L'enfance diabolique est
un thème récurrent au cinéma. Il y a pris différentes formes. De
l'emprise sur son esprit par le Diable ou tout autre manifestation
venue des Enfers en passant par divers phénomènes liés aux ovnis
et autres extraterrestres, nos chères petites têtes blondes sont
manifestement capables de générer la peur de manière aussi
crédible que les adultes. Ces enfants possèdent un avantage dont le
poids pèse très lourd dans la balance qui les oppose à n'importe
qu'elle autre menace. Et cet avantage est justement leur âge qui au
moins dans le cas qui nous préoccupe ici leur permet de s'assurer
une certaine distance de la part des adultes vis à vis de leurs
actes. Car en effet, quoi pourrait concevoir un instant l'idée de
tuer un enfant ? Et qui plus est, dans le cas présent, non pas
un mais six...
L’œuvre d'Anton Leader
est une réflexion sur le pouvoir de destruction de l'homme et sur
l'une des seules voies capables d’éradiquer son espèce. Le
message délivré par ces cinq enfants issus de pays et de cultures
différentes n'est pas toujours très clair, le cinéaste préférant
la majeure partie du temps les enfermer dans le mutisme, leur offrant
dans de rares occasions l'opportunité de s'adresser au monde des
adultes à travers les lèvres de Susan Eliot (interprétée par
l'actrice Barbara Ferris), la tante de Paul, l'un des six enfants.
Si l'on retrouve
plusieurs éléments du classique de Wolf Rilla sorti trois ans
auparavant en 1960, le long-métrage d'Anton Leader n'a en réalité
rien à voir avec Village of the Damned.
Pourtant, tout ou presque semblait rapprocher ces deux films. Des
enfants qui peu ou prou sont similaires et dans leur comportement, et
dans leur apparence. Une attitude inquiétante, silencieuse. Des
gamins exceptionnellement intelligents dont les intentions réelles
restent à démontrer. Children of the Damned
ne laisse qu'une très petite porte d'entrée devant l'éventualité
d'une intervention divine ou extraterrestre. Pourtant, le fait même
que la mère de chacun de ces six enfants l'ait conçu sans la
présence d'un individu de sexe masculin laisse supposer l'une ou
l'autre.
Approchés
par des scientifiques, les six enfants sont l'objet d'études qui
laissent envisager plusieurs hypothèses comme le processus
d'évolution cher à Darwin ou la parthénogenèse, ou, division à
partir d'un gamète femelle non fécondé, ce qui consiste en la
conception d'un enfant sans l'intervention du mâle. Tourné en noir
et blanc, Children of the Damned n'a
pas vraiment à rougir devant le classique dont il semble ouvertement
s'inspirer autrement que lors de la trop longue séquence se
déroulant dans l'église (ce qui laisserait donc définitivement
supposer une intervention divine?). Le scénario de John Briley y
montre en effet ses faiblesses et la vacuité de son propos qui
laisse un fossé immense entre les agissements des six enfants et les
véritables raisons de leur présence. C'est donc de manière tout à
fait personnelle qu'il faut voir dans la symbolique qui unit ces
enfants jusque dans la mort, un message à l'encontre d'une humanité
qui sacrifie sa progéniture à travers d'immémoriaux conflits
territoriaux ou religieux. À décharge pour le cinéaste
britannique, sa vision nihiliste est assez peu courante pour une
œuvre de cinéma datant du début des années soixante. Un nihilisme
qui va jusqu'à emporter dans la tourmente de jeunes enfants qui
n'ont même pas encore atteint l'âge de l'adolescence. Un petit film
de science-fiction et d'épouvante ni vraiment raté, ni vraiment
effrayant, mais plutôt agréable à regarder. On lui préférera
tout de même le Village of the Damned
de Wolf Rilla ou le remake réalisé bien des années plus tard par
le cinéaste américain John Carpenter...