Deux ans après avoir
tourné le drame Tous les héros sont morts,
le réalisateur Joseph Sargent se tourne en 1970 vers la
science-fiction avec un long-métrage intéressant à plus d'un
titre. En effet, Colossus: The Forbin Project
(traduit chez nous sous le titre Le cerveau
d'acier)
est non seulement une belle réussite qui n'a pas trop mal vieillie
malgré son demi siècle d'âge, mais il peut également être perçu
comme le chaînon manquant entre la plupart des films mettant en
scène des machines, androïdes et autres robots ménagers et
Terminator
que réalisa en 1984 le réalisateur James Cameron. Car en effet,
comment ne pas percevoir dans cette histoire de superordinateur
chargé de défendre le pays qui l'a vu ''maître'' (en l'occurrence,
les États-Unis) les prémices de la catastrophe qui
cinématographiquement parlant aura lieu dans le futur et opposera
l'humanité à des machines de guerre dirigées par Skynet,
une intelligence artificielle elle-même créée à l'origine par la
compagnie Cyberdyne
Systems
afin d'automatiser la riposte nucléaire du pays ? Si au premier
abord le film semble bien moins ambitieux que le classique de
l'action et de la science-fiction qui sera interprété beaucoup plus
tard par Arnold Schwarzenegger, Michael Biehn et Linda Hamilton, le
scénario de Colossus: The Forbin Project n'en
est pas moins passionnant. Passée l'esthétique typée fin des
années soixante, début des années soixante-dix, on remarquera tout
d'abord la présence dans le rôle principal du docteur Charles
Forbin (qui donne d'ailleurs son nom au titre du film) de l'acteur
Eric Braeden qui depuis plus de quarante ans interprète le rôle de
Victor Newman dans le
plus célèbres des soap
Opera,
Les feux de l'amour et
qui ici, s'avère méconnaissable ! C'est bien lui qui incarne
l'homme à l'origine de la conception de Colossus,
ce superordinateur qui va très rapidement montrer des signes
d'autonomie qui dépassent de très loin ses compétences supposées.
Après avoir alerté toute l'équipe en charge du programme et
notamment le docteur Charles Forbin qui connaît mieux que quiconque
Colossus de
l'existence d'un autre superordinateur situé en Union Soviétique,
la création de Forbin exige d'être connectée avec son équivalent
européen...
Et
c'est alors là que se complexifie la situation. Car en employant un
langage simple à base de mathématiques puis passant par une forme
binaire indéchiffrable, les deux superordinateurs vont pendre le
contrôle des systèmes de défense réciproques des deux pays et
menacer l'humanité d'utiliser des missiles nucléaires si le docteur
Forbin et son homologue soviétique n'appliquent pas à la lettre
leurs recommandations. Autant dire que le cas de l'humanité se
résume à deux chose : soit Forbin et son équipe trouvent une
solution afin de reprendre le contrôle de Colossus,
soit l'humanité sera-t-elle condamnée à vivre à tout jamais sous
les ordres d'une machine... Si Colossus: The
Forbin Project
évoque évidemment le long-métrage de James Cameron, on pense
également à l'ordinateur central autonome HAL
9000 du
vaisseau spatial Discovery One de 2001, l'odyssée
de l'espace
dont l'autonomie allait s'avérer, on s'en souvient, terriblement
dramatique. Si l'humour n'est pas immédiatement perceptible dans le
long-métrage de Joseph Sargent, il n'en est peut-être pour autant
pas moins dénué, si rare puisse-t-il être. Bien que Colossus
soit capable de calculs inenvisageable par un esprit humain, son
attitude le rapproche parfois de ces jeunes enfants capricieux qui
réclament leur jouet. Mais là où les pleurs peuvent retentir sans
avoir de conséquences dramatiques, le superordinateur, lui, est
capable d'annihiler toute trace de l'espèce humaine. Le film
fourmille de seconds rôle et situe le gros de son intrigue dans une
salle de contrôle remplie d'ordinateurs où s'affairent les membres
de l'équipe formée autour du docteur Forbin. Outre la présence de
l'acteur Eric Braeden, on retrouve à l'écran Gordon Pinsent dans le
rôle du président des États-Unis, William Schallert dans celui du
directeur de la CIA, Grauber, ou encore Leonid Rostoff dans la peau
du dirigeant de L'union Soviétique. Du côté des interprètes
féminines, nous retrouvons les actrices Susan Clark (Columbo,
747 en péril
de Jack Smight) ainsi que Marion Ross qui fut notamment la mère de
Richie ''Ron Howard'' Cunningham
dans la série culte Happy Days
entre 1974 et 1984. Angoissant et nihiliste, voire même crispant,
Colossus: The Forbin Project
est un excellent film de science-fiction. Réaliste et pessimiste et
dont la fin glace les sangs...