mardi 23 avril 2024

Extra Sangsues ou Night of the Creeps de Fred Dekker (1986) - ★★★★★★☆☆☆☆

 


 

Le récit de Extra Sangsues ou Night of the Creeps retitré chez nous La nuit des sangsues débute en 1959 lorsque une capsule est expulsée d'un vaisseau spatial par un extraterrestre malintentionné en direction de notre planète. Au même moment, un jeune couple d'amoureux aperçoit l'objet s'écraser au sol. Tandis que l'homme prend la décision d'aller voir de quoi il s'agit, sa petite amie est tuée par un déséquilibré malgré l'alerte lancée sur les ondes radio. Arrivé à l'endroit précis où la capsule s'est écrasée, son compagnon est attaqué par une sangsue qui le pénètre par sa bouche... Vingt-sept ans passent et en 1986, le jeune Chris Romero (Jason Lively) et son meilleur ami J.C. (Steve Marshall) espèrent incorporer la fraternité Beta Epsilon que dirige l'un des étudiants les plus populaires de leur université. Pour cela, les deux garçons vont devoir prouver leur courage en volant un cadavre dans la morgue d'un laboratoire scientifique et en le déposant devant le bâtiment d'une fraternité rivale, la Phi Omega Gamma. Une fois à l'intérieur du complexe, Chris Romero et J.C. pénètrent une salle protégée par un code d'accès à l'intérieur de laquelle se trouve un corps cryogénisé qu'ils ont le malheur de libérer. Le corps en question est celui de l'homme qui vingt-sept ans auparavant fut attaqué par la sangsue. En le libérant, les deux étudiants vont provoquer une série de drames au sein même de l'université et de ses alentours. Épris de la jolie Cynthia Cronenberg (l'actrice Jill Whitlow), Chris va non seulement tenter de l'approcher mais également devoir combattre d'anciens camarades transformés en zombies et disséminant des dizaines de sangsues. Pour cela, il devra compter sur l'aide du Détective Ray Cameron (l'acteur Tom Atkins), flic qui il y a presque trente ans avait bien connu la jeune femme qui fut massacrée par le malade mental...


Écrit et réalisé par Fred Dekker, Extra Sangsues marque tout d'abord la passion de son auteur pour le cinéma fantastique à travers le nom des principaux protagonistes. Chris Romero, Cynthia Cronenberg ou Ray Cameron (et d'autres encore) renvoient donc logiquement à trois des plus grands réalisateurs dans le domaine puisque l'on peut y voir un hommage à George Romero, à David Cronenberg ainsi qu'à James Cameron. Concernant le second, celui-ci s'était déjà bien avant Fred Dekker penché sur une intrigue plus ou moins similaire à travers son troisième long-métrage Shivers dans lequel les habitants d'un complexe urbain étaient atteints par un mal étrange causé par la présence d'un parasite. Fred Dekker abandonne avec Extra Sangsues le concept d'expérience scientifique et médicale pour s'intéresser à une invasion extraterrestre de type Body Snatchers. Le réalisateur et scénariste place au centre de son tout premier long-métrage l'acteur Tom Atkins qui dans le domaine de l'horreur, de la science-fiction et du fantastique s'est fait un nom en apparaissant notamment chez John Carpenter avec Fog en 1981 et New York 1997 l'année suivante, chez George Romero avec Creepshow en 1982 ou encore chez William Lustig avec Maniac Cop en 1988. Dans le film de Fred Dekker, celui-ci incarne un flic alcoolique au comportement ambigu. Doté d'un budget de cinq millions de dollars, Extra Sangsues rend tout d'abord hommage au cinéma de science-fiction des années cinquante avant d'entrer de plain-pied dans les années quatre-vingt. Futur auteur de Robocop 3 (seconde séquelle du classique de la science-fiction signée par Paul Verhoeven), Fred Dekker signe un Teen-Movie mêlant science-fiction et horreur en convoquant des extraterrestres en forme de sangsues, lesquels vont très rapidement prendre possession de leurs victimes et apparaître à l'image sous la forme de zombies se déplaçant avec lenteur. Dans sa première partie, Extra Sangsues s'avère plutôt bavard et donc particulièrement mou. Fort heureusement, le rythme s'accélère par la suite. Concernant le département des effets-spéciaux, Howard Berger et l'équipe en charge des explosions de têtes et autres créatures luisantes s'en sortent plutôt bien au vu du maigre budget. Au final, le premier long-métrage de Fred Dekker n'est certes pas un chef-d’œuvre mais il peut encore aujourd'hui compter sur l'engouement de ses fans qui le considèrent comme un film culte...

 

mardi 16 avril 2024

Breathe de Stefon Bristol (2024) - ★★☆☆☆☆☆☆☆☆

 


 

Définitivement non... Breathe est le second long-métrage du réalisateur afro-américain Stefon Bristol après le très moyen See You Yesterday il y a cinq ans. Si je précise ses origines, c'est parce que le bonhomme, plus que le simple film de science-fiction que paraît être Breathe, intègre au récit un insidieux message Woke qui termine de convaincre que le film est tout sauf une bonne surprise. Déjà parce que le scénario ne fait preuve d'aucune espèce d'imagination. Il y a dix ans déjà, le réalisateur et scénariste américain Christian Cantamessa avait déjà évoqué le thème apocalyptique d'une planète Terre où l'air était déjà devenu irrespirable. Les mauvaises langues diront que dans le cas de Breathe celui-ci est carrément devenu absent de la surface de notre planète mais dans le fond, cette légère différence ne change pas grand chose. Stefon Bristol a bien raison de mettre en scène dans les deux principaux rôles deux interprètes qui comme lui sont d'origine afro-américaine. Mais sans doute aurions-nous apprécié davantage qu'il n'accentue pas outre mesure ce choix en invoquant les arts de la musique et de la littérature par le seul prisme d'artistes eux aussi de couleur. D'autant plus que lorsque intervient l'homme blanc dans la globalité que revét le terme, celui-ci fait figure d'antagoniste. Avec sa chevelure longue, crasseuse et son attitude plutôt inquiétante, le personnage de Lucas qu'incarne Sam Worthington est à l'exacte opposé du rôle qu'il interpréta notamment dans les deux premiers volets de la franchise Avatar de James Cameron. De héros, le voilà qu'il passe du côté obscure en interprétant l'agresseur. Mais il n'est pas le seul puisqu'à ses côtés l'on retrouve Milla Jovovich dont les faits d'arme ont tendance à inquiéter d'emblée quant aux éventuelles qualités de ce produit moulé pour les plates-formes de streaming.


Si l'on apprécie durant un temps l'attitude protectrice mais néanmoins très autoritaire de la mère de Zora (Quvenzhané Wallis) incarnée par Jennifer Hudson (qui joue donc le rôle de Maya), à moyen terme les valeurs s'inversent face au comportement de cette gamine qui malgré l'époque futuriste (la toute fin des années 2030) ne se distingue absolument pas des adolescentes de son âge qui vivent en 2024 si ce n'est sa propension à donner une image réductrice des adultes. Il est clair que si l'on s'en tient au discours de Stefon Bristol, rien n'aura vraiment changé à part le paysage puisque dans le monde qu'il décrit, plus aucune plante ne pousse à l'extérieur et que l'absence totale d'oxygène contraint hommes, femmes et enfants de vivre reclus dans des espaces confinés et aménagés où sont installés des générateurs d'oxygène ! En dehors d'un ou deux plans larges nous montrant un New-York en ruines, l'essentiel des effets-spéciaux se concentre à l'intérieur du bunker où se déroule l'intrigue. Un lieu construit par Darius, l'époux de Maya, qui au décès de son père part enterrer son corps à côté de celui de sa mère.... à l'astronomique distance de trois kilomètres. Ce qui inquiète son épouse, bien entendu. On peut douter du bien fondé concernant le bunker et ses installations bâties des seules mains de cet ingénieur assez fou pour sortir avec sur le dos le cadavre de son père, dans un monde sans doute hostile (la suite nous le prouvera) et sans oxygène. Pour le reste, Stefon Bristol tente vainement de nous convaincre avec son monde en totale déroute baigné d'une lumière en sépia perpétuelle d'un goût plutôt douteux. Le réalisateur et son scénariste éludent un point essentiel consistant à expliquer les raisons pour lesquelles le monde et notre civilisation sont tombés dans un tel chaos. Stefon Bristol a beau intégrer quelques séquences d'action, l'ennui s'installe pourtant relativement vite. On ne se passionne guère pour cette petite partie de l'humanité ayant survécu à une catastrophe et où chacun tente de trouver sa place. La caractérisation étant simplement survolée, on ne se passionne pas davantage pour le couple mère-fille ou pour ceux qui viennent s'emparer des lieux. Bref, Breathe n'est que l'une des nombreuses tentatives de science-fiction post-apocalyptiques ratées qui polluent le genre...

 

dimanche 18 février 2024

Animalia de Sofia Alaoui (2023) - ★★★★★★★★★☆

 


 

Il y a des cinéastes nés. Après seulement un long-métrage à son actif, la réalisatrice et scénariste franco-marocaine Sofia Alaoui semble avoir mis une bonne partie de la presse spécialisée d'accord. Sorti sur les écrans l'an passé le 9 août 2023, Animalia fait partie de ces œuvres rares qui ne peuvent laisser indifférent. Du moins lui accorderons-nous une certaine exigence. Il se peut même qu'une seconde projection, voire une troisième, soient nécessaire pour saisir toute la portée philosophico-religieuse de ce récit qui parle de Dieu, des hommes et théoriquement d'individus qui proviendraient d'ailleurs. C'est du moins ainsi que je saisissais le message une fois l'histoire achevée. Porté par la formidable et délicieuse Oumaima Barid qui avant cela interpréta le rôle de Fatima dans La vie me va bien d'Al Hadi Ulad-Mohand il y a trois ans, Animalia est une espèce d’énigme dans le fond et dans la forme. En filmant d'abord l'intérieur d'une riche famille marocaine et en poursuivant l'aventure au cœur de paysages d'une sidérante beauté, le long-métrage évoque ce que l'homme bâtit de ses propres mains face la création de Dieu. L'un et l'autre se rejoignent et fondent un univers d'une majestueuse beauté à laquelle le film de Sofia Alaoui ajoute un talent indéniable pour le cadrage, les éclairages et les environnements. La photographie de Noé Bach met en lumière un Maroc aux richesses multiples. Un pays qui tout comme à l'échelle de notre planète est en proie à un événement extraordinaire. Plutôt que de traiter le récit sous l'angle exclusif d'une hypothétique fin du monde annoncée où les peuples sont concentrés dans des lieux sécurisés par l'armée, dans le cas de Animalia, les croyances de tout un peuple sont reléguées par les médias et les Mosquées deviennent ainsi les seuls lieux de refuge aptes à protéger la population. Notons également la présence de quelques animaux qui dans le Coran sont cités non pas en tant que catégories mais en tant qu'espèces et même plus à proprement parler, en tant qu'individus.


C'est ainsi que sont représentés à l'écran la fourmi, la huppe ou diverses catégories de chiens. Certains s'agitent telle l'annonce d'un événement d'ampleur cataclysmique quand d'autres apparaissent comme une forme d'alerte entrant directement en contact avec certains habitants de la région. Au cœur de ce récit où se mêlent drame et science-fiction, Itto (Oumaïma Barid) illumine le récit. La fragilité de son personnage liée à la naissance toute prochaine de l'enfant qu'elle porte souligne le danger auquel elle va être confrontée. Cet univers majoritairement masculin, soupçonneux, où le statut de la femme demeure précaire quelle que soit la situation, même dans ce lieu de culte où rejoindre son époux se transforme en périple. Cultivant une certaine ambiguïté quant aux origines de celui qu'il est interdit de représenter, Sofia Alaoui ose décrire l'impensable en lui offrant une identité visuelle à travers ces entités qui semblent se cacher derrière cette brume fantastique qui s'élève dans le ciel et à laquelle notre héroïne finira par se raccrocher lors d'une séquence absolument bouleversante. Derrière la beauté des paysages, la dureté de certains regards, la folie qui s'empare de ce vieux fou persuadé que ses bêtes sont possédées, ces réunions nocturnes et canines, la vision déconcertante et vertigineuse qui guide l'héroïne mais aussi ces deux compagnons de routes qui accompagnent un temps la jeune femme, Animalia conditionne le spectateur et l'invite à un voyage inhabituel dans des espaces d'une remarquable beauté ou dans de minuscules bourgades anxiogènes où la place de la femme est ainsi décrite comme l'occidental l'imagine en général. Bref, avec son premier long-métrage qui en outre remporta le prix du jury au festival de Sundance, Sofia Alaoui nous terrasse, nous éblouie, nous subjugue. Quant à sa principale interprète, nous lui souhaitons une belle et longue carrière au cinéma...

 

samedi 10 février 2024

Les aventuriers de la quatrième dimension de Jonathan R. Betuel (1985) - ★★★★☆☆☆☆☆☆

 


 

Quand t'as quarante-cinq ans (Hein ? Ouais, bon, ça va. Cinquante-deux, si tu préfères, pffff) et la tête pleine de bons et joyeux souvenirs du cinéma fantastique des années quatre-vingt, presque quarante ans après sa sortie sur les écrans, Les aventuriers de la quatrième dimension a un petit goût de rev'nez y. Sauf que... Sauf que le temps a passé, que la technologie a évoluée et que certains longs-métrages, passée la barre des dix ou vingt ans, ont beaucoup souffert des progrès en matière d'effets-spéciaux. Sorti dans son pays d'origine sous le titre My Science Project, le premier des deux films qu'aura réalisé en tout et pour tout le cinéaste Jonathan R. Betuel durant sa carrière n'est pas forcément celui auquel on pense lorsque l'on se remémore ces années d'insouciance, à une époque où sortaient sur les écrans de cinéma de grands classiques de la science-fiction, tel l'un des plus iconiques du nom de Retour vers le futur de Robert Zemeckis. On pensera ici notamment au sympathique Explorers de Joe Dante qui sortira d'ailleurs la même année que le long-métrage de Jonathan R. Betuel. Concernant ce dernier, le film se démarque surtout par sa première partie relativement intéressante lors de laquelle tous les stigmates des comédies fantastiques d'alors sont scrupuleusement relevées. Ces universités sur les bancs desquelles les élèves même les moins assidus savaient encore se tenir contrairement à leur plus ressente descendance dont l'attitude se rapproche davantage des primates dont on part explorer les us et coutumes dans les zoos que celle d'adolescents parfaitement éduqués ! Au centre du récit, l'acteur John Stockwell qui dans le rôle de Michael Harlan campe une sorte d'alter ego au Fonzie de la série culte américaine, Happy Days. Un adolescent, pro de la mécanique auquel font appel les camarades qui se retrouvent généralement en rade. Accompagné de son meilleur ami Vince Latello (l'acteur Fisher Stevens que l'on vit notamment dans le slasher The Burning de Tony Maylam en 1981 ou dans le rôle d'Alex Brady, l'un des assassins les plus narcissiques de la série Columbo en 1989), ce dernier lance d'ailleurs une référence à un certain Christine de John Carpenter dans lequel John Stockwell joua deux ans auparavant. Complété par la délicieuse Danielle von Zerneck qui interprète ici la jolie Ellie Sawyer, le trio va évoluer dans sa seconde partie dans un multi-univers sur lequel nous reviendrons plus tard. Mais avant cela, nos trois jeunes protagonistes vont faire la découverte d'un curieux objet trouvé par Mike et Ellie dans un dépôt de l'armée américaine.


Visiblement attirée par le beau garçon, la jeune femme accepte un soir de s'y rendre en sa compagnie et c'est lors d'une chute dans un trou que Mike découvre donc un drôle d'engin qui semble toujours fonctionner. Et puisqu'il est sommé de rendre très prochainement un devoir scientifique à son professeur de sciences physiques Bob Roberts (l'acteur Dennis Hooper qui un an avant d'interpréter le rôle de Frank Booth dans le chef-d’œuvre de David Lynch, Blue Velvet, aime déjà ici se défoncer à l'oxygène pure), quoi de mieux que de lui présenter l'objet en question ? Mais rien ne va se dérouler comme prévu et nos trois jeunes héros, accompagnés de leur professeur, vont ouvrir une brèche vers des mondes parallèles. Et c'est là que les ennuis vont véritablement commencer et que le film pose véritablement problème. Aussi bien pour les spectateurs que pour nos héros, d'ailleurs. Doté d'un budget estimé entre douze et quatorze millions de dollars, Les aventuriers de la quatrième dimension passe d'une première partie très divertissante à une seconde déjà beaucoup moins satisfaisante. Pour commencer, et peut-être ainsi éviter davantage de dépenses, Jonathan R. Betuel choisit non pas de convier ses personnages à entrer dans divers univers parallèles mais ce sont ces derniers qui au contraire s'invitent dans celui de nos trois héros. C'est donc au sein de leur lycée que vont être introduits des personnages du passé, entre une reine de l’Égypte ancienne, un homme du moyen-âge, des soldats de la Waffen-SS, d'autres du conflit qui se déroula durant vingt ans sur le territoire vietnamien ou encore des créatures mutantes post-apocalyptiques telles que l'évoquera Vince Latello. Et là, mes amis, quelle déchéance. Non seulement le film devient un grand fourre-tout bordélique et indigeste apparemment dénué de tout contrôle de la part de son réalisateur mais visuellement, on est vraiment proches, TRES proche du nanar ! C'est laid à un point que l'on préférerait presque se cacher les yeux derrière nos mains. Des plantes en plastique (ne manquent plus que les pots) disséminées ça et là histoire de nous donner l'illusion d'une forêt vierge et un T-Rex en caoutchouc et à la ramasse tentent vainement de faire illusion. La deuxième moitié de ces aventuriers de la quatrième dimension est un ratage complet. On se désolidarise assez rapidement de personnages pourtant attachants au départ lors de cette seconde partie mise en scène avec les pieds. Le film de Jonathan R. Betuel démontre s'il le fallait que le temps, parfois, abîme l’œuvre qui alors devient tellement cheap et ringarde qu'elle en devient presque visuellement insoutenable...

 

jeudi 1 février 2024

Andron : The Black Labyrinth de Francesco Cinquemani (2015) - ★★☆☆☆☆☆☆☆☆




Premier long-métrage du réalisateur Francesco Cinquemani après toute une série de courts et d'épisodes de séries télévisées, Andron : The Black Labyrinth tient son nom du grec ancien signifiant la pièce d'une demeure réservée aux hommes. On peut donc supposer que le film a comme intention de traverser le temps pour nous offrir un voyage en pleine Grèce Antique ou pour au moins baigner ses personnages dans des décors typiques de cette époque mais non, là n'est visiblement pas l'intention du réalisateur et scénariste italien qui préfère au risque de créer une certaine indigence, mélanger différents types de longs-métrages ayant connu un certain succès. À l'origine, le film est semble-t-il basé sur une série télévisée italienne et mélange donc post-apocalypse avec ses décors extérieurs fourmillant de pauvres hères, groupe d'individus ayant perdu la mémoire et se retrouvant coincés dans le labyrinthe du titre, survie, jeu télévisé... Bref, il y a dans Andron : The Black Labyrinth, de la science-fiction dystopique à la manière des vieux mockbusters italiens des années 80, du Cube et consorts, du gros repompage de The Maze Runner (sorti dans l'hexagone sous le titre Le labyrinthe) et du Running Man (ou plus près de chez nous, Le prix du danger). Tout ceci enrobé par la double présence d'Alec Baldwin et Danny Glover histoire d'apporter un peu de lustre et de crédit à une œuvre qui très honnêtement en manque terriblement. En effet, dès les premières secondes et jusqu'au générique de fin, c'est l'effarement. On se demande comment les deux acteurs à la carrière pourtant bien fournie ont pu l'un et l'autre se laisser tenter par un script branlé avec aussi peu d'imagination. L'appel du billet vert, sans doute ? Manifestement financé à l'aide d'un budget serré, le long-métrage de Francesco Cinquemani offre nettement moins d'intérêt qu'une œuvre signée de Sergio Martino, Bruno Mattei ou d'Enzo G. Castellari en leur temps. Quel rapport me direz-vous entre 2019, après la chute de New-York, Virus Cannibale, Les guerriers du Bronx et Andron : The Black Labyrinth ?


Sans doute aucun, à moins que l'on se réfère aux objectifs que chacun s'était fixé en son temps : reprendre un concept. Se le réapproprier et en proposer une fumeuse alternative. Chose qui par contre ne risque pas d'arriver avec Andron : The Black Labyrinth qui demeure l'une des pires expériences cinématographiques de ces dix dernières années. On comprends rapidement que les deux vedettes du film ne sont que des faire-valoir servant à attirer du monde devant les écrans puisque les véritables protagonistes seront interprétés par des acteurs nettement moins connus : au hasard, Leo Howsard, Gale Harold, Antonia Campbell-Hugues, la chanteuse Skin du groupe Skunk Anansie ou encore Elettra Dallimore Mallaby. Bref, un casting hétéroclite pour une œuvre qui ne l'est pas moins. Gardez bien au chaud vos petits classiques achetés aux format DVD ou Blu-ray car ce n'est certes pas Andron : The Black Labyrinth qui les chassera de vos vidéothèques. Le long-métrage de Francesco Cinquemani est une purge, une vraie. Le genre de films qui pullulent, mêlant science-fiction et action dans un univers visuellement dégueulasse. Le labyrinthe du titre est à lui seul une authentique escroquerie. Oh, il y a bien quelques engrenages qui tentent de faire illusion ça et là mais le film semble avoir été tourné en grande partie à l'intérieur d'une ancienne usine désaffectée qui n'aurait sans doute pas fait tâche si elle avait dû remplacer celle de la séquence d'ouverture du nanar culte de Bruno Mattei, Virus Cannibale ! Effets-spéciaux au rabais, décors on ne peut moins immersifs, jeu approximatif et scénario bancal, Alec Baldwin et Danny Glover durent se mordre les doigts d'avoir accepté un tel projet. Le montage est chaotique, surtout lors des séquences d'action qui en deviennent totalement illisibles. L'escouade de soldats auxquels vont se frotter nos protagonistes demeure absolument ridicule (non mais ça veut dire quoi ces yeux rouges lumineux?) et semble avoir été empruntée à la série culte japonaise San Ku Kaï. Les amateurs ne séries Z de science-fiction peuvent d'ors et déjà se frotter les main : Andron : The Black Labyrinth est fait pour eux, et uniquement pour eux. Les autres risquent de fuir le film dès les premières minutes... et ils auront bien raison de le faire... Allez hop, à la poubelle !

samedi 20 janvier 2024

Panic in Year Zero ! de Ray Milland (1962) - ★★★★★★★☆☆☆

 


 

Qu'il agisse en tant que médecin xénophobe (The thing with two Heads de Lee Frost), qu'il incarne un assassin ou l'époux d'une victime dans les épisodes de la série Columbo intitulés Faux Témoin et Dites-le avec des fleurs ou qu'il incarne comme ici le mari et le père protecteur d'une famille d'américains moyens au début des années soixante, Ray Milland fait partie de ces attachants et incunables acteurs du cinéma bis qui traversèrent plusieurs décennies et incarnèrent nombre de personnages dans des genres aussi divers que la comédie, le drame (l'un allant parfois de paire avec l'autre), l'aventure, le western, le thriller, le film de guerre ou bien même le fantastique, l'épouvante et la science-fiction. Concernant Panic in Year Zero ! qu'il réalisa lui-même en 1962 mais dont il confia l'écriture aux scénaristes Jay Simms et John Morton, Ray Milland incarne Harry Baldwin, époux d'Ann (l'actrice Jean Hagen) avec laquelle ils eurent deux enfants devenus maintenant de grands adolescents prénommés Rick et Karen et respectivement interprétés par Frankie Avalon et Mary Mitchel. Le long-métrage s'inscrit dans cette grande tradition d’œuvres paranoïaques propres au cinéma outre-atlantique et du milieu du vingtième siècle découlant de l'anticommunisme et de la méfiance forcenée des États-Unis vis à vis de l'URSS et de la concordance avec la guerre froide. Tourné en noir et blanc, produit et distribué sur le territoire américain par la société American International Pictures, Panic in Year Zero ! met tout d'abord en avant les propensions d'une famille et surtout de celui qui représente en son sein l'autorité à savoir faire face à une menace qui débute d'abord par une attaque nucléaire dont les origines sont au demeurant inconnues ainsi qu'aux retombées comportementales de la population dont l'attitude va de fait s'avérer régressive. Des hommes et des femmes agissant parfois contre une nature qui leur est propre mais qui les contraint à agir différemment selon le degré de danger. Et c'est donc ainsi que se positionne le héros de ce récit limpide situant donc son action en plein cœur d'une intrigue post-apocalyptique de type ''survivaliste''. Ray Milland y décrit la nécessité de passer outre les lois et la morale pour le bien des siens. Il devient donc difficile de juger l'homme et ses actes sous leurs aspects répréhensibles.


En cela, Panic in Year Zero ! préfigure ce que d'aucun peut juger comme un comportement devenu normal dans un contexte qui lui est sorti du strict cadre de la normalité. À l'ère où le néo-féminisme a tendance à vouloir couper les couilles des hommes, le film de Ray Milland apparaîtra comme une œuvre prônant certaines valeurs morales indiscutablement passéistes voire même, criminelles. Et hors des nouvelles lois qui aux États-Unis allaient bientôt permettre aux femmes de partiellement s'affranchir de l'autorité masculine. Pourtant, Panic in Year Zero ! ne semble pas encore être près à envisager la chose de la sorte puisque réalisateur et scénaristes renvoient l'épouse et la fille aux tâches qui leur incombèrent jusque là : entretenir la résidence et produire différentes tâches ménagères comme la cuisine ou le ménage. Ray Milland appuie tant et si bien sur ce ''détail'' qu'il fait d'Ann, l'épouse du héros qu'il incarne, une femme retranchée dans ses principes au point de faire prendre de grands risques à la famille lors de son exode loin de Los Angeles où eut lieu l'un des nombreux bombardements. Jean Hagen incarne donc une épouse au caractère étonnamment crispant bien que véhiculant d'authentiques valeurs humaines. Comme sa fille Karen d'ailleurs, tandis qu'en face se dressent entre les deux femmes et les éventuels dangers, les deux mâles, armés de fusils et de revolvers. Panic in Year Zero ! conserve un rapport ténu avec la plupart des œuvres du genre. Et même s'il ne s'inscrit pas dans un décor désertique comme dans Mad Max 2 de George Miller ou dans une cité détruite et ravagée par la criminalité (voir la vague de Mockbusters signés dans les années quatre-vingt par d'opportunistes cinéastes italiens), le danger peut s'insinuer même au sommet d'une colline située au beau milieu de la nature. Ray Milland va droit à l'essentiel. Sa description du modèle rêvé de famille typiquement américaine est vite balayée par l'intense lumière des bombardements (symbolisés par de très rudimentaires effets-spéciaux, il est vrai) et le réalisateur est l'un de ceux qui posent à l'époque les bases d'un courant qui durant les décennies suivantes ne cessera pas de faire des petits. Pas un classique mais un très bon exemple de science-fiction post-apocalyptique...

lundi 15 janvier 2024

No One Will Save You de - Brian Duffield (2023) - ★★★★★☆☆☆☆☆

 

 



1982 : E.T téléphone maison - 2023 : E.T envahit maison


Une fois de plus, nos ''amis'' les petits hommes gris n'ont rien trouvé de mieux que de venir envahir la Terre. Pour quelle raison ? Ça, c'est à chacun d'en juger mais j'imagine que sur leur planète d'origine les magasins de farces et attrapes sont en rupture de stock de costumes humains et qu'ils ont décidé d'envoyer certains d'entre eux chez nous afin de se réapprovisionner. Car en effet, les créatures de No One Will Save You sont les dernières représentantes d'une vague d'espèces extraterrestres profanatrices de sépultures humaines dont les premier signes apparurent sur grand écran dans les années cinquante à travers Invasion of the Body Snatchers de Don Siegel. Première pierre à un édifice qui ensuite a connu plusieurs remakes (L'invasion des profanateurs de sépultures de Philip Kaufman en 1978, Body Snatchers d'Abel Ferrara en 1993 ainsi que The Invasion d'Oliver Hirschbiegel en 2007) et nombre d'alternatives parmi lesquelles The Thing de John Carpenter en 1982, L'invasion vient de Mars de Tobe Hooper en 1986, The Faculty de Robert Rodriguez en 1998 et sans doute l'un des plus proches dans la thématique extraterrestre: le génial The Hidden de Jack Sholder en 1987. Sorti chez nous sous l'indigent titre Traquée, No One Will Save You met principalement en scène une très jeune femme du nom de Brynn Adams que l'on aurait pu tout d'abord prendre pour une adolescente si elle n'avait pas été la propriétaire exclusive d'une immense demeure. Recluse et pas du tout en odeur de sainteté auprès des villageois qui la défigurent lors de ses rarissimes apparitions en ville, Brynn vit donc isolée dans une grande et belle propriété mais cette passionnée de maisons de poupées va très bientôt être le témoin d'un événement extraordinaire. Alors qu'une nuit la jeune femme entend de drôles de bruits, elle constate qu'une étrange créatures, tels que sont décrits généralement les êtres venus d'ailleurs, s'est introduite chez elle. Particulièrement hostile, cette dernière se met en chasse de Brynn qui au bout d'un certain temps parvient à prendre le dessus en tuant accidentellement l'intrus.ne sachant comment faire, Brynn prend son courage à deux mains et décide de se rendre au bureau du shérif. Mais en chemin, elle constate que des crop-circles ont envahit les jardins de plusieurs habitants. Pire : certains d'entre eux semblent comme ''possédés''. De retour chez elle, Brynn s'approche du cadavre de l'extraterrestre qu'elle a tué la veille et constate que quelque chose s'est échappé d'entre ses lèvres... Dénué de tout dialogue, No One Will Save You ne fera sans doute pas oublier certaines des œuvres citées ci-dessus. D'autant plus qu'en matière de psychologie, en dehors des bribes de récit concernant le passé de l'héroïne, l'écriture s'avère on ne peut plus sommaire. Mélange de ''Body Snatchers'' et de ''Home Invasion'', le second long-métrage de Brian Duffield n'en est pas moins relativement ''divertissant''. Et puisqu'en matière très précise de film de science-fiction mettant en scène des créatures prônant l'occupation des corps, rien de nouveau ne s'est présenté à nous récemment, pourquoi ne pas accorder à No One Will Save You le minimum d'intérêt auquel il peut prétendre ?


Entre Nope de Jordan Peel, The Hidden de Jack Sholder et les diverses interprétations du roman de The Body Snatchers du romancier américain, Jack Finney.


No One Will Save You est effectivement un melting-pot de ces diverses sources d'inspiration qui en grande partie sont depuis devenues des classiques de la littérature et du septième art. Ce dernier rejeton tend peut-être à devenir un grand nom de la science-fiction en mode ''invasion extraterrestre'' mais au vu du pesant challenge qu'il lui est imposé, il y a peu de chances que l'on se souvienne de lui au delà de quelques jours, voire quelques semaines. L'une des rares originalités demeure dans l'attitude de l'héroïne et des villageois envers elle. Des questions se posent d'emblée auxquelles tente de répondre le réalisateur et scénariste avec rapacité. Bien que la créature qui nous est présentée au départ ne semble pas avoir bénéficié d'un soin particulier en matière de CGI, l'idée de remplacer ses congénères par des hommes et des femmes physiquement et intellectuellement investis par d'autres phénomènes venus d'ailleurs semble être l'idée la plus simple et la plus évidente qui soit venue à l'esprit de Brian Duffield. Les effets-spéciaux étant ainsi parfois réduits à leur plus simple expression, c'est déjà ça d'économisé sur le budget. Il demeure au sein du récit quelques grossières resucées comme lorsque est scannée la demeure (un emprunt aux deux adaptations cinématographiques de La guerre des mondes) ou lorsque se déplace dans le ciel un vaisseau caché derrière un nuage (Nope). Avec No One Will Save You, nous sommes plus proches du film d'épouvante et de l'action que de la science-fiction pure, simple et réaliste. C'est d'autant plus rageant que les amateurs de cette dernière retrouveront quelques indices visuels qui les tromperont sur la marchandise. À commencer par les créatures plus ou moins semblables à l'idée que l'on se fait majoritairement d'extraterrestres dotés d'une grande intelligence (lesquels ne trouvent ici rien de mieux que de venir foutre le souk sur notre planète). Gros yeux sombres et crâne sur-développés ne semblent donc pas être gages de facultés intellectuelles supérieures. Du moins, pas en ce qui concerne le long-métrage de Brian Duffield. Ensuite, quelques intéressants visuels émergent ça et là. Comme l'enlèvement du corps extraterrestre par un rayon-tracteur. Mais en réalité, le film est en grande partie décevant. L'arrivée d'une créature aux dimensions beaucoup plus impressionnantes terminant ainsi de noircir le tableau. Ça en devient presque gênant. Bref, tout ce que semble construire le scénario au départ est sujet à des modifications qui transforment No One Will Save You en un vulgaire film d'épouvante-fantastique insistant un peu trop sur les diverses attaques d’origine extraterrestre tout en niant le droit à une certaine profondeur. Plus le récit de No One Will Save You évolue et plus l'aventure s'avère pénible à suivre. Et lorsque même à la fin Brian Duffield choisit d'offrir une réponse aux questions du début, là encore, on éprouve beaucoup de mal à concevoir ce que veut dire par là le cinéaste...

 

vendredi 5 janvier 2024

High Life de Claire Denis (2018) - ★★★★★★★★☆☆


 


 

Ce qu'il y a de remarquable et donc de fondamentalement indispensable lorsque l'on se lance dans une œuvre cinématographique est de percevoir l'angle sous lequel son auteur l'a envisagé. D'autres pourtant nous poussent vers une voie bien différente. Une fois absorbée la contemplation, il faut parfois bien admettre que le spectateur est LE chaînons manquant qui complète parmi les projets les plus inattendus, ce qui d'apparence peut en quelques occasions paraître comme inabouti. Ces vides qu'il faut absolument remplir, en construisant intellectuellement et au fil du récit, de détails qu'ont volontairement omis d'intégrer ou d'annoter scénaristes et réalisateurs. Atypique jusqu'à devenir parfois inconfortable, l'univers de Claire Denis s'étendait en 2018 au delà des seules frontières terrestres pour emporter avec elle, protagonistes et spectateurs jusqu'aux confins de l'univers. Là où tout semble possible. Où la mort veille semble-t-il à emporter tous ceux qui s'y risquent mais où il n'est peut-être pas inimaginable de penser qu'un ailleurs existe. Nous conter un récit aussi extraordinairement ambitieux et le faire à bord d'un vaisseau qui a tout l'air d'avoir été construit pour les besoins d'un bon gros nanar transalpin des années quatre-vingt est en soit, un acte aussi insensé que d'envoyer à des milliards de kilomètres de notre planète, des repris de justice pour aller vérifier ce qu'il peut se cacher de l'autre côté d'un trou noir. En somme, la première pierre à elle seule fascinante d'un projet de science-fiction qui ne se bornera pas à suivre le chemin ultra balisé du genre. Et pourtant, l'entrée en matière plongera certainement une partie du public dans un état de somnolence quasi immédiat. Supportant avec aussi peu de patience que le héros incarné par Robert Pattinson ce rejeton braillant sans interruption, les divagations ''monolinguales'' du héros risquent tour d'abord d'exaspérer avant que ne surviennent enfin de leur vivant, ces compagnons apparemment raides morts qu'il vient tout juste d'envoyer faire un voyage dans l'espace. Car High Life de Claire Denis est essentiellement construit sous forme de flash-back. Un confinement regroupant donc une dizaine d' hommes et de femmes condamnés à de lourdes peines de prison et qui ont fait le choix de participer à une expérience qu'ils savent suicidaire : approcher un trou noir et plonger en son cœur. Pris dans la tourmente d'une expédition sans espoir de retour, la tension monte entre les uns et les autres. D'autant plus que les hommes s'accordent pour faire don de leur sperme tandis que les femmes acceptent d'être fécondées.


Sous le prisme de l'hypocrite recherche scientifique, le film condamne d'anciens taulards à une inévitable condamnation à mort...



Et tout ceci sous l'égide du docteur Dibs qu'interprète l'actrice française Juliette Binoche dont le sex-appeal n'a jamais été aussi puissant tout en étant franchement inquiétant, voire même dérangeant. De ce voyage aux implications scientifiques, conquérantes et biologiques, Claire Denis élabore une sorte de Trip spatial absolument démentiel, ponctué de quelques visions dantesques (la salle de baise), construisant son œuvre autour de l'âme humaine, de sa capacité à se surpasser et des dérives qu'impose ce moment très précis où la résistance chimiquement morale de l'esprit humain succombe devant une trop forte pression. L'espace, immense étendue, figurant en un instant précis le placenta et le liquide amniotique. Avant toute chose et surtout celle de se lancer dans l'aventure High Life, il faut comprendre que le long-métrage de Claire Denis, ça n'est ni Star Wars ni même Star Trek dont l'approche nettement plus profonde et intellectuelle que l’œuvre de George Lucas est déjà un prétexte pour rebuter les amateurs de blockubusters de science-fiction (chose qui est pourtant malheureusement non avérée au sein de la dernière trinité de films qui furent tournés entre 2009 et 2015). Ici, la française aborde le passionnant mystère qui entoure les trous noirs en mode ''film d'auteur''. Avec tout ce que le concept peut avoir de rebutant. Un rythme lent, voire pesant, que l'ancienne assistante de Robert Enrico, de Jacques Rivette et fan de Jim Jarmusch et de Wim Wenders saupoudre fort heureusement de fulgurances presque inattendues. L'intrigue semble parfois se complaire dans une outrancière accumulation de propos tournant autour du sexe. Des actes qui nourrissent cependant le récit et fonctionnent comme une épidémie de désirs irrépressibles dont le patient zéro serait le docteur Dibs que la réalisatrice et les scénaristes Jean-Pol Fargeau et Geoff Cox décrivent comme porteuse d'un ''sexe en plastique''. Comprendre que cette femme hautement désirable n'aurait au fond d'humain que le désir de procréation par procuration. Décors et photographies participent de l'étrangeté et de l'inconfort du récit. Tout comme la partition musicale du musicien britannique Stuart A. Staples, chanteur du groupe Tindersticks. Autant prévenir celles et ceux qui voudraient que Claire Denis leur apporte une réponse s'agissant du phénomène des trous noir. La réalisatrice préfère cependant abandonner le spectateur à l'expectative lors d'un final laissant l'ultime question en suspens. Au delà de cette seule interrogation, High Life est une œuvre puissamment évocatrice, hypnotique et fulgurante. Sans doute l'une des meilleures propositions de science-fiction à la française pour une coproduction franco-germano-anglo-américano-polonaise...

 

lundi 1 janvier 2024

La planète sauvage de René Laloux (1973) - ★★★★★★★★☆☆

 



 

Célébrons ce début d'année 2024 avec une œuvre d'animation française réalisée par le dessinateur, peintre et sculpteur René Laloux en collaboration avec l'écrivain, poète, metteur en scène, peintre et dessinateur Roland Topor. La planète sauvage est donc un film de science-fiction animé majeur dans l'histoire du cinéma fantastique hexagonal. Un univers à lui seul, constitué de nombreuses planches surréalistes typiques de l'univers de Roland Topor. À l'origine, le long-métrage est l'adaptation d'un roman intitulé Oms en série de l'écrivain français Stefan Wul. Réalisé par René Laloux, La planète sauvage semble être tout d'abord à travers son esthétique très particulière, l’œuvre de Roland Topor qui y exprime son talent pour les univers décalés. Auteur de L'escalier chimérique qui en 1976 sera adapté sur grand écran sous le titre Le Locataire par Roman Polanski, le dessinateur français imagine un monde foisonnant, riche d'une faune et d'une flore stupéfiantes de beauté. L'artiste et le réalisateur s'y laissent aller à une grande poésie visuelle et situent l'action de La planète sauvage dans un futur assez proche de notre époque. Sur la Planète Ygam, la forme de vie la plus intelligente semble être celle formée par les représentants de l'espèce Draggs. Des créatures humanoïdes dont trois des particularités sont de mesurer douze mètres de haut, de posséder des sortes de branchies en lieu et place des oreilles et dont l'épiderme qui recouvre leur corps est entièrement bleu. Leur oisiveté est à l'exact opposé de l'asservissement dont ils font preuve envers une espèce importée d'une planète lointaine connue sous le nom de Terra. Ceux qu'ils surnomment les Oms sont partagés entre deux catégories. Les Oms domestiques, qui sont une main-d’œuvre importante pour le bon fonctionnement Draggs et servent parfois d'animaux de compagnie. Ainsi que les Oms sauvage qui eux, vivent dans la nature et en dehors de toute civilisation. Un jour, la jeune Dragg Tiwa découvre le cadavre d'une mère Om dont le bébé vit encore. Après avoir eu l'accord de son père Sinh, la jeune fille emporte avec elle celle qui deviendra Terr et choisit de l'élever. Mais plus le temps passe, et plus Tiwa se désintéresse de Terr qui depuis est devenu un robuste et très cultivé jeune homme. Un jour, celui-ci décide de prendre la fuite et tombe nez à nez avec une Om sauvage qui ramène le nouveau venu auprès des siens...


On remarque très vite que l'histoire de La planète sauvage n'est pas tellement différente de celle que nous connaissons. L'apport du long-métrage de René Laloux est donc directement lié à son environnement. Des dizaines de plantes, de créatures toutes plus étranges les unes que les autres et surtout, un coup de crayon qui différencie le travail de Roland Topor de tout ce que l'on a généralement l'habitude de voir. Asservissement, apprentissage, révolte, le film se construit autour de l'histoire de l'esclavage et de son abolition à travers un récit fantastique dont le sens est multiple. Un monde où l'imaginaire n'a absolument rien à envier à tout ce qui le précéda et à tout ce qui lui succéda en matière d'univers et de science-fiction. Fantastique de par l'abondante inspiration de ses auteurs mais aussi, fantastique de par le travail accompli par René Laloux et Roland Topor qui nous livrent un spectacle aussi délirant que majestueux. Amour, guerre, mort sont également au centre d'une œuvre qui touche quel que soit l'âge que l'on a. Du plus jeune au plus âgé, le spectateur est comblé, invité à un voyage par delà les frontières de l'espace et rêve d'un monde couleur pastel. Plus qu'un film d'animation ou l'adaptation d'une œuvre de papier, La planète sauvage est la transposition à l'image d'un songe étrange, sans doute un peu fou, fantasme surréaliste et lyrique d'un monde certes imparfait où les espaces vides possèdent au moins autant d'importance que les étranges organismes qui y poussent ou s'y déplacent. Élément essentiel : le doublage. ET parmi les interprètes de ce très grand film de la science-fiction animée, l'acteur Jean Topart maintenant disparu depuis presque onze ans et qui laissa surtout une trace indélébile dans l'univers du doublage et notamment à la télévision avec les dessins animés Rémi sans famille en 1977, Ulysse 31 en 1981 (il y interpréta rien moins que la voix de Zeus!) ou encore Les mystérieuses cités d'or l'année suivante et dans lequel il sera une nouvelle fois chargé de la narration. Notons enfin que la bande musicale est l’œuvre du compositeur et pianiste de jazz français Alain Goraguer qui collabora avec nombre d'artistes dont Boris Vian, Jean Ferrat ou encore Serge Gainsbourg avec lequel il collabora jusqu'en 1964...

 

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