Une expérience
captivante est-elle pour autant forcément concluante ? C'est la
question que pose Somnium,
le tout premier long-métrage réalisé, écrit et produit par
l'américaine Racheal Cain qui après avoir étudié au College
of Motion Picture Arts
de la Florida
State University s'est
installée à Austin, au Texas. Pour sa première expérience au
format long, Rachael Cain crée un univers qui n'est pas loin de se
rapprocher de celui de David Lynch qui de son propre aveu est l'une
de ses principales sources d'inspiration. Pourtant contrainte à
mettre en scène son héroïne avec de faibles moyens budgétaires
ayant reposé sur une campagne de crowdfunding lancée en 2018, la
cinéaste réussit le tour de force de produire une œuvre qui sort
des sentiers battus et qui malgré quelques défauts parvient à
captiver. Ayant débuté le tournage en regroupant toutes les
séquences de flash-back en 2018, Rachael Cain patientera trois
années supplémentaires avant de tourner celles situées dans le
présent. Totalement indépendante et ayant donc la possibilité
d'avoir un contrôle total sur le projet, seules ses influences
semblent lui avoir permis de mettre en scène ce curieux exercice de
style, entre science-fiction, épouvante et drame. Une mise en abyme
du métier d'actrice principalement interprétée par Chloë Levine,
choisie sur les conseils de la directrice de casting qui avant cela
s'était notamment fait remarquer dans le très intriguant The
Transfiguration
de Michael O'Shea qui en 2017 traitait de manière fort originale de
l'adolescence, de la violence et... du vampirisme ! Actrice
originaire du New Jersey, Chloë Levine incarne ici le rôle de
Gemma. Portrait d'une jeune américaine moyenne vouée à reprendre
le restaurant familial mais dont les projets sont tout autres. En
effet, se rêvant actrice et après s'être séparée de son petit
ami Hunter dont elle était très amoureuse (l'acteur Peter Vack),
Gemma prend un aller simple pour Los Angeles dans l'espoir de passer
des castings et ainsi décrocher un rôle. Mais en attendant, la
jeune femme doit tout d'abord s'assurer de ne pas se retrouver à la
rue et loue un petit appartement dont elle va payer le loyer en
travaillant de nuit dans une obscure entreprise du nom de Somnium.
Une clinique spécialisée dans le rêve et permettant à ses clients
d'améliorer leur vie. Transformant ainsi leurs projections mentales
en réalité. Un protocole long de six semaines qui peut être en cas
d'urgence réduit à neuf heures dans le cas du projet Cloud
Nine !
L'on
observe plusieurs choses. Somnium est
traversé de nombreux flash-back introduisant le personnage de
Hunter. Définissant ainsi certains choix, entre celui de rester bien
à l'abri du cocon familial ou celui de tout mettre en œuvre pour
vivre son rêve loin de chez soit. C'est donc à la suite d'une
rupture sentimentale que l'héroïne quitte tout pour aller tenter sa
chance à Los Angeles. Le rêve, ici, prend différentes formes.
Allant du couple entre ambition et optimiste jusqu'au protocole Cloud
Nine.
Intervient alors un personnage secondaire dont la présence est
théoriquement fondamentale si l'on veut comprendre le sens de
certaines séquences : Noah (Will Peltz), ce concepteur
informatique de génie à l'origine du programme Somnium.
Mais là où les choses ne sont plus très claires et donc se
compliquent c'est lorsque interviennent chez Gemma certaines
''visions'' cauchemardesques. Car si la frontière entre flash-back,
temps présent, réalité et fiction sont dilués dans une mise en
scène et un montage qui forcent parfois la concentration du
spectateur, la plongée dans le monde des rêves n'est pas toujours
facile à identifier. Contrairement à l'univers de Total
Recall
de Paul Verhoeven qui déjà près de quarante ans en arrière
abordait de manière beaucoup plus ''sensationnelle'' le sujet
central de Somnium,
ici tout semble se mélanger, s'amalgamer afin de confondre la
réalité et la fiction dans un désordre scénaristique généralisé.
En effet, si l'on observe que Gemma n'est utilisée comme cobaye par
Noah que vers la fin du récit, comment peuvent s'expliquer les
différentes phases ''paranoïaques'' dont elle est rapidement là
victime ? En outre, la jeune femme semble être la seule à
prendre conscience durant cette expérience forcée de rêves
intenses que rien n'est véritablement réel ! Si l'entreprise
de la cinéaste est louable, des trous dans le récit viennent briser
la colonne vertébrale du script. Comme l'idée pourtant alléchante
d'un programme qui permettrait d'améliorer l'existence d'individus à
travers des rêves mais qui logiquement, une fois retournés à leur
vie quotidienne seraient contraints de faire face aux turpitudes de
leur existence... Malgré des défauts qui pourraient paraître
rédhibitoires, Somnium
demeure une sympathique expérience, moins sensorielle qu'espéré
mais incarnée par une Chloë Levine épatante, joviale, enjouée,
souriante, si ce ne sont ces instants de terreur que Rachael Cain
n'arrive pourtant malheureusement pas à concrétiser...

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