Qu'il agisse en tant que
médecin xénophobe (The thing with two Heads
de Lee Frost), qu'il incarne un assassin ou l'époux d'une victime
dans les épisodes de la série Columbo
intitulés Faux Témoin et
Dites-le avec des fleurs
ou qu'il incarne comme ici le mari et le père protecteur d'une
famille d'américains moyens au début des années soixante, Ray
Milland fait partie de ces attachants et incunables acteurs du cinéma
bis qui traversèrent plusieurs décennies et incarnèrent nombre de
personnages dans des genres aussi divers que la comédie, le drame
(l'un allant parfois de paire avec l'autre), l'aventure, le western,
le thriller, le film de guerre ou bien même le fantastique,
l'épouvante et la science-fiction. Concernant Panic
in Year Zero !
qu'il réalisa lui-même en 1962 mais dont il confia l'écriture aux
scénaristes Jay Simms et John Morton, Ray Milland incarne Harry
Baldwin, époux d'Ann (l'actrice Jean Hagen) avec laquelle ils eurent
deux enfants devenus maintenant de grands adolescents prénommés
Rick et Karen et respectivement interprétés par Frankie Avalon et
Mary Mitchel. Le long-métrage s'inscrit dans cette grande tradition
d’œuvres paranoïaques propres au cinéma outre-atlantique et du
milieu du vingtième siècle découlant de l'anticommunisme et de la
méfiance forcenée des États-Unis vis à vis de l'URSS et de la
concordance avec la guerre froide. Tourné en noir et blanc, produit
et distribué sur le territoire américain par la société American
International Pictures,
Panic in Year Zero !
met tout d'abord en avant les propensions d'une famille et surtout de
celui qui représente en son sein l'autorité à savoir faire face à
une menace qui débute d'abord par une attaque nucléaire dont les
origines sont au demeurant inconnues ainsi qu'aux retombées
comportementales de la population dont l'attitude va de fait s'avérer
régressive. Des hommes et des femmes agissant parfois contre une
nature qui leur est propre mais qui les contraint à agir
différemment selon le degré de danger. Et c'est donc ainsi que se
positionne le héros de ce récit limpide situant donc son action en
plein cœur d'une intrigue post-apocalyptique de type
''survivaliste''. Ray Milland y décrit la nécessité de passer
outre les lois et la morale pour le bien des siens. Il devient donc
difficile de juger l'homme et ses actes sous leurs aspects
répréhensibles.
En
cela, Panic in Year Zero !
préfigure ce que d'aucun peut juger comme un comportement devenu
normal dans un contexte qui lui est sorti du strict cadre de la
normalité. À l'ère où le néo-féminisme
a tendance à vouloir couper les couilles des hommes, le film de Ray
Milland apparaîtra comme une œuvre prônant certaines valeurs
morales indiscutablement passéistes voire même, criminelles. Et
hors des nouvelles lois qui aux États-Unis allaient bientôt
permettre aux femmes de partiellement s'affranchir de l'autorité
masculine. Pourtant, Panic in Year Zero !
ne semble pas encore être près à envisager la chose de la sorte
puisque réalisateur et scénaristes renvoient l'épouse et la fille
aux tâches qui leur incombèrent jusque là : entretenir la
résidence et produire différentes tâches ménagères comme la
cuisine ou le ménage. Ray Milland appuie tant et si bien sur ce
''détail'' qu'il fait d'Ann, l'épouse du héros qu'il incarne, une
femme retranchée dans ses principes au point de faire prendre de
grands risques à la famille lors de son exode loin de Los Angeles où
eut lieu l'un des nombreux bombardements. Jean Hagen incarne donc une
épouse au caractère étonnamment crispant bien que véhiculant
d'authentiques valeurs humaines. Comme sa fille Karen d'ailleurs,
tandis qu'en face se dressent entre les deux femmes et les éventuels
dangers, les deux mâles, armés de fusils et de revolvers. Panic
in Year Zero !
conserve un rapport ténu avec la plupart des œuvres du genre. Et
même s'il ne s'inscrit pas dans un décor désertique comme dans Mad
Max 2 de
George Miller ou dans une cité détruite et ravagée par la
criminalité (voir la vague de Mockbusters
signés dans les années quatre-vingt par d'opportunistes cinéastes
italiens), le danger peut s'insinuer même au sommet d'une colline
située au beau milieu de la nature. Ray Milland va droit à
l'essentiel. Sa description du modèle rêvé de famille typiquement
américaine est vite balayée par l'intense lumière des
bombardements (symbolisés par de très rudimentaires
effets-spéciaux, il est vrai) et le réalisateur est l'un de ceux
qui posent à l'époque les bases d'un courant qui durant les
décennies suivantes ne cessera pas de faire des petits. Pas un
classique mais un très bon exemple de science-fiction
post-apocalyptique...
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