mercredi 27 décembre 2023

Mira de Dmitriy Kiselev (2022) - ★★★★★★★★☆☆

 


 

La science-fiction russe est en général d'une rigueur scientifique qui peut laisser de marbre une partie du public. Le dernier long-métrage de Dmitriy Kiselev intitulé Mira adopte au contraire une approche beaucoup plus ludique et légère en transposant sa thématique au sein d'un film catastrophe des plus mouvementé. Deux genres qui n'en sont pas à leur première communion et qui trouvent ici un terrain de jeu prompt à multiplier les séquences de bravoure. Entre une adolescentes marquée physiquement et intellectuellement depuis longtemps par un accident qui la brûla sur une bonne partie de son corps et son père, un cosmonaute qu'elle n'a pas revu depuis ces six dernières années qu'il a passé en orbite autour de notre planète. S'ouvrant quasiment sur une séquence relativement pénible lors de laquelle nous découvrons la jeune Lera (l'actrice Veronika Ustimova) participant à une course sur une piste d'athlétisme, Mira débute effectivement assez mal. Une bande-son moisie qui ne colle absolument pas à cet univers où la technologie va avoir une place cruciale nous défonce les tympans. Cet expédient mimant ces universités américaines à grand renfort de musique fast-food, de joueurs de football américain et de majorettes donne envie de mettre immédiatement un terme à cette aventure. Fort heureusement, cette approche de très mauvais goût va très rapidement laisser place à des enjeux nettement moins bêtifiants même si là encore, le public sera en proie à certains mauvais démons qui nourrissent depuis des décennies nombres de longs-métrages. Couple séparé. Difficulté des rapports entre l'adolescente et son nouveau beau-père (l'acteur Maksim Lagashkin dans le rôle pas très mature de Boris). Absence du père. Gestion peu aisée du demi-frère. Le film de Dmitriy Kiselev, comme la plupart de ceux qui abordent ce type de problèmes familiaux recommandera à la jeune héroïne une maturité exceptionnelle pour se sortir des différentes situations dans lesquelles elle sera directement impliquée.


L'un des très bonnes idées de Mira est l'usage de nouvelles technologies qui permettront à son père Arabov (Anatoliy Belyy) d'aider sa fille à des centaines de kilomètres au dessus de sa tête. ''Accompagné'' par un ordinateur de bord doté d'une voix féminine, le cosmonaute va en effet employer une toute nouvelle technologie permettant de prendre le contrôle de tout appareil électronique se situant sur notre planète et plus précisément ceux placés dans les différents quartiers de la ville de Vladivostok où se situe l'action et où une pluie de météores s'apprête à pleuvoir au dessus de la tête de ses habitants. C'est là qu'intervient le thème du film catastrophe lors d'une séquence qui durera près de huit minutes ! Il s'agit là de l'un de ces moments de bravoures que nous offre ce film qui ne fait l'économie d'aucun effet pour nous en mettre plein la vue. Les effets-spéciaux sont souvent remarquables, surtout lorsque les différents impacts des météores n'entrent pas en collision avec le sol  ou les immeubles hors-champ de la caméra ! Quelques effets numériques demeurent quelque peu ratés. Comme ces débris qui en arrière-plans n'atteignent malheureusement pas l'ampleur d'un impact qui aurait dû engendrer nettement plus de dégâts. Mais cela reste un détail car la séquence est filmée en plan-séquence et donc d'une seule prise, quoique l'on puisse envisager qu'il puisse y avoir deux ou trois coupures à certains endroits. La caméra virevolte littéralement autour du personnage de Lera et rappelle dans une moindre mesure la longue et impressionnante traversée du héros des fils de l'homme de Alfonso Cuarón en 2006 dans une ville dévastée. Mira tourne essentiellement autour du père et de sa fille même si viennent s'y greffer quelques personnages secondaires comme Misha qu'interprète le jeune Yevgeniy Yegorov ou Svetlama, la mère de la jeune héroïne qu'incarne l'actrice Darya Moroz. Aidée de très loin par un père dont les heures seront comptées puisque la station-spatiale sera percutée par un débris de météorite, l'aventure sera notamment l'occasion pour la jeune Lera de combattre sa hantise du feu. Le mélange entre science-fiction et catastrophe fonctionne parfaitement et le duo formé par Anatoliy Belyy et Veronika Ustimova est attachant. Une bonne surprise venue de Russie, donc...

 

lundi 11 décembre 2023

Tropic d'Edouard Salier (2023) - ★★★★★★★★☆☆

 


 

 

En France, on ne fait décidément rien comme dans les autres pays. Et surtout pas lorsque l'on aborde la science-fiction sur grand écran. On ne va pas s'étendre sur les quelques mockbusters (Terminus) ni sur les exemples de hard science-fiction (Bunker Palace Hotel) que certains cinéastes osèrent mettre en scène ces trente ou quarante dernières années mais plutôt sur un genre très spécifique qui consiste à mettre en avant des individus dont le rêve, le projet et le métier les destinent à aller dans l'espace. De prime abord l'on pense à L'étoffe des Héros de Philip Kaufman, à Apollo 13 de Ron Howard, à 2001, l'odyssée de l'espace de Stanley Kubrick, à Space Cowboys de Clint Eastwood ou même au plus récent, First Man de Damien Chazelle. Mais dans l'hexagone... qu'ont les français à titre de comparaison ? Pas grand chose à vrai dire. Car à part la comédie Un ticket pour l'espace d'Eric Lartigau, il est vrai que nous n'avons pas eu grand chose à nous mettre sous la dent ces dernières décennies... Du moins jusqu'à ce que le réalisateur, graphiste et photographe français Edouard Salier se penche sur la thématique de la conquête spatiale au travers d'une œuvre qui dénote avec la plupart des œuvres habituellement consommées par les amateurs de science-fiction. Avec son énigmatique titre, Tropic aurait tout aussi bien pu faire les affaires d'un long-métrage d'aventure situé dans des contrées exotiques, dans un pays plombé par une chaleur et une moiteur écrasantes. Ce qu'il est au demeurant. Pourtant, le film fut tourné en grande partie dans la région mulhousienne, entre Wittelsheim et Baldersheim pour se finir dans de merveilleux décors Guyanais. Tropic met donc au centre de son intrigues, deux frères jumeaux prénommés Làzaro (Pablo Cobo) et Tristan Guerrero (Louis Peres) ainsi que leur mère Mayra (l'actrice espagnole Marta Nieto). Bien que le long-métrage repose sur un script écrit par le réalisateur lui-même ainsi que par Mauricio Carrasco et Thibault Vanhulle, on pense presque immédiatement à la nouvelle The Color Out of Space du romancier américain Howard Phillips Lovecraft et à sa ressente et éponyme adaptation au cinéma par le réalisateur Richard Stanley avec dans le rôle principal, l'acteur Nicolas Cage. Car dans un cas comme dans l'autre, la chute d'une météorite aura de lourdes conséquences sur une partie de la faune et de la flore environnantes. Sauf que dans le cas de Tropic, Edouard Salier s’intéresse moins à l'aspect fantastique du phénomène qu'aux répercussions que celui-ci va avoir sur la vie des deux frères. Car Làzaro et Tristan s'entraînent depuis des mois au sein d'un programme militaire et scientifique à l'issue duquel les meilleures recrues auront toutes les chances d'obtenir leur place à bord d'une prochaine mission dans l'espace.


Dotés d'une intelligence et de capacités physiques hors-normes, les deux garçons rêvent d'être élus tous les deux. Mais le premier va devoir faire davantage d'efforts s'il veut égaler Tristan qui pour l'instant est premier au classement. Surtout qu'un concurrent prénommé Louis (l'acteur Marvin Dubart) se situe en seconde position. La faiblesse de Làzaro, c'est son souffle. Alors, en bon frère, Tristan l'entraîne le soir au bord d'un lac où les deux garçons pratiquent l'apnée. Jusqu'au jour où une lueur verte fait son apparition dans le ciel et que des débris de météorite tombent au beau milieu du lac. Rattrapé par un étrange phénomène qui s’étend sous les eaux, Tristan n'a malheureusement pas le temps de revenir vers la berge et est touché de plein fouet. Une fois à l’hôpital, le verdict est sans appel : le jeune homme vient d'être frappé par une bactérie dont les origines demeurent inconnues. Diminué physiquement et intellectuellement, ses chances de partir un jour dans l'espace sont réduites à néant... Dans son genre,Tropic est une sacrée bonne surprise comme il en existe parfois de manière tout à fait inattendue. Sorti sur les écrans le 02 août dernier, le film n'a semble-t-i pourtant pas vraiment fait parler de lui. Et ce n'est d'ailleurs pas la première fois car sur le seul territoire français, si un seul film aurait mérité que l'on abreuve les médias de publicités vantant ses qualités, c'est bien le 2021 que réalisa tout seul et avec ses propres moyens le talentueux Cyril Delachaux en 2018 et dont on attend avec une grande impatience un éventuel futur projet cinématographique. Avec ses allures de film d'horreur entrant dans la catégorie ''Body Horror'' Tropic est bien plus que cela même si de ce point de vue il s'avère efficace. Edouard Salier cherche visiblement plus à titiller la fibre émotionnelle du spectateur à travers le chamboulement d'une famille frappée par une ''malédiction venue d'ailleurs''. Remise en question de l'un et de l'autre des deux jumeaux. Culpabilité, remords... Tous les ingrédients sont réunis pour faire de Tropic un grand et beau film osant la mutation entre des genres dont l'hybridation semblait pourtant risquée. Et pourtant, cela fonctionne merveilleusement bien. Les deux principaux interprètes sont attachants et parfaitement dans leur rôle. Tropic fascine, entre monstruosité, drame et science-fiction... À découvrir au plus vite...

samedi 18 novembre 2023

Quanta de Nathan Dalton (2019) - ★★★★☆☆☆☆☆☆

 

 


 

Le doublage, ça n'est pas qu'un simple métier. Pas non plus qu'une alternative à la profession d'acteur. Non, le doublage, c'est tout d'abord un art et une faculté certaine pour retranscrire diverses émotions avec comme seule contrainte de devoir le faire avec la voix et uniquement à travers ses intonations. La télévision russe étant fauchée comme les blés, qui n'a jamais vécu l'atroce expérience d'une œuvre étrangère doublée dans la langue de Tolstoï, de Soljenitsyne ou de Nabokov ? Qui a échappé jusqu'à maintenant à cette épouvantable technique du Voice Over consistant pour les dialogues d'un long-métrage à être recouverts par celui ou ceux du ou des doubleurs ? On hésite alors à dresser la liste des inconvénients relatifs à l'usage d'un tel procédé. Est-le fait d'entendre des doubleurs russes chevaucher des voix françaises, anglaises, espagnoles ou japonaises ? Est-ce le ton monocorde avec lequel ces mêmes doubleurs empêchent la moindre émotion de poindre de tel ou tel dialogue ? Ou, pire, est-ce parce que les personnages féminins sont eux-mêmes doublés par des hommes ? Je n'affirmerai pas que cela est depuis devenu une constante mais ayant été moi-même témoin d'une telle pratique, je peux vous dire que l'expérience est proprement insoutenable. Le doublage est donc tout un art. Et lorsque certains tentent de s'y employer sans avoir ne serait-ce qu'une once de talent, le résultat peut être désastreux. C'est malheureusement ce qui semble être arrivé à Quanta de Nathan Dalton. Destin peu enviable qui sur le territoire français semble avoir finit de sceller le sort d'un film de science-fiction ambitieux sur le papier tout en n'étant que très faiblement convainquant à l'écran. Que le sujet portant sur la matière noire fascine ou non ou qu'un signal venu d'une lointaine galaxie puisse éveiller la curiosité des ufologues, la qualité du traitement est impérative. Réalisme et sérieux se doivent d'être au cœur de ces passionnants sujets scientifiques. Sinon, on peut remballer ses affaires et s'adonner à d'autres passions que la réalisation de longs-métrages. En ce sens, Quanta semble ne pas devoir tout à fait remplir son contrat. La faute, sans doute, à un budget insuffisant mais aussi et surtout à des interprètes pas toujours très convaincants et à un scénario qui ne tient absolument pas ses promesses.


Le réalisateur résoudra d'ailleurs son intrigue matinée de thriller en contraignant l'un de ses protagonistes prénommé George (Mark Redpath) à détruire son matériel de recherches ainsi que les résultats obtenus histoire de mettre un terme au récit de la manière la plus radicale mais également la plus simpliste qui soit. Mais le sujet de cet article n’étant pas là, je voudrais revenir sur le doublage en français à proprement parler. Il est clair et indubitable qu'en n'ayant pas bénéficié d'acteurs d'expérience dans ce domaine, Quanta demeure à ce jour l'un des plus gros ratages dans le domaine du doublage. En effet, le travail effectué par ce que l'on aura le réflexe (poli) de nommer sous le nom d'amateurs est d'une telle indigence que c'est l'intérêt tout entier de l'intrigue qui en est faussé. Ce que le spectateur envisage comme une œuvre de science-fiction ne pourra dans un premier temps pas l'empêcher de rire. Ce n'est pas tant les interprètes que l'on moque alors mais les doubleurs que l'on imagine assis devant les images du film, à reproduire les dialogues en langue française. À défaut de nous passionner pour cette histoire de conflits d'intérêt égocentriques et scientifiques, ma compagne et moi nous sommes amusés à imaginer à combien se chiffrait le nombre de doubleurs. Nous n'en comptâmes pas plus de trois. Le plus triste (ou le plus drôle finalement) furent ces quelques personnages féminins tous doublés par une seule et même personne et de surcroît, à l'accent fort prononcé. Que les interprètes portent des signes physiques aux origines occidentales ou extrêmes-orientales, les doubleurs semblent n'en avoir rien eu à faire. Tout le monde boit dans le même verre en dépit de tout bon sens. L'effort de doubler officiellement ou non une œuvre cinématographique est en soit un acte appréciable et que l'on réservera au confort de celles et ceux qui ne supportent pas la lecture de sous-titres. Mais malheureusement, dans le cas de Quanta, la qualité plus que déplorable des doublages qu'elle rend parfaitement rédhibitoire toute raison de le visionner dans notre langue. Ne reste plus alors que de tenter de le dénicher dans sa langue d'origine...

 

mardi 17 octobre 2023

The Gracefield Incident de Mathieu Ratthe (2017) - ★★★★☆☆☆☆☆☆

 


 

Lorsque l'on n'a de talent ni pour la mise en scène, le montage, le cadrage, l'écriture ou l'interprétation, le mieux reste encore de tourner un Found Footage. Pas besoin d'avoir fait de grandes écoles de cinéma ou d'avoir la moindre prédisposition pour l'un ou l'autre de ces secteurs. Une ou plusieurs caméras, un minimum d'oseille, une poignée d'interprètes libres de tous engagements et surtout, surtout, des idées plein la tête et une motivation sans faille. Avant que le canadien Mathieu Ratthe ne produise, n'écrive et ne réalise The Gracefield Incident en 2017, il fut l'auteur de trois courts-métrages entre 2008 et 2011. Six années séparent donc le dernier d'entre eux du premier et actuellement seul long-métrage qu'il a lui-même mis en scène. On imagine sans mal que le budget du film n'a pas dû dépasser les quelques dizaines de milliers de dollars au vu du résultat à l'écran. Bénéficiant d'idées intéressantes comme le personnage de Matthew Donovan (qu'interprète lui-même le réalisateur) qui se dote d'une caméra directement implantée à l'intérieur de son œil prothétique, on peut supposer que The Gracefield Incident sera tourné à la manière d'un FPS, un concept qui fut notamment employé deux ans plus tôt à travers Hardcore Henry de Ilya Naishuller. Sauf que... ben non, en fait. Ou si peu. L'intérêt de la chose ne dépassant pas les portes du script, l'idée même de filmer le long-métrage en vue subjective à travers le simulacre d'œil du personnage central est directement contrecarré par la présence d'un ami doté d'un appareil-photo et d'un second équipé d'une caméra. Autant dire qu'à l'image, la différence entre ce qui apparaît comme une technologie nouvelle et des méthodes de filmage couramment utilisées n'est pas vraiment flagrante. De plus, le concept se prend les pieds dans le tapis puisqu'en passant de l'une à l'autre de ces technologies de l'image, le spectacle auquel l'on assiste devient tristement brouillon. On finit par ne plus savoir qui est en vue subjective. Ce qui paraît logique d'un point de vue strictement scénaristique l'est déjà nettement moins en qualité de réalisme.


On peut comprendre que notre bande de jeunes adultes soit sans cesse attirée par cette forêt où se déroulent d'inquiétants événements plutôt que de reprendre la route en sens inverse à bord de leur véhicule car alors, le récit serait conclu en seulement cinq minutes. Mais l'on peut également s'agacer devant la bêtise crasse de Matthew et de ses compagnons qui insistent pour se rapprocher du danger. Entre science-fiction et épouvante, The Gracefield Incident convie ses personnages à venir s'installer dans un fort joli chalet prêté par le boss un brin parano de Matthew. Les lieux sont effectivement truffés de caméras. Ce qui ajoute un surcroît important de matériel permettant d'assister à des événements se situant directement à l'intérieur de la demeure. Matthew, Joe, Julia, Jessica et les autres assistent le premier soir à la chute d'une météorite qu'ils s'empressent d'aller dénicher alors même que la nuit est tombée et que la vision y est drastiquement réduite. Le groupe met la main sur un objet de forme quasi oblongue dont le poids ne semble pas dépasser les quelques dizaines de grammes si l'on tient compte du fait qu'il paraît à l'écran être fabriqué dans du polystyrène ! D'une manière générale, les effets-spéciaux sont relativement piteux. Ce qu'excuse évidemment le budget étriqué. Une créature va dès lors s'en prendre à nos jeunes adultes qui demeureront malgré tout sur le site, allez savoir pourquoi ! Hurlements dans la nuit, apparitions inquiétantes d'une créature hostile qui semble ne pas appartenir à notre planète, évocation du fameux Bigfoot, dysfonctionnement des appareils électriques et symboles mystérieux constituent l'essentiel d'une œuvre franchement médiocre. Surtout, The Gracefield Incident arrive bien trop en retard. Dix-huit ans après Le projet Blair Witch de Daniel Myrick et Eduardo Sánchez et huit après le bousin d'Oren Peli intitulé Paranormal Activity. Et encore, ce n'est que si l'on n'énumère que ces deux exemples de Found Footage puisque en la matière, le septième art en a produit à la pelle depuis ces vingt dernières années. The Gracefield Incident fait malheureusement partie des plus mauvais d'entre tous. Jamais terrifiant, parfois monté à l'arrache (on passe subitement d'une scène nocturne tournée en plein forêt) à un Crop Circle formé dans un champ de maïs en plein jour. L'interprétation est dans la moyenne du genre. Ni désastreuse, ni mémorable. Bref, inutile de perdre son temps devant The Gracefield Incident...

 

lundi 16 octobre 2023

The Darkest Hour de Greg Gorak (2011) - ★★★★★☆☆☆☆☆

 


 

Bienvenue à Moscou. Sa Place Rouge, ses boites de nuits, ses jolies autochtones, ses patriotes, ses touristes et... ses extraterrestres ! Le voyage de Sean (Emile Hirsch) et Ben (Max Minghella) dans la capitale russe ne va pas être de tout repos. Mais avant d'affronter de belliqueuses créatures venues d'ailleurs prélever les ressources naturelles disponibles sur notre planète, les deux jeunes hommes vont profiter d'un moment de détente qu'ils ont bien mérité. Surtout que ces deux webmasters se sont fait piquer leur projet par des hommes d'affaire russes peu scrupuleux ! Un moindre mal si l'on compare cette escroquerie avec ce qui les attend plus tard dans la soirée. En effet, après avoir fait connaissance avec Anne (Rachael Taylor) et Natalie (Olivia Thirlby), deux touristes américaines qui avaient prévu de se rendre au Népal, le groupe formé autour de ces quatre personnages va rapidement devoir faire face à une invasion d'extraterrestres particulièrement hostiles. Des créatures invisibles dont la présence ne pourra être détectée qu'à travers les réseaux électriques de la ville. En voilà une idée qu'elle est bonne... mais qu'elle est rare également puisque s'agissant du déroulement du récit l'on est face à un script reprenant les codes d'une foule de longs-métrages de science-fiction. Visuellement, The Darkest Hour pue littéralement le DTV. C'est donc très laid même si le tournage eu lieu en Russie. Bien que l'une et l'autre des affiches officielles du film soient plutôt attrayantes, celles-ci ne sont malheureusement pas très représentatives du contenu. Quoique... Ces filaments et ces colonnes de feu qui sortent de terre sont bien présents à l'image. Dans sa vie de réalisateur, Chris Gorak n'a mis en scène que deux longs-métrages. Los Angeles : Alerte maximum en 2006 et donc, The Darkest Hour cinq ans plus tard. À l'origine directeur artistique, il a travaillé sur de prestigieuses productions telles que Las Vegas Parano de Terry Gilliam, Fight Club de David Fincher, The Barber des frères Coen ainsi que Minority Report de Steven Spielberg.


Il se lancera donc dans la réalisation quatre ans après ce dernier avant de cesser toute activité dans le cinéma en 2012 jusqu'à son retour en 2019 avec le court-métrage de Henry Hobson, Ford : New Breed interprété par Idris Elba. Un beau pedigree pour un artiste qui derrière la caméra ne sera pas en mesure d'égaler ceux pour lesquels il travailla précédemment. Doté d'un budget que l'on devine serré, The Darkest Hour repose sur un scénario de Jon Spaihts inspiré d'une histoire qu'il a écrite en commun avec Leslie Bohem et M.T.Ahern. L'essentiel du long-métrage est constitué de courses-poursuites engagées dans les rues d'une ville saccagée. Créés par une très impressionnante armada de concepteurs en effets visuels, les effets-spéciaux ne sont fort heureusement pas tous de mauvaise facture. L’annihilation de l'espèce humaine façon La guerre des mondes de Steven Spielberg est plutôt convaincante même si la comparaison s'arrête là et les quelques destructions d'immeubles sont, ma foi, plutôt crédibles. En contrepartie, les effets de fumée sont totalement ratés au même titre que la vision thermique des extraterrestres dont le visuel n'est même pas digne des images de synthèse des années quatre-vingt ! The Darkest Hour prône l'héroïsme de ses héros américains collaborant avec les autochtones russes. Le film de Chris Gorak ne sort très clairement pas du lot sans cesse grandissant de l'invasion extraterrestre sur grand écran. Pourtant, le réalisateur insuffle à son œuvre suffisamment d'énergie pour que l'on n'ait pas vraiment le temps de nous ennuyer. Bref, à défaut d'avoir mieux à se mettre sous la dent, The Darkest Hour permettra au pire de patienter jusqu'à ce que parvienne jusque dans nos salles de cinéma le prochain film de science-fiction capable de renouveler le genre...

 

mardi 26 septembre 2023

Bigbug de Jean-Pierre Jeunet (2022) - ★★★★★☆☆☆☆☆

 



Entre la conception du tout premier robot ménager conçu en 1963 par Pierre Verdun et la révolte des machines vue à travers de nombreux longs-métrages de (science)fiction, leur évolution aura été de courte durée. En un demi-siècle à peine, celles-ci seront passées du robot-multifonctions au modèle le plus puissant de terminator nommé le Rev-9 quand notre espèce aura mis, elle, plus de cinq-cent trente millions d'années pour passer de l'état de Saccorhytus coronarius à celui d'Homo sapiens sapiens. Après des décennies d'esclavage au service des desiderata de son créateur et autant de temps pour voir sa descendance bénéficier d'innombrables améliorations, le robot est semble-t-il devenu capable d'une réflexion propre à vouloir s'affranchir de ses maîtres et ainsi devenir autonome. C'est un peu l'idée qui émerge de BigBug, le dernier long-métrage de Jean-Pierre Jeunet qui signe à l'occasion de son retour non pas sur grand écran mais sur la plateforme de streaming Netflix, un script qui évoque étonnamment le futur confinement auquel le peuple français sera contraint d'accepter de suivre les règles les prochaines années. Alors que la pandémie de Covid-19 montre ses premiers signes à Wuhan, capitale de la province de Hubei située en Chine centrale, au mois de novembres 2019, à plus de huit milles kilomètres mais à quelques jours de différence seulement, chez nous, Jean-Pierre Jeunet peut compter sur le soutien de David Kosse, le vice-président de la division cinéma internationale de Netflix et sur les sociétés de production Eskwad et Gaumont. Bien que les dates entre le début de la pandémie et les origines du script de Jean-Pierre Jeunet et de Guillaume Laurant paraissent coïncider, certaines similitudes entre le Covid-19 et Bigbug ne sont que le fruit du hasard.


La volonté première du réalisateur et scénariste étant avant tout de concevoir un récit autour de l'intelligence artificielle. Que les personnages se retrouvent enfermés dans l'appartement de l'une des héroïnes incarnée par Elsa Zylberstein découle à vrai dire d'une révolte organisée par les Yonix, des androïdes qui depuis leur dernière mise à jour sont persuadés de leur supériorité sur l'espèce humaine et sont convaincus de devoir lui survivre. Jean-Pierre Jeunet n'a pas perdu son goût immodéré pour les décors foisonnants, la photographie ou les effets visuels de toute beauté. C'est ainsi que l'on retrouve pour les premiers, la fidèle chef décoratrice Aline Bonetto qui à de nombreuses reprises travailla sur les anciens projets du réalisateur et de son ancien collaborateur, Marc Caro. La rencontre entre le directeur de la photographie Thomas Hardmeier et Jean-Pierre Jeunet ne se fera quant à elle que sept ans avant le tournage de Bigbug sur celui de L'extravagant voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet que réalisera Jean-Pierre Jeunet en 2013. Entre le remarquable design de Delicatessen et celui de Bigbug, trente années ont passé. Et si beaucoup d'eau est passée sous les ponts, si en matière d'effets-spéciaux le cinéma a fait un bon de géant, il sera tout à fait acceptable de continuer à préférer ceux de 1991 plutôt que ceux de 2022. Le travail méticuleux d'alors est désormais remplacé par une multitude d'effets visuels créés en images numériques certes délirants mais auxquels il manque pourtant une certaine chaleur. Conviés à participer à l'aventure auprès d'Elsa Zylberstein, on s'attendait sans doute peu à découvrir Isabelle Nanty, Stéphane De Groodt ou Youssef Hajdi dans une œuvre de science-fiction mais s'agissant également d'une comédie, tout rentre finalement dans l'ordre.


Quoique, s'agissant de l'humour, BigBug a les jointures qui grincent comme une vieille pièce de théâtre qui aurait bien mal vieilli. Autant Jean-Pierre Jeunet continue d'être un remarquable esthète, autant son dernier film est d'un point de vue humoristique complètement plombé par des dialogues souvent insipides et généralement peu satisfaisants en matière de comique. Enfermé avec les personnages dans une demeure esthétiquement proche d'un rayon informatique ou littéraire de la chaîne de magasins FNAC, le spectateur s'ennuiera aussi sûrement qu'un pré-adolescent invité à une soirée entre adultes. Le seul moyen, au fond, de tenir jusqu'au terme des cent onze minutes que dure Bigbug sera d'essayer de noter tous les petits détails qui donnent vie à cet univers cherchant visiblement, et de manière plus ou moins maladroite, à reproduire l'esprit ''Amérique des années soixante' ! La question qui se pose est celle-ci : que faire d'une petite dizaine de personnages enfermés durant plusieurs jours et plusieurs nuits dans une même demeure sans pouvoir les en extraire ? La réponse est : offrir au spectateur retenu en otage, des dialogues ciselés, une interprétation sans faille et des mises en situation surprenantes ! Concernant ces dernières, c'est chose faite. Si les dialogues ne sont pas du meilleur tonneau et si le surjeu des uns et des autres est évident, Bigbug contient malgré tout quelques situations qui permettent de retenir notre attention. Surtout lorsque intervient directement au cœur de l'action le Yonix modèle numéro 7359XAB2. Le ton change et donne un peu de corps à l'ensemble, ce qui permet d'aller jusqu'au bout du récit dans un certain confort. Aux côtés des interprètes déjà cités plus haut, on retrouve notamment Claire Chust dans le rôle de la potiche Jennifer, Claude Perron dans celui de l'androïde Monique tandis que les voix des Robots Einstein, Nestor ou Tom sont respectivement assurées par André Dussollier, Benoît Allemane et Corrine Martin. À noter qu'Albert Dupontel, Dominique Pinon et Nicolas Marié font une courte apparition à l'image...

 

mercredi 20 septembre 2023

The Lost Missile de William Berke et Lester William Berke (1958) - ★★★★★☆☆☆☆☆

 


 

Réalisateur et scénariste américain ultra productif durant les années quarante et cinquante, William Berke a œuvré pour le grand et le petit écran, totalisant en vingt-quatre ans de carrière près d'une centaines d'épisodes de séries télévisées et de longs-métrages cinématographiques. Il termine sa carrière en 1958 avec quatre films dont The Lost Missile sera le seul à reposer sur son propre script écrit en collaboration avec John McPartland et Jerome Bixby. Nanti d'un très faible budget comme le démontrent notamment les effets-spéciaux relativement rudimentaires, une grande partie des images repose sur des Stocks-Shots de l'armée américaine. La volonté du réalisateur étant de témoigner de l'importance d'une collaboration scientifico-militaire lors d'une éventuelle attaque étrangère. Dans le cas de The Lost Missile, et sans doute pour ne pas froisser la susceptibilité des nations étrangères, le missile du titre, lequel va être rapidement renommé en OVNI pour des raisons qui paraîtront évidentes dues à des origines inconnues, ne semble appartenir à aucune des nations de notre planète. Comme peuvent en témoigner d'ailleurs sa vélocité dépassant les six-mille cinq-cent kilomètres heure ainsi que sa force de destruction massive. Pour ces raisons, The Lost Missile entre donc bien dans certains des critères qui appartiennent à la science-fiction. D'une certaine manière, le long-métrage de William Berke fait figure de vitrine afin de faire la démonstration des capacités militaires de l'armée américaine. Et si dans la plupart des séquences l'on assiste à la faillite d'une flotte aérienne pourtant lourdement armée, l'engin connu sous le nom de Jupiter semble faire directement référence au missile supersonique à basse altitude que développait à l'époque l'US Air Force. Principalement interprété par Robert Loggia, acteur charismatique bien connu des amateurs de cinéma et de programmes télévisés, The Lost Missile n'a en réalité pas vraiment de héros.


Et même si un début de caractérisation est bâti autour de ce personnage et de celle qu'il envisageait d'épouser avant que l'étrange missile n'apparaisse sur les radars du monde entier, le long-métrage est surtout constitué d'une série de séquences aériennes montrant les dégâts causés par l'OVNI quand d'autres montrent l'impuissance de l'armée à faire face au danger. Tourné en noir et blanc, il est important de noter que le propre fils de William Berke a repris les rennes de cette histoire mêlant guerre et science-fiction. En effet, celui-ci étant décédé l'année même de la réalisation de The Lost Missile, c'est son fils Lester William Berke qui a conduit le projet jusqu'à son terme. Une carrière qui débute seulement quatre ans auparavant en tant qu'assistant-réalisateur, il est bon de noter que son nom, bien qu'il n'ait pas été crédité au générique, est lié au chef-d’œuvre d'Alfred Hitchcock, Psychose et que sa carrière perdurera jusqu'en 1997, se terminant avec le septième téléfilm qu'il tournera pour la série 200 dollars plus les frais ou, The Rockford Files: Shoot-Out at the Golden Pagoda. Concernant The Lost Missile, il ne faudra pas se montrer trop difficile. D'une durée n'excédant pas les soixante-dix minutes, le projet est dans la moyenne basse de ce qu'était en mesure de proposer à son public avide de science-fiction, le cinéma américain. Les scènes de destruction massive sont filmées avec les moyens (extrêmement rudimentaires) du bord. Le tout est en effet assez laid, même si l'on parvient à faire abstraction de l'âge et des faibles moyens financiers du film. The Lost Missile demeure surtout une curiosité pour qui voudrait découvrir Robert Loggia au temps de sa jeunesse. Pour le reste, le long-métrage de William Berke/Lester William Berke demeure insignifiant...

 

mardi 12 septembre 2023

Landscape with Invisible Hand de Cory Finley (2023) - ★★★★★★★★☆☆

 


 

Cory Finley peut remercier toutes celles et ceux qui avant lui ont conçu des œuvres de science-fiction dystopiques renvoyant généralement à des univers déshumanisés. En contrepartie, celles et ceux qui auront la chance de découvrir son dernier long-métrage intitulé Landscape with Invisible Hand pourront en retour le récompenser pour avoir su revigorer une thématique trop souvent employée pour demeurer innovante. Derrière ce titre mystérieux traduit chez nous sous celui de Paysage avec main invisible se cache effectivement une œuvre brillante inversant certaines valeurs propres au genre. Il ne s'agit donc plus d'évoquer un monde où les émotions doivent être abolies mais bien un univers où les exprimer demeure une question de survie. Ce que semblent avoir parfaitement compris les deux jeunes héros de ce récit prénommés Chloe (Kylie Rogers) et Adam Asante Blackk). Si la bande-annonce rend tout d'abord frileux, cette probable indifférence vient sans doute de la présence à l'image d'une race extraterrestre que l'on imagine mieux faire partie d'un film d'animation que d'un long-métrage réalisé avec d'authentiques interprètes. Si d'emblée l'apparence de ces créatures semble créer un fossé avec le sérieux du propos, les spectateurs seront très rapidement rassurés en réalisant qu'ils sont tout d'abord davantage évoqués que révélés à l'image. Alors que dans la plupart des dystopies de ce type les émotions sont annihilées, le fait est que dans Landscape with Invisible Hand, l'absence totale d'émotion chez ces extraterrestres connus sous le nom de Vuvv ainsi que leur méthode de reproduction asexuée est une mine d'or sur laquelle vont se projeter Chloe et Adam afin de subvenir aux besoins de leurs familles respectives. Deux familles qui vivent sous le même toit, la première ayant été accueillie par la seconde. Landscape with Invisible Hand reprend le concept de Elysium de Neil Blomkamp dans lequel les riches vivent au dessus de nos têtes dans des stations spatiales qui leurs sont strictement réservées tandis que le reste de la population survit à la surface de notre planète. Dans un cas comme dans l'autre, l'un des parents est absent. Si les Marsh sont tout d'abord généreusement accueillis dans la cave des Campbell, les problèmes de cohabitation vont très rapidement faire surface. Contrariant ainsi l'idée suscitée par nos deux adolescents de créer un podcast traitant des sentiments amoureux à l'attention des Vuvv...


De quoi enrichir le quotidien de nos deux familles puisque plus le nombre de Vuvv croît parmi les abonnés et plus Chloe et Adam accumulent de l'argent. Mais l'on ne trompe pas une race dont l'intelligence est infiniment supérieure à celle des humains. Car alors que de réels sentiments naissent au départ entre les deux adolescents, les disputent répétées entre leurs parents respectifs vont abîmer leur amour l'un pour l'autre. Chloe et Adam vont ainsi faire croire qu'ils s'aiment toujours jusqu'à ce que le parent d'un Vuvv réalise qu'ils font semblant... Tout d'abord, nous passerons sur l'apparence absolument ridicule des créatures extraterrestres qui semblent être tirées d'un banal film d'animation en images de synthèse. Ôtée leur étrange physionomie, Landscape with Invisible Hand fourmille d'idées originales beaucoup trop nombreuses à énumérer et qui à elles seules constituent le socle du récit. Si sur cette Terre futuriste (l'action se déroule dans les années 2030) cette vision de notre planète dont les règles sont désormais régies par des êtres venus d'ailleurs peut paraître relativement commune, il demeure des éléments qui constituent une véritable plus value qui renforce l'intérêt de l'histoire. Tout d'abord, l'invasion de notre planète par cette vision très enfantine d'une entité extraterrestre semble être moins traitée sous un angle coercitif que sous le concept de Soft power. Et pourtant, il est bien question ici de rééducation (de formatage culturel et intellectuel) et de mépris envers celles et ceux pour lesquels les Vuvv n'ont aucune espèce d'intérêt. Le réalisateur traite les ressources humaines sous un angle superfétatoire. Pour exemple, cet ancien neurochirurgien devenu chauffeur sur l'une des plate-formes aériennes qui gagne cinq fois son ancien salaire en est le parfait témoin. Sous ses allures de teen-movie, Landscape with Invisible Hand traite de sujets divers et variés qui nie à la monotonie un quelconque droit de présence à l'image. Parfois poétique et souvent étrange, le long-métrage de Cory Finley est passionnant de bout en bout. N'abusant pas des effets mais interrogeant ses protagonistes sur des questions sociales et existentielles, cette adaptation tirée du roman éponyme de MT Anderson est une réussite...

 

lundi 4 septembre 2023

Sans soleil (2021) - ★★★★★★★☆☆☆

 


 

Il existe sur le territoire français, des réalisateurs qui régulièrement s'essaient à la science-fiction post-apocalyptique depuis des décennies. Quitte à rabaisser le genre au niveau des œuvres transalpines signées dans le courant des années quatre-vingt par des réalisateurs italiens opportunistes. On pense bien évidemment tout d'abord au Terminus de Pierre-William Glenn dans lequel, en 1986 , Johnny Hallyday arborait une chevelure peroxydée dans ce sous-Mad Max cultissime MAIS nanardesque. Vingt-trois ans auparavant, Chris Marker s'était essayé avec La jetée à un exercice de style original sous forme de diaporama commenté par Jean Négroni. Une œuvre de vingt-huis minutes seulement, célébrée dans les cercles cinéphiles, qui inspira Terry Gilliam pour son superbe L'armée des douze singes en 1995. Luc Besson et Le dernier combat, Marc Caro et Jean-Pierre Jeunet et Delicatessen demeurent parmi ceux qui s'en sortirent plutôt bien. Beaucoup plus récemment, Cédric Ido, en signant La gravité, rendait hommage à l'esthétique très particulière des cités de la banlieue française ainsi qu'à leur faune. Et que penser de 2021, œuvre entièrement conçue et bricolée par le jeune Cyril Delachaux, tout en décors naturels, grosse sensation tournée il y a de cela cinq ans ? Bon, pour être tout à fait honnête, Sans soleil de Banu Akseki n'est pas une production purement française puisque sa réalisatrice est d'origine belge et que la plupart des interprètes le sont également. Tout juste croiseront nous durant un petit quart-d'heure l'actrice italienne Asia Argento. Nous parlerons donc d’œuvre francophone réalisée par une cinéaste talentueuse malgré une carrière qui ne compte pour le moment que deux courts, un moyen et un long-métrage. Sans soleil met tout d'abord en scène Asia Argento dans le rôle de Léa et Joe Decroisson dans celui de son film âgé de cinq ans, Joey. Deux être vivant en marge de la société qui survivent de petits larcins (la mère nourrit son fils directement aux étals des supermarchés). Un soir, tandis que Léa se drogue comme de nombreuses autres personnes afin d'atténuer le phénomène d'acouphène provoqué par de multiples éruptions solaires, son fils disparaît.


Le récit se place ensuite dix ans après. Joey a bien grandit et vit désormais au sein d'un couple aisé dont la femme, Emmanuelle (l'actrice Astrid Whettnall) est psychologue. Il étudie, est amoureux, mais se laisse distraire un soir par une inconnue qui porte le même blouson que sa mère disparue. Cette femme, qui elle aussi se drogue pour échapper aux douloureux symptômes qui comme nous le découvrons, n'ont pas cessé dix ans après la disparition de Léa, attire bien involontairement l'adolescent dans l'univers des laissés pour compte qui pour survivre, vivent sous terre dans des conditions déplorables. Attiré par cette femme qu'il ne connaît pas mais qui lui rappelle sa mère disparue, Joey va errer dans ce monde interlope. Nombre des spectateurs qui purent découvrir le premier long-métrage de la réalisatrice belge Banu Akseki semblent n'avoir pas apprécié Sans soleil et ce, pour plusieurs raisons. Pour son scénario qui, reconnaissons-le, est des plus sommaire, mais aussi et sans doute surtout pour son rythme lymphatique. Il faut reconnaître qu'en terme d'action, cette œuvre de science-fiction post-apocalyptico-catastrophique n'est pas d'une énergie débordante et que les errances de son principal protagoniste peuvent ennuyer à moyen ou long terme. Mais dès lors que l'on accepte le concept, Sans soleil s'avère une brillante réussite. Tout d'abord, le film bénéficie d'une très belle photographie nocturne qui couplée à la bande musicale de Wim Coryn génère un authentique sentiment anxiogène. L'apport de cette dernière est d'ailleurs très représentative des émotions qui traversent le récit puisque dès qu'elle disparaît, le cadre prend tout à coup une allure beaucoup plus ''rassurante''. Bénéficiant d'un budget et d'une écriture visiblement plus que réduits, la réalisatrice mise tout ou presque sur le visuel, l'acoustique et tout ce que cela génère d'émotions et de sensations. Il faut donc se laisser bercer par ce vagabondage en un temps dystopique relevant de faits plus ou moins authentiques puisqu'on le sait depuis longtemps, les éruptions solaires peuvent avoir notamment des effets sur les systèmes électriques et sur la santé mentale comme le démontrent certaines séquences. Sans soleil est donc une œuvre avant tout sensorielle et non sensationnelle ! Une très belle surprise qui laisse présager un futur prometteur pour sa réalisatrice Banu Akseki...

 

samedi 2 septembre 2023

Broken Darkness de Christopher-Lee dos Santos (2017) - ★★★★★★☆☆☆☆

 


 

Le dernier long-métrage à ce jour du réalisateur sud-africain Christopher-Lee dos Santos se divise en trois partie. La première, qui est aussi la plus courte, envisage le passage de notre planète à travers la queue d'un corps céleste provoquant à sa surface une pluie de météorites aux conséquences cataclysmiques puisque la quasi totalité de l'humanité sera décimée. Cette séquence qui ne dépasse pas une poignée de minutes offre à Broken Darkness une mise en bouche plutôt intéressante. Visuellement l'on s'éloigne des grosses productions américaines et l'on opte pour une approche plutôt réaliste de la catastrophe. À tel point que la vision de ces dizaines, de ces centaines de météorites qui illuminent le ciel nocturne donnent un aperçu terrifiant des conséquences sans pour autant que le film n'use d'effets-spéciaux à outrance. Cette entrée en la matière permet d'introduire le personnage de Sam, incarné par l'acteur Sean Cameron Michael et protagoniste principal de ce récit basé sur un script écrit de la main même du réalisateur. Un individu peu loquace, comme la plupart des personnages qui évoluent d'ailleurs au sein de ce récit post-apocalyptique prenant comme principal terrain de jeu, un réseau de galeries souterraines et de stations où survivent quelques dizaines ou centaines d'individus chargés de maintenir le bon fonctionnement de cette ancienne centrale hydraulique permettant en outre (et huit ans après la catastrophe) de cultiver de la nourriture. Lorsque les employés de la station Kentucky perdent tout contact avec ceux de la station Winnipeg, le responsable informe à Sam qu'il va devoir se rendre sur place afin de découvrir pourquoi ce silence. Contraint par son ami Troy (Brandon Auret) d'accepter de le prendre avec lui, les deux hommes vont être de surcroît suivis par la jeune et inexpérimentée Rose (Suraya Rose Santos). Une fois arrivés à la station Winnipeg, ils vont tomber tous les trois sur un petit groupe de soldats armés qui vont les conduire là où ils sont censés se rendre. Cette seconde partie possède un petit goût d'Aliens de James Cameron que le spectateur retrouve à plusieurs occasions. Si le long-métrage de Christopher-Lee dos Santos repose sur un concept qui semble être tout droit sorti de son imagination, il demeure difficile d'imaginer qu'une partie du script m'ait pas été influencé par le classique de la science-fiction sorti plus de trente ans en arrière.


Filmé dans une obscurité presque totale, cette seconde partie possède quelques qualités plutôt attractives mais souffre aussi de défauts rédhibitoires. L'ambiance est lourde, chargée, étouffante et lugubre. Des décors sombres et un climat délétère permanent. Un contexte parfaitement irrespirable qui ne va pas s'arranger puisque en cours de route, nos protagonistes devront faire face à des créatures de type ''infectés''. Rien de bien original si ce n'est que ceux du réalisateur sud-africain semblent sortir tout droit d'un vieux Lucio Fulci (des corps décharnés recouverts de haillons) mais dotés, eux, d'une grande vélocité. De ce point de vue là, Broken Darkness prend des allures de nanar ! Lorsque se termine cette seconde partie, un peu plus d'une heure s'est écoulée et, faut-il le reconnaître, l'expérience fut en partie ennuyeuse en raison d'un rythme relativement soporifique. On l'imagine bien évidemment et pourtant : Lorsque la troisième partie débute et que la lumière éclatante du soleil vient enfin caresser le visage de Rose et de Sam qui viennent tout juste d'échapper au chaos qui s'est produit dans les sous-sols de la mine, l'intrigue est relancée. L'on découvre alors que les dangers, à l'extérieur, y sont démultipliés. Christopher-Lee dos Santos exploite les ressources mises à sa disposition. Des décors naturellement désaffectés. Gare de triage et vieilles usines abandonnées, la visite est rudimentaire mais permet de changer d'environnement. Si l'on pouvait douter un peu plus tôt des sources d'inspiration du réalisateur, cette fois-ci, le rapport entre certaines rencontres qui vont se dérouler lors de cette dernière partie et la série télévisée The Walking Dead est indiscutable. Broken Darkness brasse donc les genres, débutant comme une œuvre de science-fiction et de catastrophe en passant par le film post-apocalyptique et en se terminant en film d'horreur, cumulant décors de désolation, zombies/infectés et anthropophagie ! Bref, le long-métrage de Christopher-Lee dos Santos est ambitieux tout en étant peu inspiré tant il emprunte à d'autres la quasi totalité des thèmes qu'il aborde. Sympathique, sans plus...

 

dimanche 20 août 2023

La gravité de Cédric Ido (2023) - ★★★★★★★☆☆☆

 



La frontière qui sépare film catastrophe et film catastrophique est parfois bien mince. Alors, lorsqu'un réalisateur, de surcroît d'origine française, ose un tel brassage des genres, la méfiance est généralement prescrite. Concernant La gravité de Cédric Ido, l’œuvre penche plutôt du bon côté et surpasse même les espérances en traitant des trafiquants d'une cité de la banlieue parisienne et d'un alignement des planètes qui risque d'avoir de fortes répercussions climatiques sur notre planète. Le réalisateur parisien s'attaque à un sujet sinon délicat, du moins complexe à mettre en scène s'il ne veut pas tomber dans le ridicule. Imaginez donc : une œuvre de science-fiction matinée de drame social et d'action. Treize ans plus tôt, Yannick Dahan et Benjamin Rocher avaient quant à eux mis en scène des flics et des malfrats confrontés à des zombies dans La horde ! Preuve que le terrain de chasse des dealers peut-être également celui d'événements très particuliers comme celui qui semble hanter un groupe d'adolescents autoproclamés ''Ronins'' (ou samouraïs sans maître) depuis des années. C'est donc dans une cité que va se dérouler l'intrigue reposant sur un script écrit par Cédric Ido lui-même et en collaboration avec Jeanne Aptekman et Melisa Godet. La gravité figure une forme de ''Blaxploitation'' des temps modernes ET... à la française. Non pas que l'homme blanc y soit bannit puisque parmi les interprètes, le public reconnaîtra les acteurs Olivier Rosemberg et Thierry Godard, mais une grande majorité des participants au long-métrage ont la peau d'ébène. Quant aux deux seuls ''visages pâles'' du film, ils s'agit de chair plus ou moins fraîche (le premier incarne Jovic, un clochard qui survit uniquement grâce à sa mère tandis que le second est le coach de l'un des héros du récit). Ceux qui recherchent en priorité l'action devront patienter jusqu'au dernier quart du film car d'ici là, Cédric Ido se concentrera sur l'exploration d'une cité tandis que le public pourra admirer la superbe photographie de David Ungaro et l'architecture anxiogène des lieux.


Du béton, des immeubles, pas un brin d'herbe mais des jeunes, que des jeunes, pas un adulte ou presque pour veiller sur eux ou leur ordonner de rentrer lorsque la nuit est tombée. Une tour, ses caves, ses appartements et sa bande de jeunes aux cheveux teints en rouge, signe de ralliement d'un groupe de dealers pas tout à fait comme ceux qu'ont l'habitude de reléguer les médias. Les (anti-)héros du récit se prénomment Daniel, Joshua et Christophe. Les deux premiers sont frères et ont choisi de s'en sortir chacun à leur manière. Le troisième, lui, vient de sortir de prison et est bien décidé à reprendre le contrôle du marché de la drogue du quartier. Malheureusement pour lui, les choses ont depuis bien changées. Un synopsis somme toute relativement banal dont l'intérêt serait moindre si le réalisateur s'était désintéressé de tout ou partie des aspects techniques qui accompagnent son œuvre. Nous évoquions plus haut la photographie de David Ungaro, à laquelle nous pourrions également ajouter la bande originale des frères Evgueni et Sacha Galperine qui composent à cette occasion une partition sous tension. Une tension qui d'ailleurs ne cessera de grandir à mesure que le ciel s'assombrit et devient rouge, révélant ainsi les réelles intentions des ''Ronins''. Comparés à ce que produit le cinéma asiatique et notamment la Corée du Sud, les quelques combats qui interviennent vers la fin du long-métrage n'étonneront ni ne séduiront les fans d'action. Chorégraphie de moyenne facture, on pense parfois de très, très, très loin à Old Boy de Park Chan-Wook ou à The Raid de Gareth Evans mais sans le génie de l'un (le plan-séquence du tunnel) et la maîtrise des ''ballets au corps à corps'' du second. Si sur le papier le projet semble improbable, voire casse-gueule, le résultat à l'écran fait son petit effet. L'ambiance de fin du monde, les différentes confrontations, l'univers et ce final apocalyptique (démontrant malheureusement que les CGI ne sont pas le fort des techniciens en matière d'effets-spéciaux numériques) finissent de confirmer que l'on tient là une vraie bonne alternative au cinéma américain. Une œuvre très encourageante pour la suite...

 

lundi 14 août 2023

Missions de Julien Lacombe (2017-2021) - ★★★☆☆☆☆☆☆☆

 


 

Bouh, pas beau, caca... quelques exemples de termes enfantins qui m'empêchent de m'enflammer, de vomir, de régurgiter tout le dégoût que j'ai pour cette série qui m'a volé quelques jours de mon existence. Bref, d'écrire réellement ce que je ressens. Rien ni personne ne m'a forcé à aller jusqu'au bout, c'est vrai. La promesse d'une apothéose finale ? D'une troisième saison ambitieuse ? Certes, mais dont j'espérais tout de même qu'elle m'offrit à minima, quelques explications concernant la trop grande quantité d'informations qu'il me fallut avaler durant les deux premières. Vingt épisodes d'un peu moins d'une demi-heure chacun. Bref, pas de quoi réellement estimer que l'on m'a volé d'innombrables heures de ma vie, mais tout de même... Car la promesse d'une conclusion en forme de bouquet final grandiose ben... je l'attends toujours. C'est bien beau de prendre Les trois lois de la robotique de l'écrivain américain Isaac Asimov comme référence. Mais pour en faire quoi ? Prétendre que les faiblesses de l'homme l'ont poussé à sa propre perte ? Et que la seule manière de le sauver est de le détruire ? La série Missions, réalisée par Julien Lacombe et que ce dernier a créé aux côtés de Ami Cohen et Henri Debeurme, est d'une ambition démesurée. Les trois hommes en sont donc les créateurs mais également les scénaristes. Qu'ils s'y soient mis à trois pour pondre cette histoire hautement farfelue se voit comme une verrue au milieu d'un tarin ! L'histoire débute de manière relativement classique et donc, authentiquement sobre : une mission est envoyée sur Mars sur l'impulsion du milliardaire suisse William Meyer qu'incarne le français Mathias Mlekuz. Un équipage formé de trois femmes et cinq hommes et dont le commandant Martin Najac perd la vie au moment où leur navette s'apprête à pénétrer l'atmosphère martienne. Alors que cette dernière atterri dans des conditions plus que précaires, la priorité pour le reste de l'équipage est de trouver un moyen de survivre sur une planète hostile. Pas de pot ! Les américains ont devancé nos compatriotes. Mais ça n'est pas là le plus important : en effet, en parcourant le sol de la planète rouge, William Meyer, le commandant en second Simon Gramat (Clément Aubert), la psychologue Jeanne Renoir (Hélène Viviès) et les autres membres de Ulysse 1 vont très rapidement être au centre d'événements dont l'imbrication donnera malheureusement des maux de têtes même aux plus fervents admirateurs de Hard Science-Fiction.


Après un début de troisième saison très prometteur, Missions retombe définitivement dans ses travers...


Et ça n'est pas là que de vanter les qualités de la série mais plutôt de lister ses défauts d'écriture qui débouchent sur une œuvre dont la matière première demeure pratiquement indéchiffrable jusqu'au terme des trois saisons. De la science-fiction qui sous l'impulsion de ses auteurs se mue peu à peu en un improbable conglomérat parfaitement indigeste de sous-genres, passant par la case Heroïc Fantasy moyenâgeux, le fantastique, le thriller et même, disons-le, la comédie, tant certaines actions (et même beaucoup d'entre elles) prêtent à rire ! Passons sur le cortèges d'invraisemblances que noteront ceux qui ont le soucis du réalisme jusque dans le moindre détail. Et je n'évoque pas là les effets-spéciaux qui, du moins lors des deux premières saisons, ont au moins dix ans de retard sur la concurrence. À trop vouloir apporter de l'eau au moulin d'une œuvre déjà par trop complexe, les trois scénaristes se mordent la queue et proposent un gloubi-boulga qui ferait vomir même ceux qui ont déjà goûté et se sont délectés de la fameuse recette du plus célèbre dinosaure du petit écran. Du grand n'importe quoi, mélangeant les genres au mépris de toute crédibilité, Missions n'est très clairement pas réservé à celles et ceux qui se soucient du vérisme en matière de S-F ! Pompant aux passages quelques idées au Prometheus de Ridley Scott (Le milliardaire à l'origine du projet. Dans le cas de Missions, l'immense dôme est remplacé par une sorte de... pyramide s'enfonçant à l'intérieur d'une montagne et dans un cas comme dans l'autre, l'air y est tout à fait respirable). Homme-Mars (puis, femme-trou noir, mouarf !), voyage dans le temps, paradoxes temporels, multivers, portails menant vers une autre dimension, femme aux pouvoirs extraordinaires (Jeanne, la psychologue) façon X-Men (merci à ma compagne qui évoqua l'idée), etc, etc, etc... Plus les auteurs en rajoutent et plus le (ou les) sujet de Missions devient inextricable. Certains meurent, reviennent sous les traits de leur double. On y parle génétique, d'un troisième brin d'ADN qui formerait une espèce bien supérieure à l'homme. Des ''Robots'', laissez-moi rire ! Depuis quand un robot est-il la définition d'un être entièrement organique ? La troisième saison s'envisageant comme une forme de triomphe absolu pour la série de science-fiction française la plus ambitieuse, la bande musicale évolue vers plus d'orchestration et l'image passe au cinémascope ! Des froufrous qui n'empêcheront malheureusement pas la série d'être l'une des propositions françaises en matière de science-fiction les plus indigestes qui soient !

 

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