Chasse à l'homme contre
chasse à l'homme. D'un côté, le blockbuster américain d'Edgar
Wright The Running Man et de l'autre, le franco-belge
Les tourmentés
de Lucas Belvaux. Commençons dans ce premier article avec le film du
cinéaste britannique. Si à priori les cinq millions de budget du
second n'ont aucune chance face aux cent-dix du premier, n'allons
tout de même pas trop vite en besogne... En préambule, je me dois
d'être tout à fait honnête en reconnaissant que la première
adaptation du roman de Stephen King sous le pseudonyme de Richard
Bachman datant de 1987 ne m'a jamais fait ni chaud, ni froid. Pour un
budget qui à l'époque était au demeurant fort conséquent (27
millions de billets verts), le Running Man
de Paul Michael ''Starsky''
Glaser avait tout du bon gros nanar financièrement survitaminé. Et
c'est un ancien fan de l'écrivain qui vous le dit... Engagé à
l'époque pour tenir le rôle principal de Ben Richards, l'acteur
Arnold Schwarzenegger était le candidat idéal pour incarner le
héros quasi-inexpressif d'une œuvre de science-fiction et
d'anticipation bourrée d'énergie mais manquant foncièrement de
profondeur sociologique ! Près de quarante ans plus tard,
l'auteur du génial Shaun of the Dead,
de Hot Fuzz,
du Dernier pub avant la fin du monde
ou du surévalué Baby Driver
revient au cinéma avec SA vision du roman de l'écrivain américain.
Une expérience de plus de cent-vingt minutes qui ne réconciliera
certainement pas les amateurs de pétarades visuelles et sonores et
les spectateurs dont les exigences ne s'arrêtent pas au simple
afflux ininterrompu d'effets-spéciaux numériques. Après une
bande-annonce qui autrement que de m'avoir alléché les babines les
avaient rendues totalement exsangues, j'étais certain de passer un
moment long, pénible et assourdissant en me rendant dans la première
salle de cinéma projetant le film. Et pourtant, toujours ivre de
découvrir LA dernière adaptation de mon idole d'adolescence malgré
de nombreuses déconvenues (Maximum Overdrive,
qui fut réalisé par ses soins en 1986, les mini-séries Le
fléau
de Mick Garris en 1994 et Shining
en 1997, le catastrophique La tour sombre
de Nikolaj Arcel ou encore Doctor Sleep
de Mike Flanagan), j'ai donc fait l'effort de me rendre au cinéma
pour en ressortir deux heures plus tard en passant par la petite
porte de secours. M'assurant que personne ne m'avait vu me faufiler
ce jour-ci dans la salle projetant ce The Running
Man
qui pour moi demeurera de triste mémoire...
Tout
comme Baby Driver
voilà huit ans, le dernier long-métrage d'Edgar Wright n'est rien
de plus, rien de moins qu'un énorme coup d'esbroufe. Jouant la carte
de la surenchère, avec sa bande musicale aussi tonitruante
qu'insupportable et dont les effets contraires au plus efficace des
antiémétiques
sont
incroyablement redoutables,
The Running Man
est tout ce que je déteste. Éludant dans les grandes largeurs le
message socio-politique s'agissant du fossé qui sépare le monde en
deux, entre l'élite et ceux qui vivent dans la pauvreté, ainsi que
le concept vu et revu des dizaines de fois consistant à transformer
notre univers en une arène télévisée où pour survivre, l'homme
accepte de s'exposer dans des jeux de mort afin d'assurer son avenir
et celui des siens sont réduits à peau de chagrin. Glen Powell
reprend donc ainsi le rôle tenu par Arnold Schwarzenegger. Cette
fois-ci, au moins, le personnage est enfin capable d'émotions. Ce
que tend par contre à lourdement démontrer Edgar Wright en
surexploitant le caractère volubile et agressif de son principal
protagoniste. Si dans les grandes lignes le film d'origine et son
remake reposent effectivement sur un même concept, la version 2025
cache les limites de l'adaptation d'Edgar Wright et du scénariste
Michael Bacall derrière un spectacle certes permanent mais aussi et
surtout très superficiel. Tandis qu'en 1987 l'acteur Richard Dawson
était parvenu à rendre véritablement concret l'ordure qu'était le
personnage de l'animateur du show Damon Kilian,
l'afro-américanisation du personnage cette fois-ci remplacé par
l'acteur Colman Domingo n'est pas un service rendu à ce dernier tant
son incarnation est transparente face à celle de Josh Brolin, lequel
interprète le rôle de l'infâme créateur du jeu, Dan Killian. En
réduisant l'unité de temps à quelques heures, Paul Michael Glaser
et le scénariste Steven E. de Souza produisirent la meilleure idée
du long-métrage d'origine tandis que le récit de la version 2025 se
perd dans des ellipses temporelles qui fonctionnent atrocement mal.
Si le schéma général de l'histoire originelle est ici reproduit
plus fidèlement qu'en 1987, Edgar Wright tente d'élargir le spectre
du sujet en ajoutant d'innombrables instants de bravoure aussi
futiles qu'adolescents. Bref, beaucoup de bruit pour pas grand chose
et une énième adaptation pâlichonne de Stephen King, un mois et
demi après la sortie du très moyen Marche
ou crève
de Francis Lawrence...
.png)
.png)
.png)