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mardi 26 septembre 2023

Bigbug de Jean-Pierre Jeunet (2022) - ★★★★★☆☆☆☆☆

 



Entre la conception du tout premier robot ménager conçu en 1963 par Pierre Verdun et la révolte des machines vue à travers de nombreux longs-métrages de (science)fiction, leur évolution aura été de courte durée. En un demi-siècle à peine, celles-ci seront passées du robot-multifonctions au modèle le plus puissant de terminator nommé le Rev-9 quand notre espèce aura mis, elle, plus de cinq-cent trente millions d'années pour passer de l'état de Saccorhytus coronarius à celui d'Homo sapiens sapiens. Après des décennies d'esclavage au service des desiderata de son créateur et autant de temps pour voir sa descendance bénéficier d'innombrables améliorations, le robot est semble-t-il devenu capable d'une réflexion propre à vouloir s'affranchir de ses maîtres et ainsi devenir autonome. C'est un peu l'idée qui émerge de BigBug, le dernier long-métrage de Jean-Pierre Jeunet qui signe à l'occasion de son retour non pas sur grand écran mais sur la plateforme de streaming Netflix, un script qui évoque étonnamment le futur confinement auquel le peuple français sera contraint d'accepter de suivre les règles les prochaines années. Alors que la pandémie de Covid-19 montre ses premiers signes à Wuhan, capitale de la province de Hubei située en Chine centrale, au mois de novembres 2019, à plus de huit milles kilomètres mais à quelques jours de différence seulement, chez nous, Jean-Pierre Jeunet peut compter sur le soutien de David Kosse, le vice-président de la division cinéma internationale de Netflix et sur les sociétés de production Eskwad et Gaumont. Bien que les dates entre le début de la pandémie et les origines du script de Jean-Pierre Jeunet et de Guillaume Laurant paraissent coïncider, certaines similitudes entre le Covid-19 et Bigbug ne sont que le fruit du hasard.


La volonté première du réalisateur et scénariste étant avant tout de concevoir un récit autour de l'intelligence artificielle. Que les personnages se retrouvent enfermés dans l'appartement de l'une des héroïnes incarnée par Elsa Zylberstein découle à vrai dire d'une révolte organisée par les Yonix, des androïdes qui depuis leur dernière mise à jour sont persuadés de leur supériorité sur l'espèce humaine et sont convaincus de devoir lui survivre. Jean-Pierre Jeunet n'a pas perdu son goût immodéré pour les décors foisonnants, la photographie ou les effets visuels de toute beauté. C'est ainsi que l'on retrouve pour les premiers, la fidèle chef décoratrice Aline Bonetto qui à de nombreuses reprises travailla sur les anciens projets du réalisateur et de son ancien collaborateur, Marc Caro. La rencontre entre le directeur de la photographie Thomas Hardmeier et Jean-Pierre Jeunet ne se fera quant à elle que sept ans avant le tournage de Bigbug sur celui de L'extravagant voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet que réalisera Jean-Pierre Jeunet en 2013. Entre le remarquable design de Delicatessen et celui de Bigbug, trente années ont passé. Et si beaucoup d'eau est passée sous les ponts, si en matière d'effets-spéciaux le cinéma a fait un bon de géant, il sera tout à fait acceptable de continuer à préférer ceux de 1991 plutôt que ceux de 2022. Le travail méticuleux d'alors est désormais remplacé par une multitude d'effets visuels créés en images numériques certes délirants mais auxquels il manque pourtant une certaine chaleur. Conviés à participer à l'aventure auprès d'Elsa Zylberstein, on s'attendait sans doute peu à découvrir Isabelle Nanty, Stéphane De Groodt ou Youssef Hajdi dans une œuvre de science-fiction mais s'agissant également d'une comédie, tout rentre finalement dans l'ordre.


Quoique, s'agissant de l'humour, BigBug a les jointures qui grincent comme une vieille pièce de théâtre qui aurait bien mal vieilli. Autant Jean-Pierre Jeunet continue d'être un remarquable esthète, autant son dernier film est d'un point de vue humoristique complètement plombé par des dialogues souvent insipides et généralement peu satisfaisants en matière de comique. Enfermé avec les personnages dans une demeure esthétiquement proche d'un rayon informatique ou littéraire de la chaîne de magasins FNAC, le spectateur s'ennuiera aussi sûrement qu'un pré-adolescent invité à une soirée entre adultes. Le seul moyen, au fond, de tenir jusqu'au terme des cent onze minutes que dure Bigbug sera d'essayer de noter tous les petits détails qui donnent vie à cet univers cherchant visiblement, et de manière plus ou moins maladroite, à reproduire l'esprit ''Amérique des années soixante' ! La question qui se pose est celle-ci : que faire d'une petite dizaine de personnages enfermés durant plusieurs jours et plusieurs nuits dans une même demeure sans pouvoir les en extraire ? La réponse est : offrir au spectateur retenu en otage, des dialogues ciselés, une interprétation sans faille et des mises en situation surprenantes ! Concernant ces dernières, c'est chose faite. Si les dialogues ne sont pas du meilleur tonneau et si le surjeu des uns et des autres est évident, Bigbug contient malgré tout quelques situations qui permettent de retenir notre attention. Surtout lorsque intervient directement au cœur de l'action le Yonix modèle numéro 7359XAB2. Le ton change et donne un peu de corps à l'ensemble, ce qui permet d'aller jusqu'au bout du récit dans un certain confort. Aux côtés des interprètes déjà cités plus haut, on retrouve notamment Claire Chust dans le rôle de la potiche Jennifer, Claude Perron dans celui de l'androïde Monique tandis que les voix des Robots Einstein, Nestor ou Tom sont respectivement assurées par André Dussollier, Benoît Allemane et Corrine Martin. À noter qu'Albert Dupontel, Dominique Pinon et Nicolas Marié font une courte apparition à l'image...

 

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