''Sur les causes et
les motifs qui menèrent à la fin, on aurait pu écrire des
chapitres entiers dans des livres d'histoire... Mais après la fin,
aucun livre ne fut plus écrit''...
Mais un film, lui, prit la relève et nous conta ce qu'il advint de
notre planète et de son humanité après qu'un étrange fléau ait
mis fin à toute civilisation... Il semblerait que depuis peu, le
cinéma fantastique, horrifique et de science-fiction italien
connaisse une résurgence comme l'a récemment souligné avec une
indiscutable crédibilité, le chef-d’œuvre de Gabriele Mainetti.
Freaks Out.
Serait-ce au tour du réalisateur Claudio Cupellini de nous prouver à
nouveau que le bon côté de la chose se situe désormais dans le
camp de celles et ceux qui s'expriment AUSSI avec leurs mains ? Ce
long-métrage dont on attend probablement (ou bien sans doute) un peu
trop s'intitule La Terra dei Figli (Le
pays des enfants).
L'espoir se trouve peut-être à quelques années de distance dans un
futur que dépeint cette œuvre de science-fiction post-apocalyptique
rendue disponible en VOD
depuis hier. CRAINTE... Car a priori l'on assiste à une boucle
temporelle qui indéfiniment ramène toujours le cinéma au point de
départ. De ces univers qui dépeignent un monde dévasté, où
l'homme, quelque soit sa constitution, tente de survivre par ses
propres moyens. Avec plus ou moins de rage ou de sagesse. Le pays de
la mozzarella di bufala, du carpaccio ou des lasagnes est un habitué
ancestral de ce sous-genre qui dans les années quatre-vingt
notamment, a donné naissance à une progéniture parfois informe
mais dont une grande majorité de ses exemplaires a gagné ses
galons de films cultes ! Aujourd'hui, reproduire ces
miraculeuses bobines est mission pratiquement impossible. Seuls des
ersatz survitaminés, bourrés de CGI
mal fagotés, tentent de reproduire la recette sans jamais y
parvenir. Manque des ingrédients devenus introuvables qui portaient,
au hasard, les noms devenus d'une certaine manière, ''prestigieux'',
de Bruno Mattei (Les rats de Manhattan),
Sergio Martino (2019, après la chute de New
York)
ou Enzo G. Castellari (Les guerriers du
Bronx)...
et la liste est encore longue...
Mais
trêve d'incertitude et de bavardages et place à l'action. Claudio
Cupellini nous épargne malheureusement d'emblée ces mastodontes de
verre, de béton et d'acier qui trônèrent au centre des grandes
villes, désormais bouffés par une mère Nature redessinant ses
propres contours comme une multitude de cancers en phase terminale.
Ici, c'est la mer, à perte de vue, précédée par une plage de
sable fin jonchée de bois flottants. Puis s'invitent des marécages
et quelques bâtisses rudimentaires. Image léchée mais tonalités
automnales. La Terra dei Figli se
situe dans un tempo qui s'éloigne drastiquement de ce que l'on avait
l'habitude de voir quarante ans en arrière. Y domine alors la
contemplation. Un univers quasi figé, prostré dans la solitude de
sa poignée de protagonistes. Va s'y jouer alors le destin d'un gamin
dont le père vient tout juste de disparaître (au sens propre comme
au figuré) et qui derrière lui a laissé un carnet de notes.
Problème, le jeune ''Il
figlio''
qu'interprète l'acteur Leon de la Vallée est illettré et n'est
donc pas en mesure de déchiffrer son contenu. Désormais laissé à
l'abandon dans un univers potentiellement hostile, l'adolescent
décide de quitter le lieu de vie qu'il partageait jusque là avec
son père pour découvrir le monde. Une initiation qui aura notamment
pour but de trouver sur sa route, celui ou celle qui sera en mesure
de lui révéler ce que contient le carnet de notes de son père.
Voyage en terres désolées, dans un univers post-apocalyptique et
ouvrage en main, on croirait presque le scénario de Claudio
Cupellini, Guido Iuculano et Filippo Gravino inspiré par le
formidable Livre d'Eli
des frères Albert et Allen Hughes et par leurs scénaristes Gary
Whitta et Anthony Peckham. Et pourtant, rien de commun puisque La
Terra dei Figli est
en réalité une adaptation du roman graphique La
Terre des Fils
de Gipi...
Si
le rythme très particulier risque de miner l'intérêt des fans de
science-fiction post-apocalyptique italienne de la première heure,
ce sera sans doute parce que le réalisateur italien a préféré au
sensationnel, choisir une approche plus personnelle et intimiste.
Ici, rien de chaotique ni de survolté. Le réalisateur australien
George Miller peut dormir sur ses deux oreilles puisque La
Terra dei Figli n'est
pas de ces œuvres ultra nerveuses et forcément barbares. À force
de boire son café sans sucre, on n'en perçoit plus l'amertume. Et
bien, c'est ici tout le contraire. Balayé par le vent et écrasé
par des couches de nuages successives, le film de Claudio Cupellini
s'octroie tout de même quelques moments d'intense péripéties qui
ne transformeront pourtant pas finalement l’œuvre en un objet tout
à fait remarquable. Entre quête de réponses et désespérance, il
manque peut-être un crescendo qui aurait permis de faire avancer le
récit vers une stupéfiante conclusion. Bouleversée mais pas
bouleversante, la tragédie qui entoure la jeune Maria (l'actrice
Maria Roveran) arrive sans doute trop précipitamment. En tout cas,
bien trop tôt pour que la caractérisation du personnage permette
une réelle empathie vis à vis du spectateur. Pour être tout à
fait honnête,ceux qui pensaient que le film manquait de ces quelques
éléments qui constituent l'essentiel de ce genre de projet, le
voyage ne se fera pas tout à fait sans heurts. Il arrivera même à
La Terra dei Figli
d'être touchant, certes dans de toutes petites proportions. Une
émotion qui pourra se présenter sous la forme d'un homme au visage
sans doute abîmé par ce fléau qui détruisit toute civilisation.
Au point de regretter que le superbe violoncelle qui accompagne la
composition musicale de Francesco Motta n'ait pas marqué plus
intensément les aventures du jeune héros. Si le film avait
bénéficié dans de plus larges proportions du climat troublant que
revêt cette séquence, sans doute aurait-il pu prétendre au titre
de l'une des grandes œuvres de science-fiction de l'année 2022.
Malheureusement, et malgré ses qualités, La
Terra dei Figli
risque de s'oublier relativement vite...
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire