Le dernier long-métrage
de Bruno Dumont est une expérience digne d'une métaphore évoquant
les plaisirs relativement douloureux du masochiste qui dans la
souffrance ressent un plaisir sans commune mesure avec ce
qu'éprouvent la plupart de nos semblables. On a voulu me prévenir
que l'expérience était d'un insondable ennui. Qu'il fallait ne
surtout pas espérer éprouver le même plaisir de cinéma que devant
les séries Ptit Quinquin
et Coincoin et les Z'inhumains.
Après ces deux O.F.N.I.s
télévisuels
et Ma Loute
dans lequel le cinéaste se jouait des talents d'orateur de Fabrice
Luchini pour mieux les déstructurer, le Bailleulois s'ouvre à des
champs d'expérimentation qui feraient passer ses précédents
travaux pour des œuvres abordables par n'importe quel mortel !
L'empire
dure... deux heures ! Pour une œuvre de science-fiction, rien
de plus conventionnel mais lorsque la chose est signée par Bruno
Dumont, l'on se prête à rêver qu'elle fut conçue elle aussi sous
forme de mini-série. Ne serait-ce que pour permettre aux fidèles
spectateurs du cinéaste et sans doute davantage aux autres de
pouvoir souffler entre chaque épisode. Car d'une manière générale,
le dernier long-métrage de cet auteur très attaché à sa région
des Hauts de
France
est une épreuve parfois et même, très souvent, difficile à
digérer dans son ensemble. Une œuvre contradictoire et qui par
conséquent, chicane en permanence avec la plupart des tentatives
qu'entreprend le réalisateur et scénariste. Parodie ou non de Star
Wars
à la sauce française, pour celles et ceux qui vivent sous la
frontière de l'ancien Nord-Pas-de-Calais, la plupart des héros de
ce récit dont on continuera longtemps de se demander qui sont les
gentils et qui sont les méchants demeureront des freaks dont les
différences d'ordre comportemental ou physique auront bien du mal à
se faire justice. Science-fiction, histoire d'amour improbable entre
membres de clans adverses, la proposition est aussi innovante
qu'anarchique. Le problème survenant évidemment au niveau de
l'écriture, aussi fine que le tranchant d'une lame de rasoir sur
laquelle se risquent Fabrice Luchini, donc, mais également Camille
Cottin, laquelle semble ici avoir étrangement régressé dans ses
talents d'interprète. Un Dark Vador accoutré comme le bouffon d'un
roi venu d'une lointaine planète, Fabrice Luchini ne fait plus rire.
En
tout cas, bien moins que dans Ma Loute
dans lequel son contre-emploi avait tendance à créer un certain
nombre de situations comiques franchement réussies. Dans le cas de
L'empire,
l'acteur semble se singer comme lors de ses pires exhibitions
télévisuelles. Quant à elle, Camille Cottin est si transparente
que sa présence à l'image a autant d'intérêt que ces figurants
pourtant montés sur de majestueux chevaux. Anamaria Vartolomei
apparaît comme la seule interprète a vouloir offrir au cinéaste la
petite étendue de ses talents. Et l'on ne parle pas là
exclusivement de sa plastique qu'elle dévoile à une ou deux
occasions mais son interprétation vaut largement celle des ''stars''
convoquées pour l'aventure, sans parler de ce florilèges d'acteurs
amateurs qui trônent pourtant presque au sommet du casting. Débutant
au cinéma, ce sera peut-être là la seule occasion pour Brandon
Vlieghe de ''briller'' devant la caméra. Dans le rôle de Jony, il
incarne le père d'un bébé convoité par des extraterrestres et
considéré comme le Mal incarné. S'engage alors une drôle de
bataille entre diverses races dont, la faute au scénario, on ne sait
jamais vraiment de quelle espèce ils font partie. Bruno Dumont
divise la France en deux comme le football sépare Marseille du reste
de l'hexagone ! En dehors des Hauts-de
-France l'on entend déjà les rires gras de ceux qui considéreront les habitants du cru comme des bêtas, des incultes à l'accent à couper au couteau. Mais dont la sincérité est pourtant très touchante. Tout ce petit monde que l'on découvre pour la première fois ou non (Bernard Pruvost reprend de manière très symbolique et donc particulièrement anecdotique le personnage du Commandant Van der Weyden qu'il incarnait dans les deux précédentes séries de Bruno Dumont) a beau parfois engendrer rires et remarques narquoises, leur présence est justement ce qui fait le sel et la particularité de l’œuvre du cinéaste. Ensuite, n'ayons pas peur des mots : le long-métrage de Bruno Dumont connaîtra malgré tout un authentique état de grâce qui s'étirera sur plus de cinq longues minutes lors de la dernière partie. Prouvant qu'avec un scénario solide, le réalisateur français aurait pu signer rien moins que l'une des œuvres de science-fiction françaises parmi les plus importantes de ces trente ou quarante dernières années. Malheureusement, le film retombe ensuite dans ses travers. Ne demeure au final qu'une expérience aussi déstabilisante que, disons-le, chiante à mourir. Dommage...
-France l'on entend déjà les rires gras de ceux qui considéreront les habitants du cru comme des bêtas, des incultes à l'accent à couper au couteau. Mais dont la sincérité est pourtant très touchante. Tout ce petit monde que l'on découvre pour la première fois ou non (Bernard Pruvost reprend de manière très symbolique et donc particulièrement anecdotique le personnage du Commandant Van der Weyden qu'il incarnait dans les deux précédentes séries de Bruno Dumont) a beau parfois engendrer rires et remarques narquoises, leur présence est justement ce qui fait le sel et la particularité de l’œuvre du cinéaste. Ensuite, n'ayons pas peur des mots : le long-métrage de Bruno Dumont connaîtra malgré tout un authentique état de grâce qui s'étirera sur plus de cinq longues minutes lors de la dernière partie. Prouvant qu'avec un scénario solide, le réalisateur français aurait pu signer rien moins que l'une des œuvres de science-fiction françaises parmi les plus importantes de ces trente ou quarante dernières années. Malheureusement, le film retombe ensuite dans ses travers. Ne demeure au final qu'une expérience aussi déstabilisante que, disons-le, chiante à mourir. Dommage...