vendredi 25 avril 2025

Explorer from Another World de Woody Edwards (2024) - ★★★★★★★★☆☆

 


 

En 1996 sortait sur les écrans Independence Day de Roland Emmerich. Une œuvre de science-fiction dégoulinant d'un patriotisme américain parfaitement insupportable ! Six mois plus tard, le réalisateur Tim Burton voyait son Mars Attack ! sortir à son tour dans les salles de cinéma. Une œuvre considérée alors comme la réponse au film de Roland Emmerich alors même que le tournage débutait avant même que son concurrent direct n'ait vu le jour dans les salles obscures. De l'un comme de l'autre, je n'ai conservé qu'un piètre souvenir. Le premier forçant un peu trop le caractère héroïque de son chef d'état tandis que l'humour du second m'avait laissé totalement froid. Alors que le 5 novembre prochain est prévue la sortie du nouveau volet de la franchise Predator (dont la créature arborera semble-t-il désormais un visage quelque peu ''humanisé'' totalement grotesque), abordons plutôt Explorer from Another World de Woody Edwards. Un artiste complet qui s'est lui-même chargé de l'écriture, de la réalisation, de la bande musicale et qui en outre s'est offert l'un des rôles à l'écran. Il s'agit là d'un moyen-métrage n'excédant pas les quarante-cinq minutes. Un format, au fond, idéal, qui va droit au but et laisse de côté tout le superflu d'un sujet tel que celui d'une invasion extraterrestre. Un sujet, il est vrai, maintes fois traité à l'image mais qui dans le cas de Explorer from Another World a pour principal intérêt son aspect visuel. Car plutôt que de concevoir une œuvre projetant ses personnages dans un futur plus ou moins proche et dotés d'outils technologiques actuels, Woody Edwards préfère se tourner vers un passé plus ou moins lointain. À une époque où naïvement, le cinéma de science-fiction outre-atlantique supposait l'existence d'une race d'aliens provenant de la planète Rouge. Mars, laquelle avait fait l'objet en 1986 d'un sympathique Invaders from Mars, réalisé par l'auteur du cultissime Massacre à la tronçonneuse Tobe Hooper, lequel plongeait son intrigue dans une époque qui rappelait sans cesse la filiation du long-métrage avec celui de William Cameron Menzies, Les Envahisseurs de la planète rouge sorti quant à lui en 1953 et dont le film de Hooper fut le remake. Ce dernier rendant ainsi hommage à cette flopée de films de science-fiction paranoïaque qui fit florès dans les années 50 et 60 !


Une œuvre pourtant en demi-teinte dont les qualités pourtant intrinsèquement liées à son style visuel ne firent pas que des adeptes. Parions qu'en ce qui concerne Explorer from Another World, la donne sera différente. Car si ce récit des habitants d'une petite localité américaine confronté à un envahisseur d'une autre galaxie particulièrement belliqueux ne développe qu'un script réduit à sa plus simple expression, la méticulosité du travail accompli par son auteur force le respect. Car bien que l'image brille de couleurs un peu trop chamarrées pour véritablement donner la sensation que le film pourrait être une œuvre retrouvée parmi les archives concentrant des bobines datant des années 50 ou 60, Woody Edwards a pris conscience de l'importance de rappeler aux spectateurs tout ce qui se rattache à l'époque où s'inscrit le récit. De la simple paire de lunettes, en passant par les décorations intérieures et jusqu'aux fameux pistolet-laser et soucoupe volante dont tout extraterrestre digne de ce nom se doit d'être accompagné, Explorer from Another World parvient généralement à faire illusion. Jusqu'à la partition musicale typique de ces années là. Tout au plus regretterons-nous quelques fautes de goût. Comme ces perruques qui semblent avoir été fabriquées en Chine avant d'être exportées sur le territoire américain par des sites tels que Wish, Alibaba ou Temu ! En dehors de ces quelques digressions esthétiques, Explorer from Another World est un régal pour les yeux des spectateurs ivres de nostalgie. Certains apprécieront d'ailleurs sans doute les quelques escapades dans le domaine de l'horreur à travers ses excès gore. Renvoyant ce moyen-métrage au temps de la glorieuse époque où Bad Taste de Peter Jackson et Street Trash de Jim Muro virent le jour. Pour un coup d'essai, Woody Edwards réussi le pari d'allier science-fiction vintage (et non pas rétro-futuriste en ce sens où le film ne relie jamais l'esthétique des années 50-60 à notre époque), flots d'hémoglobine (dont certains semblent avoir été inspirés par les épanchements sanguins provenant d'Asie) et humour. Bref, si vous aimez la science-fiction, l'horreur, la comédie et que vous vous impatientez en attendant la sortie en fin d'année du prochain Predator, jetez donc un œil à ce moyen-métrage très sympathique....

 

lundi 31 mars 2025

Transformations de Jay Kamen (1988) - ★★★★★★☆☆☆☆

 


 

Parmi les nombreuses productions estampillées Empire International Pictures l'on trouve Ghoulies de Luca Bercovici, Troll deJohn Carl Buechler, TerrorVision de Ted Nicolaou, From Beyond de Stuart Gordon, Crepozoids de David DeCocteau, Intruder de Scott Spiegel ou encore Prison de Renny Harlin. De la série B, voire X, Y ou Z dans le meilleur et le pire des cas. Transformations de Jay Kamen se trouve à lisière des uns et des autres, mêlant comme parfois chez le distributeur Charles Band, différents univers empruntant à la science-fiction, l'horreur ou le fantastique. Dans des décors que l'on raccordera parfois à ceux des séries L'âge de cristal et Battlestar Galactica, l'astronaute John Wolf (Wolfgang Shadduck dans la version originale) est aux commandes d'une navette qui vient s'échouer à la surface de la colonie pénitentiaire Hephaestus IV. Une planète qui ''accueille'' en majorité des criminels exilés afin d'y travailler de force dans des mines. Là, John Wolf (Rex Smith) fait la connaissance de la très jolie Miranda (Lisa Langlois). Jeune infirmière née illégalement sur Hephaestus IV . En effet, alors que les femmes transférée à la surface de la planète sont en général stérilisées pour ne pas avoir d'enfants, la mère de Miranda fut épargnée par le médecin qui s'occupa d'elle durant sa grossesse. Aujourd'hui infirmière devant assumer seule les soins des habitants de la planète, la jeune femme est chargée de veiller sur John, lequel est contraint de demeurer sur place jusqu'à la réparation de sa navette. Les règles ici sont simples : à la première transgression des lois qui régissent Hephaestus IV, c'est la mort. Ce qui n'empêchera pas notre vaillant héros de quitter sa chambre d’hôpital pour aller faire un tour dans le bar de la station...L'on découvre un chaud lapin en la personne de John. Il faut dire que tout autant qu'elles soient grimées comme des créatures humanoïdes vaguement extraterrestres, les actrices sont souvent d'une grande beauté et d'un physique agréable. John va en profiter pour s'assurer que son ''matos'' fonctionne encore depuis qu'il a atterri sur la planète. Mais ce que lui et les habitants de Hephaestus IV ne savent pas encore, c'est qu'il est atteint d'une étrange maladie particulièrement contagieuse qui provoque une horrible mutation. La ''Transformation'' du titre, laquelle est en relation directe avec un ''rêve'' étrange qu'il fit à bord de son engin... Travaillant plus tard sur la supervision sonore de longs-métrages populaires comme À la poursuite d'Octobre Rouge de John McTiernan, Mort ou vif de Sam Raimi ou encore Independence Day de Roland Emmerich, Jay Kamen a durant sa carrière, multiplié les casquettes :


Monteur, auteur d'une bande originale pour le court-métrage Not Your Time qu'il réalisa lui-même en 2010, producteur et parfois même acteur pour son propre compte, le réalisateur signe avec Transformations une comédie de science-fiction horrifique visiblement à petit budget. Comme semblent l'indiquer les décors et les costumes. Techniquement largué, le long-métrage est un salmigondis d'idées et d'approches visuelles et esthétiques empruntées ici et là, que l'on retrouve donc parfois dans les séries évoquées plus haut mais aussi dans ce qui deviendra beaucoup plus tard l'un des fonds de commerce de la science-fiction sur grand écran : la dystopie. S'il n'est pas le premier à évoquer l'hypothèse de transformer une planète en prison puisque John Carpenter en avait déjà posé les bases avec le génial New-York 1997 en 1981, il précède de quatre années le ALIEN³ de David Fincher qui ne sera donc réalisé que quelques années plus tard ou ces films futuristes qui prennent pour cadre des prison spatiales comme Fortress 2 : Réincarcération de Geoff Murphy en 2000, Dante 01 de Marc Caro ou Lock Out (Sécurité maximale) de James Mather et Stephen St. Leger. Transformations fait œuvre de parent pauvre du genre et n'apparaît donc pas très sérieux. D'autant plus que le personnage incarné de manière plutôt légère par Rex Smith n'arrange pas les choses. Notons que parmi les interprètes secondaires l'on retrouve l'acteur Patrick Macnee, rendu célèbre pour le rôle de John Steed dans la série télévisée britannique Chapeau melon et bottes de cuir dès le début des années 1960 en Angleterre. Doté d'effets-spéciaux parfois cradingues directement liés à la lente mutation du héros ou à la créature qui en est directement la cause, le film de Jay Kamen n'est pas déplaisant à regarder. Et ce, même si les quelques séquences ''horizontales'' sont filmées sans trop d'engouement. On rêve à l'idylle entre John et Miranda qui décidément envoûte par son charme. Une Miranda qui, dans la version française, change subitement et étrangement de prénom pour s'appeler ensuite Muriel ! Bref, Transformations est une petite série B sympathique qui mérite d'être découverte... une fois, pas deux !

 

mardi 11 mars 2025

Companion de Drew Hancock (2025) - ★★★★★★★★☆☆

 


 

Pour son tout premier long-métrage, le réalisateur et scénariste américain Drew Hancock a signé l'une meilleures surprises de ce début d'année 2025. Difficile en effet de n'y point voir un mélange des genres si intelligent que Companion réunira aussi bien les amateurs de comédies, de thrillers que certains fans de science-fiction. Il va par contre dès le départ falloir se faire à l'idée de ne surtout pas avoir la curiosité de jeter un œil à la bande-annonce. Pire, une fois que l'erreur aura été commise, certains twists survenant lors du récit n'auront pas tout à fait la même saveur. Il devient par conséquent assez compliqué d'évoquer Companion sans être contraint d'en révéler certains soubassements. Dès lors, quel type d'informations peut-on divulguer sans se retrouver sous un flot d'insultes lancées par celles et ceux qui ne l'auraient pas encore découvert ? Et bien pour commencer, que le film budgété à hauteur de dix millions de dollars est tout d'abord incarné par la très craquante Sophie Thatcher qui à l'image interprète Iris, la compagne de Josh (Jack Quaid, fils des acteurs Dennis Quaid et Meg Ryan) dont elle est follement éprise. Le couple est convié à retrouver trois amis dans la luxueuse propriété d'un certain Sergey (Rupert Friend), un riche homme d'affaire qui les accueille donc chez lui pour quelques jours. Iris est angoissée à l'idée de se retrouver ainsi en réunion. D'autant plus que la compagne de leur hôte (Megan Suri dans le rôle de Kat) l'accueille assez froidement. Pour compléter le tableau, Eli (Harvey Guillén) et Patrick (Lukas Gage) forment un couple homosexuel lui aussi très amoureux. Je sais déjà ce que certains penseront d'emblée au fil du récit. Déployant une configuration qui semble entrer de plain-pied dans la mouvance Woke, Companion se satisfait suffisamment de son ton très second degré pour que l'approche semble-t-il parfois très opportuniste ne gâche absolument pas le spectacle. Tourné dans un cadre aéré et lumineux, le long-métrage de Drew Hancock démarre donc comme une sempiternelle réunion de camarades qui le temps d'un week-end feront la fête avant que ne survienne un imprévu. Sauf que la voie que choisi l'auteur est beaucoup plus nuancée. Bon, maintenant, très chers amis, permettez-moi d'en révéler un peu plus sur son contenu. Et si vous ne l'avez pas encore vu, je vous conseille d'arrêter tout de suite la lecture de cet article.


[SPOIL]. Dès le lendemain de leur arrivée chez Sergey, Josh conseille à Iris d'aller se détendre au bord du lac qui jouxte la propriété. Rejointe rapidement par l'hôte des lieux, celui-ci se montre particulièrement entreprenant. Témoignant d'ailleurs de la complicité de sa compagne Kat et du petit ami d'Iris ! Agressée sexuellement puis étranglée, la jeune femme se défend en sortant de sa poche un couteau (dont la présence, rassurez-vous, n'est pas inopinée) avant ce l'enfoncer dans la gorge de Sergey [fin du SPOIL]. Une fois de retour dans la demeure et le haut du corps ensanglanté, Iris affirme que Sergey a tenté de la tuer et qu'elle n'a fait que se défendre. Si jusque là Companion avait tout de la comédie gentillette et propre sur elle, le film prend évidemment un nouveau ton avec ce meurtre particulièrement graphique. Un drame qui va mettre en lumière une vérité à laquelle le spectateur qui avait eu la bonne idée de ne pas regarder la bande-annonce ne s'attendait certainement pas. [SPOIL] En effet, l'on découvre avec effarement qu'Iris n'est pas tout à fait la jeune femme qu'elle semblait être jusque là. D'où l'aspect ''fantastique'' du film se référant à un certain type de science-fiction très à la mode convainquant la domotique et la robotique. Au sujet de cette dernière, l'on apprend donc que la jeune femme est un androïde. Une thématique et une attitude notamment de la part de Josh qui posent le problème de l'asservissement de la femme par l'homme qui dans le cas présent exploite sexuellement et domestiquement celle qui partage sa vie. Représentation parfaite de la femme à laquelle, comble de l'ironie, le compagnon réduit son pourcentage d'intelligence à 40%, Iris symbolise ainsi ces femmes brutalisées et soumises aux hommes et dont elles font régulièrement les frais de la misogynie et du patriarcat [fin du SPOIL]. Une fois mise en évidence la non réalité organique d'iris, le film aurait pu reposer sur ce simple constat pour n'être plus qu'une histoire de révolte et de vengeance de la femme/machine envers l'homme qui la contrôle. Mais non puisque le réalisateur et scénariste imagine une diabolique machination qui va tourner court et être à l'origine d'une succession d'événements tournant au carnage. Companion parvient à se renouveler sans cesse et nous offre ainsi un spectacle très divertissant et sans temps morts. Bref, une œuvre hybride où se côtoient humour noir, thriller et science-fiction dystopique. Un régal...

 

lundi 24 février 2025

Proximity d'Eric Demeusy (2020) - ★★★★★☆☆☆☆☆

 


 

Premier long-métrage du réalisateur, scénariste, producteur et concepteur d'effets-spéciaux américain Eric Demeusy, Proximity aborde le sujet de l'abduction d'un jeune adulte par des extraterrestres. En ouverture l'on assiste à l'enlèvement d'un bûcheron prénommé Carl à la toute fin des années soixante-dix. Une séquence pleine de bruit et de fureur qui ne laisse rien présager de bon. Trop d'effets démonstratifs tuant directement dans l’œuf tout mystère propre au phénomène. L'auteur n'engage donc pas le récit dans l'hypothèse du doute concernant la réalité de cette disparition. Selon lui, les petits hommes gris, verts ou... marrons (!!!) existent bel et bien et n'en déplaise à ceux qui doutent encore de leur existence, il va désormais falloir vivre avec cette certitude sans que jamais l'on ne puisse mettre en contradiction les paroles ou les preuves du jeune protagoniste avec l'éventualité selon laquelle tout ne relèverait que de la paranoïa ou du complotisme. Cinquante ans plus tard, un bolide s'écrase sur notre planète. Du moins les premières images semblent-elles aller dans ce sens avant que ne réapparaisse devant les yeux de l'ingénieur en informatique Isaac (l'acteur Ryan Masson), cette même soucoupe volante qui apparu en 1979 devant ceux de Carl. Armé d'une caméra, le jeune homme est alors confronté à un alien qu'il parvient à filmer avant de prendre la fuite. Une échappée qui ne lui servira à rien puisque Isaac sera abducté avant de réapparaître trois jours plus tard sans avoir le moindre souvenir de ce qu'il a vécu durant les soixante-douze dernières heures. Par chance, sa caméra elle aussi est revenue de cet intrigant ''voyage'' qu'il a fait les soixante-douze dernières heures. Et avec elle, le témoignage vidéo de l'événement. Partageant les images sur Internet, lesquelles deviennent très rapidement virales, celles-ci vont attirer autant de sceptiques que de croyants. Invité (piégé?) sur un plateau de télévision, Isaac témoigne... en vain... Au fil du récit, le jeune homme fait la connaissance de Sara (Highdee Kuan) qui comme lui paraît avoir vécu la même expérience ainsi que celle de Zed (Christian Prentice), un pirate informatique qui de son côté va aider les deux jeunes gens à entrer en contact avec Carl qui depuis sans enlèvement et sa réapparition vit retranché en un lieu gardé secret et qui depuis passe le plus clair de son temps à ''écouter les étoiles''.


Alors que le petit groupe ainsi formé attend le retour prochain des extraterrestres, des agents du gouvernement sont lancés à leurs trousses... En réalité, entre l'abduction d'Isaac et l'apparition de cette intelligence venue d'une autre galaxie, il va s'en passer des choses. Beaucoup (trop) de choses à vrai dire. Une cascade d'événements plus ou moins crédibles ou admirables selon que le spectateur se situe ou non du côté des passionnés d'ufologie se référant à des phénomènes décrits de manière réalistes. Le principal défaut d'Eric Demeusy et donc de Proximity est cette gourmandise avec laquelle l'auteur ajoute des données qui sortent le film du cadre strict de la science-fiction. D'un côté, le film décrit vaguement le traitement infligé aux victimes d'enlèvements par des extraterrestres. Isaac et Sara portent effectivement un émetteur sous la peau et des radios révèlent notamment chez le jeune homme une fracture interne qui n'a rien de commun avec ce que rencontrent en général les victimes de chutes ou d'accidents. L'on a droit en outre à la présence d'une organisation gouvernementale dédiée à l'étude des phénomènes extraterrestres qui va notamment piéger Isaac. Une organisation au sein de laquelle l'on retrouve les habituels ''Men in Black'' mais aussi de manière plutôt curieuse et pittoresque, des androïdes dont la voix et l'apparence déclencheront sans aucun doute possible, des barres de rire auprès des spectateurs. Proximity est donc plus qu'un pur film de science-fiction drainant tout un tas de poncifs parmi lesquels il est tout de même heureux de constater que les extraterrestres n'apparaissent pas comme d'affreuses créatures insectifères. D'un autre côté, sans doute fasciné par la franchise Star Wars et ses Stormtroopers, le réalisateur crée des machines dont les railleries qu'elles génèrent raisonneront bien après la fin de la projection. À cela, Eric Demeusy ajoute à son jeune héros un super-pouvoir, des antagonistes caricaturaux au possible mais aussi, une bande son parfois imbitable. Entre pop ultra-commerciale à destination du public adolescent et envolées se distinguant par une approche aventureuse se rattachant davantage à l'univers d'Indiana Jones que de la science-fiction, Proximity demeure une œuvre parfaitement innocente. On ne s'y ennuie effectivement pas mais le mélange des genres et des idées finit d'en faire un film totalement oubliable une fois le récit arrivé à terme...

 

mercredi 19 février 2025

Cassandra de Benjamin Gutsche (2025) - ★★★★★★★★☆☆

 


 

Alors oui, la série créée par Charlie Brooke, Black Mirror fut il y a quelques années porteuse de mauvaises nouvelles au sujet des dérives de l'Intelligence Artificielle. Mais il ne faudrait pas oublier que les dystopies qu'y décrivaient son créateur, les différents réalisateurs ainsi que les scénaristes ne reposèrent pas toutes sur des concepts totalement innovants. De 2001, l'odyssée de l'espace de Stanley Kubrick en passant par Mondwest de Michael Crichton en jusqu'aux récents M3GAN de Gerard Johnston et T.I.M de Spencer Brown, nombreuses furent les œuvres à mettre en scène des technologies avancées prenant le pas sur ceux qui étaient à l'origine de leur conception. Il ne suffit donc pas de citer Black Mirror pour se faire une idée de ce que recèle Cassandra, cette nouvelle série germanique qui après Dark de Baran bo Odar et Jantje Friese confirme que l'Allemagne est en bonne position dans le domaine de la science-fiction à l'échelle internationale (contrairement à la France qui parfois ose proposer comme alternatives, des daubes de l'ampleur de L'homme parfait de Xavier Durringer). Ici, il n'est plus question d'évoquer le voyage dans le temps mais l'implication de la domotique et de la robotique dans le foyer d'une famille qui essaie de se reconstruire après un drame épouvantable. David et Samira Prill ainsi que leurs deux enfants Fynn et Juno s'installent dans leur nouvelle demeure. Une habitation que l'on doit à l'origine à l’architecte autrichien Richard Joseph Neutra, concepteur de la Kemper House qui sert donc en partie au récit. En partie, oui, car le réalisateur allemand Benjamin Gutsche n'a pu profiter que des extérieurs de la bâtisse tandis que les origines des intérieurs demeurent apparemment encore un mystère. Un ''secret'' qui alimente ce que d'aucun de celles et ceux qui ont déjà découvert la série peuvent considérer d'environnement très intrigant même si l'on imagine que l'équipe chargée de donner aux intérieurs une patine rétro-futuriste y sont pour beaucoup dans l'étrangeté de cet univers domestique. Entre ces écrans de télévision qui semblent se référer à de vieux postes à tubes cathodiques, cet ascenseur dont la manifeste présence est encore (selon moi) à l'étude ou cette pièce très curieuse dont l'élaboration semble avoir comme principale source d'inspiration certains décors et objets du Shining de Stanley Kubrick, nul doute que la demeure des Prill est un personnage à part entière.


Mais plus encore que l'anxiété que génère cet environnement, c'est bien la présence de Cassandra, interprétée par l'excellente Lavinia Wilson, qui va être au centre de toutes les inquiétudes. Alors que David et sa famille s'installent dans une demeure qui depuis cinquante ans est demeurée à l'abandon, c'est en explorant les différentes pièces qui la composent qu'ils découvrent un vieux modèle de robot dont le fonctionnement fut interrompu à la suite du décès des précédents propriétaires de la maison. La particularité de cette machine que les Pritt vont choisir de remettre en marche est qu'elle est directement raccordée à tout un ensemble de systèmes électroniques tous reliés entre eux. Cassandra semble donc être le ''cerveau'' du réseau qu'elle peut à loisir contrôler à distance. Sans être affreusement décevants, les débuts de cette mini-série en six épisodes laissent l'impression que l'on est face à une énième proposition de science-fiction dystopique au centre de laquelle un ou plusieurs individus vont être confrontés à un robot domestique défaillant. Et d'une certaine manière, il s'agit effectivement de cela. Mais là où le créateur de Cassandra a réussit le pari d'oser assumer un concept finalement presque vieux comme le monde puisque déjà abordé à maintes reprises, c'est sans doute en amenant son idée vers une voie retravaillée en profondeur. Je m'explique : ici, il ne s'agit pas tant d'opposer une mère de famille (Mina Tander dans le rôle de Samira Prill) à une machine dont l'inquiétant comportement serait simplement causé par des dysfonctionnements mais d'offrir à cette dernière l'occasion de montrer aux spectateurs qu'elle est peut-être plus que cette boite de conserve comme elle est parfois surnommée. Et donc, davantage qu'un programme informatique à l'origine uniquement disposé à accomplir des tâches prédéfinies. Alors que la série tourne tout d'abord presque exclusivement autour des membres de la famille Prill (complétée par les acteurs, Michael Klammer, Joshua Kantara et la jeune Mary Tölle), Cassandra prend un virage inédit en plongeant de nouveaux personnages cinquante ans plus tôt. La famille qui justement, un demi-siècle en arrière fut celle qui vécut dans cette même demeure. Sont ainsi introduits les trois membres de la famille Schmitt. Une famille totalement dysfonctionnelle. Le récit est donc partagé entre les événements présents et ceux du passé et Cassandra mue alors pour passer de la stricte dystopie horrifique au drame familial et au thriller !


Benjamin Gutsche signe avec cette nouvelle série, une véritable réussite où le rétro-futurisme des décors côtoie un scénario qui brasse dans un univers de science-fiction, des idées neuves et d'autres qui le sont déjà beaucoup moins (le thème de l'homosexualité non assumée par exemple). En intégrant les personnages incarnés par Franz Hartwig et par Elias Grünthal mais également pour la seconde fois l'actrice Lavinia Wilson, le réalisateur donne du sens à toute une série d'événements qui se produisent dans le présent et au point de vue de Cassandra, laquelle agît en conséquence comme le ferait une mère un peu trop... protectrice. La série aurait pu être absolument parfaite si seulement quelques éléments n'étaient pas venus défaire un système d'écriture mettant tout en œuvre pour que le récit ne souffre d'aucunes invraisemblances. Mais à vouloir en faire trop et à préférer parfois donner dans le ''spectaculaire'' plutôt que dans la sobriété et le réalisme, Benjamin Gutsche finit par multiplier les faux pas. Si l'emprise de Cassandra sur la jeune Juno justifie le fait que ses parents acceptent de laisser ''allumée'' la machine (la gamine ayant besoin de se reconstruire, sa nouvelle ''amie'' pourrait l'y aider selon eux), lorsque cette dernière commence à révéler sa véritable nature et fait montre d'une attitude très inquiétante, n'importe qui de censé aurait pris la décision de couper court à ses agissements. Heureusement, Samira est là pour veiller sur les siens. Mais pour combien de temps puisque son époux commence à voir surgir chez elle des problèmes psychologiques qui pourraient expliquer la situation ? Si la paranoïa supposée de la mère et l'absence de soutien de David sont plutôt bien menés et si toute la partie qui se déroule cinquante ans en arrière est véritablement bouleversante (bien qu'un peu caricaturale à force d'enfoncer le couteau bien profond dans le dos d'une femme et de son enfant confrontés à un mari et un père absolument monstrueux), le dernier épisode termine d'envoyer la série dans les pires travers du genre. Je n'en dirai pas davantage pour ne pas spolier la fin du récit et malgré certains défauts qui pourraient s'avérer rédhibitoires, il n'en est pas moins certain que Cassandra est une brillante réussite. Anxiogène et poignante, la série aurait, sans ses quelques absurdes excès, mérité le titre de l'une des plus remarquable dystopies de ces dernières années...

 

LinkWithin

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...