectateurs les premières miettes d'un concept fort encourageant, si peu original soit-il (la conquête spatiale vers la planète Mars étant devenue l’apanage de nombreuses séries et longs-métrages), pour ensuite leur retirer la fourchette, le couteau et l'assiette du ''délicieux'' plat qu'ils avaient devant leurs yeux. Si l'on se réfère à son seul titre, The First n'a d'emblée rien de très prometteur. Le premier. Okay, mais de quoi ? Par contre, si l'on suit le synopsis et la richesse que cache l'idée d'une colonisation de la Planète Rouge, là c'est autre chose. Et d'ailleurs, à ce sujet, la série démarre plutôt bien puisque d'emblée, nous sommes en 2033 et l'on assiste au décollage d'une fusée à destination de Mars... laquelle explose en plein vol, faisant ainsi d'une partie des spectateurs venus assister à l'événement, des familles endeuillées ! Dès lors, un procès va opposer ces dernières, les dirigeants de la société privée VISTA qui collabore avec la NASA ainsi que les membres du Congrès s'agissant de la pérennité du projet. L'on apprend également qu'il faudra patienter presque deux ans et la prochaine fenêtre de tir pour envoyer la prochaine fusée et son nouvel équipage à destination de Mars. Deux ans ! Et autant de raisons proprement absurdes pour les scénaristes de se concentrer presque exclusivement sur la caractérisation des personnages. Et c'est bien là que le bât blesse. Faisant ainsi des créateurs, des réalisateurs (Deniz Gamze Ergüven, Agnieszka Holland, Ariel Kleiman et Daniel Sackheim) et des scénaristes (Beau Willimon, AJ Marechal, Francesca Sloane, Francine Volpe, Julian Breece, Carla Ching et Christal Henry) les complices d'une œuvre presque mensongère. 

 

Du moins en ce qui concerne la forme sous laquelle va se présenter cette première saison qui selon les dires de celles et ceux qui l'ont découverte dans son intégralité (huit épisodes en tout) se passe exclusivement sur le sol terrestre. On n'en voudra évidemment pas aux auteurs de cette série mettant en scène l'acteur Sean Penn dans le rôle de l'astronaute Tom Hagerty et l'actrice Natascha McElhone dans celui de l'une des responsables du projet, Laz Ingram, d'avoir voulu accorder une très grande importance à la caractérisation des principaux personnages, mais de là à les garder les pieds sur Terre tout au long de la saison alors que les spectateurs ne rêvaient que de voir un groupe d'astronautes prendre son envol vers la Planète Rouge, on peut comprendre que ceux-ci se soient rapidement désolidarisés du concept, causant ainsi d'irrémédiables dommages sur la continuité de la série ! Aquoibon, donc, se farcir les affres des uns et des autres même si au moins un épisode s'avère émotionnellement très bien écrit (le second, intitulé Ce qui est nécessaire) ? Entre ce qu'attendaient les téléspectateurs et l'approche des scénaristes, forcément, cela ne pouvait pas matcher. D'autant plus qu'en terme d'émotion, justement, l'on passe d'un épisode très réussi à un autre dont le contenu est d'une faiblesse scénaristique crasse (le troisième, Cycles). Si l'on conjugue ainsi le propos mensonger qui voudrait que la série transporte ses protagonistes à plus de soixante millions de kilomètres de notre planète à des sous-intrigues dont la qualité d'écriture joue au yo-yo et varie donc selon leurs auteurs et leur inspiration, rien d'étonnant à ce que The First n'ait pas trouvé son public. Réduire ne serait-ce que de moitié l'exposition sur Terre pour ensuite lancer les personnages dans cette grande aventure spatiale qu'est la conquête de Mars aurait sans doute renversé la vapeur et nourrit l'espoir d'une seconde saison viable et riche en promesses...

 

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