vendredi 27 septembre 2024

The Ark - Saison 1 de Dean Devlin et Jonathan Glassner (2023) - ★★★★★★★☆☆☆

 


 

En 2119, la vie sur Terre est devenue impossible. C'est pourquoi l'humanité est condamnée à aller vivre loin du système solaire, sur une planète du nom de Proxima B. Afin de mettre à bien ce projet de colonisation, Un vaisseau, l'Arche 1, est envoyé dans l'espace avec à son bord plus de quatre-cent hommes et femmes dont une majorité n'a pas trente ans. Durant les premiers mois du voyage, un très grave incident se produit et une partie de l'équipage meurt. Parmi les victimes se trouvent tous les plus éminents membres du personnel. Afin de pallier à leur tragique disparition, un nouveau commandement est formé et à la tête duquel va immédiatement s'imposer le lieutenant Sharon Garnet. Problème : alors que l'Arche doit atteindre sa destination dans un an, l'équipage qui avait été placé sous stase cryogénique est désormais réveillé et va devoir survivre malgré des stocks alimentaires et une réserve en eau insuffisants... Série de science-fiction qui à ce jour compte deux saisons, The Ark est diffusé depuis le 1er février 2023 sur Syfy. Tournée à Belgrade, en Serbie, la première saison est constituée de douze épisodes de trois-quart d'heure environ. Mêlant science-fiction sur fond de dystopie, cette création de Dean Devlin et Jonathan Glassner ''bénéficie'' d'une réputation généralement peu flatteuse. On lui reproche en effet notamment son manque d'inspiration. Il faut dire que dans ce type de space-opera réunissant des centaines d'individus censés coloniser une nouvelle planète, le concept n'est évidemment pas nouveau. Mais ce qui saute avant tout aux yeux dès les premiers instants, c'est la faible qualité des effets-spéciaux. Leur indigence est tout d'abord telle que l'on peut aisément ressentir un certain détachement vis à vis de cette première saison. La catastrophe à laquelle sont confrontés les passagers de l'Arche 1 est très significative du problème que rencontre la série du point de vue des effets. Passé ce détail relativement gênant, The Arch va cependant devenir très rapidement prenant.


Ses créateurs prenant ainsi soin de leurs personnages en leur offrant une caractérisation qui dépasse de très loin celle de pas mal de séries ou longs-métrages du genre. Sans être exemplaire dans ce domaine, pour autant, Dean Devlin et Jonathan Glassner parviennent à rendre attachants des personnages tels que le lieutenant James Brice (Richard Fleeschman), Alicia Nevins (Stacey Michelle Read) ou Angus Medford (Ryan Adams) bien qu'au démarrage l'on puisse être immédiatement agacé par l'attitude légèrement désinvolte du premier et l'aspect hautement caricatural des deux autres (Alicia ayant un débit de parole relativement épuisant). Mais ce qui définit assez bien le caractère des divers protagonistes est le soin avec lequel les créateurs ont choisit de développer peu à peu leur personnalité. Qu'il s'agisse de trahison ou d'intégrité, tous les types de caractères sont ici retranscrits dans un tourbillons d'événements qui ne laissent pratiquement jamais au spectateur l'occasion de se reposer. Si selon certains cette première saison manque d'inspiration, elle n'est cependant pas avare en terme de situations catastrophiques. D'autres lui reprocheront sans doute d'ailleurs cette avalanche improbable de faits qui mettent en permanence l'équipage en danger et, comme si cela ne suffisait pas, intègre des personnages défiant également l'autorité. Au final, l'on oublie très vite les carences en matière d'effets-spéciaux pour se concentrer sur l'intrigue et ses personnages. Sans être du niveau de l'une des références en matière de space-opera, la saison 1 de The Arch est plus proche d'un Star Trek que d'une série ou d'un long-métrage de science-fiction nihiliste plongeant ses protagonistes dans un univers sombre et anxiogène. Reprenant le concept de la série de science-fiction canadienne The Starlost qui cinquante ans auparavant évoquait déjà le concept de colonisation d'une planète après que la Terre soit devenue invivable, The Arch est contrairement à ce que beaucoup veulent faire entendre une excellente surprise si tant est que l'on soit capable de fermer les yeux sur l'invraisemblance d'une telle débauche d'événements. Les acteurs sont convaincants et la série est véritablement addictive. Comme l'on pouvait l'imaginer, une saison deux sera mise en chantier l'année suivante et sera mise à disposition des téléspectateurs à partir du 17 juillet 2024...

 

dimanche 15 septembre 2024

Galactica, la bataille de l'espace de Richard A. Colla (1978) - ★★★★★★☆☆☆☆

 


 

Après le succès de La guerre des étoiles de George Lucas sur grand écran en 1977, il était logique de voir débarquer divers avatars à travers la planète. Et ce, jusqu'au Japon qui vit éclore l'une des plus fameuses séries de science-fiction intitulée San Ku Kaï que les téléspectateurs français découvrirent pour la première fois dès le 15 septembre 1979 sur Antenne 2. Réalisée par Minoru Yamada sur la base du manga Uchu Kara no Messeji : Ginga Taisen créé par le mangaka Shōtarō Ishinomori, cette série constituée de vingt-sept épisode ne sera pas la seule à devenir mythique pour le public de l'époque puisque outre-atlantique verra le jour en 1978, Galactica. Une série américaine constituée d'un épisode pilote et de vingt et un autres. Dix épisodes supplémentaires seront crées deux ans plus tard sous le titre Galactica 1980. Au même titre que L'âge de cristal , Cosmos 1999 ou Buck Rogers, la série de Glen A. Larson a donné lieu à un univers fantasmagorique des plus dépaysant même si de nos jours les progrès en matière d'effets-spéciaux ont rendu presque caduques ceux de l'époque. Il n'empêche que pour les cinquantenaires, redécouvrir Galactica aujourd'hui ravivra de doux et merveilleux souvenirs. N'en déplaise à celles et ceux qui ne connaissent de la franchise que le reboot Battlestar Galactica développée en 2004 par le scénariste et producteur Ronald D. Moore. Mais pour en revenir à la série d'origine, il faut savoir que le triple épisode-pilote qui fut conçu au tout départ connut une sortie dans les salles de cinéma sous le titre Galactica, la bataille de l'espace. Plus de deux heures de grand spectacle jouissivement kitsch lors duquel nous retrouvons les légendaires Commandant Adama, capitaine Apollo ainsi que les lieutenant Starbuck et Boomer, tous les quatre étant respectivement interprétés par Lome Greene, Richard Hatch, Dirk Benedict (également connu pour avoir incarné le rôle de Templeton Peck dans la série Agence tous risques) et Herbert Jefferson. Kitsch, certes, mais pas totalement ringard, le long-métrage de Richard A. Colla mettait déjà en scène des colonies humaines face à leur pire ennemi : les Cylons.


Une race extraterrestre qui à l'origine était une espèce reptilienne ayant conçu des machines ayant pris le dessus sur leurs créateurs. Après les avoir exterminé, ils reprirent le nom de ceux-ci et décidèrent de mener une guerre sans fin face aux humains qui eurent l'outrecuidance de venir en aide à leurs voisins et ennemis, les Hazarys. Dans Galactica, la bataille de l'espace, Richard A. Colla ne fait vraiment pas dans la demi-mesure puisque son hostile armée de robots très vraisemblablement inspirés par les Stormtroopers de La guerre des étoiles va éradiquer la quasi totalité des colonies humaines dont les grands responsables auront tardé à réagir en ne voulant naïvement pas croire que l'arrivée d'une immense armada de vaisseaux Cylons pouvait faire prendre un risque aux colonies humaines. L'on retrouve donc de nombreuses batailles spatiales, plutôt bien conçues, mais dont la technicité reste malgré tout plus proche de celle de San Ku Kai (la rotation des vaisseaux dans l'espace est en outre exactement la même) que de celle du long-métrage de George Lucas. Le long-métrage est bien évidemment l'occasion de faire connaissance avec nos héros, leur univers parfois affreusement scintillant ainsi que leurs ennemis, les Cylons. Galactica, la bataille de l'espace est un festival de pyrotechnie avec des dizaines de vaisseaux plus ou moins imposants qui ne résistent guère longtemps aux assauts répétés des robots. Après que la plupart des colonies aient été détruites, l'on comprend le but de la série et de ses personnages. Faire route vers la Terre, cette planète qui est la notre mais dont l'humanité n'a semble-t-il plus foulé le sol depuis un millénaire. À ce titre, la fin du film peut paraître fort étonnante, se concluant un peu étrangement pour un long-métrage cinématographique d'autant plus qu'aucune suite ne viendra prendre le relais de cette fin en queue de poisson qui s'explique surtout par le statut original de pilote de série de Galactica, la bataille de l'espace. Au final, le film de Richard A. Colla risque de piquer les yeux des plus jeunes sevrés aux CGI. Des maquettes de vaisseaux plutôt convaincantes mais des décors et certains costumes qui ont subit les outrages du temps. Reste que Galactica, la bataille de l'espace demeure bien une série mythique malgré les défauts qu'on peut lui reconnaître...

 

mardi 10 septembre 2024

Voyage to the Bottom of the Sea d'Irwin Allen (1961) - ★★★★★★☆☆☆☆

 


 

Voyage to the Bottom of the Sea est une œuvre de science-fiction couplée au film catastrophe réalisée en 1961 par Irwin Allen. Réalisateur, scénariste et producteur, le film et son auteur seront d'ailleurs à l'origine d'une série éponyme adaptée pour la télévision en 1964 et en partie basée sur certains des personnages visibles dans le long-métrage. C'est ainsi que l'on y retrouvera notamment l'amiral Harriman Nelson, le Capitaine Lee Crane et le marin Kowalski. Des trois membres de l'équipage du sous-marin Seaview, seul le dernier sera toujours interprété par l'acteur Del Monroe tandis que le premier et le second seront interprétés par Richard Basehart et David Hedison... Mais pour en revenir au long-métrage, l'amiral sera incarné par Walter Pidgeon et le capitaine par Robert Sterling. L'aventure de Voyage to the Bottom of the Sea débute lorsque le Seaview effectue ses derniers essais alors qu'il se trouve dans l'océan Arctique. L'équipage est donc formé de l'amiral Nelson, du capitaine Crane, du commander Lucius Emery (Peter Lorre dont l'un des faits d'arme les plus remarquables au cinéma fut son interprétation du tueur en série dans le chef-d’œuvre du cinéaste allemand Fritz Lang, M le maudit en 1931) de la secrétaire Cathy Connors (interprétée par Barbara Eden et qui se trouve être en outre l'épouse de ce dernier) et de quelques dizaines de matelots auquels vont venir se greffer la psychiatre Susan Hiller (Joan Fontaine) et le sénateur Parker (Howard McNear), deux témoins ''privilégiés'' d'événements auxquels personne à bord du sous-marin n'était préparé. En effet, alors que le Seaview vient de plonger dans les eaux de l'océan Arctique, à l'air libre, un cataclysme se produit. Tandis que l'équipage tente de distancer d'énormes blocs de glaces issus d'un iceberg qui vient de s'effondrer, dehors, le ciel est devenu rouge incandescent. La température dépasse désormais les cent-trente degrés et les médias pronostiquent déjà la fin de notre ère. Mais c'était sans compter sur l'idée de l'amiral d'utiliser l'armement présent à bord du sous-marin afin de briser les effets du dérèglement du champ magnétique terrestre qui vient de causer un immense incendie au niveau de la ceinture de Van Allen...


Spécialiste des films catastrophe puisqu'il en réalisera plusieurs (L'inévitable catastrophe en 1978 et Le dernier secret du Poséïdon en 1979) tout en en produisant d'autres (La tour infernale de John Guillermin en 1974 et Le Jour de la fin du monde de James Goldstone en 1980 pour le grand écran ou terreur sur le Queen Mary de David Lowell Rich en 1975 et Déluge sur la ville d'Earl Bellamy en 1976 pour la télévision), Irwin Allen signe un an après avoir adapté le roman d'Arthur Conan Doyle, Le monde perdu, son premier véritable film catastrophe en ce sens où il fait appel à des forces de la nature incontrôlables mais auxquelles il tente malgré tout de proposer une solution. Décors et effets-spéciaux surannés participent au charme de ce film vieux de plus de soixante ans qui, forcément, à pris pas mal de rides et peut paraître parfois un peu niais. Mais au delà du simple fait que l'équipage soit confronté à des événements que l'on peut donc considérer d'ordre cataclysmiques et dont la solution qu'apporte le script d'Irwin Allen et Charles Bennett peut paraître un peu ''légère'', Voyage to the Bottom of the Sea oppose également différents points de vue qui mèneront fatalement certains membres de l'équipage à se révolter face à l'autoritarisme et l'absence de consentement de la part de l'amiral qui contre vents et marées et surtout contre l'avis de ses plus proches collaborateurs ira jusqu'au bout de son projet. D'où quelques détails d'assez... ''mauvais goût'', comme la réhabilitation de celui-ci alors que deux hommes viennent de mourir à bord d'un sous-marin de poche que l'amiral venait tout simplement d'envoyer au casse-pipe sans le moindre scrupule. Le vent de l'aventure chère à Irwin Allen ne souffle pas toujours de manière pertinente sur ces péripéties qui multiplient les événements extra-catastrophiques. Non contents de devoir trouver un remède à cette catastrophe d'ampleur mondiale, l'amiral Harriman Nelson et ses hommes vont devoir contourner un champ de mines sous-marines ou défier une pieuvre géante. Tout ceci n'est évidemment pas très crédible et assez peu angoissant (malgré le contexte éminament claustrophobe lié à l'étroitesse de l'environnement) mais par contre plutôt divertissant. Voyage to the Bottom of the Sea reste un sympathique petit film semblant parfois venir tout droit des usines Walt Disney bien que l'un des plus célèbres producteurs et réalisateurs américains y soit totalement étranger...

lundi 9 septembre 2024

Flight of the Navigator de Randal Kleiser (1986) - ★★★★★★☆☆☆☆

 


 

Réalisé par Randal Kleiser en 1986 et écrit par Michael Burton et Phil Joanou sur la base d'un récit dont est à l'origine le réalisateur, scénariste et producteur Mark H. Baker, Flight of the Navigator ou Le vol du navigateur est une œuvre de science-fiction familiale produite par Walt Disney Pictures comme pouvait le laisser l'envisager la célèbre société de production. Un long-métrage dont l'objectif principal est très clairement de divertir le public plutôt que de le faire réfléchir sur l'hypothèse d'une existence extraterrestre. Le scénario n'en demeure pas moins fort intéressant. Du moins lors des prémices du récit car comme nous allons rapidement le découvrir, le film de Randal Kleiser, cherchant sans doute à séduire tout d'abord le jeune public, l'histoire va très vite partir en vrille et perdre foncièrement de son intérêt. C'est d'autant plus dommage qu'au départ le sujet se montre fort passionnant. En effet, tout débute à Fort Lauderdale, en Floride. Nous sommes en 1978 et le jeune David Freeman (Joey Cramer) alors âgé de seulement douze ans part chercher son petit frère Jeff en compagnie de son chien en forêt lorsqu'il tombe dans un ravin après que le frère en question lui ait fait une blague en surgissant devant lui sans prévenir. Ayant perdu connaissance durant un très court laps de temps, David se retrouve seul. De retour chez lui, il a la très désagréable surprise de découvrir qu'un couple âgé est tranquillement installé dans la demeure familiale. L'homme appelle la police qui prend alors la direction des opérations et cherche à prendre contact avec les parents du jeune garçon. David les retrouve alors installés dans une toute nouvelle maison. Mais le pire reste à venir. En effet, son frère Jeff, son père Bill et sa mère Helen semblent avoir vieilli ! La raison en est simple tout en demeurant tout à fait inexplicable : Huit ans ont passé entre le moment où David a perdu connaissance et celui où il s'est réveillé ! Mieux : alors que nous sommes désormais en 1986, l'adolescent qui devrait logiquement avoir vingt ans n'a pas changé et est resté tel qu'il était huit ans en arrière. Parallèlement à ce curieux événement, la NASA prend possession d'un vaisseau spatial qui vient tout juste de s'écraser non loin.


Chef d'un projet d'études sur l'objet en question, le docteur Louis Faraday remarque lors de tests cérébraux effectués sur David que l'imagerie cérébrale reproduit le vaisseau. L'homme propose alors aux parents de David de retenir l'adolescent durant les quarante-huit prochaines heures afin de comprendre ce qui lui est arrivé... Avec un tel synopsis, il y avait matière à produire une œuvre riche, tant les possibilités semblaient illimités. À une période où la science-fiction fait florès, Flight of the Navigator ne rencontre malheureusement pas le succès escompté malgré le prestige qui entoure la société Walt Disney Pictures. Et pour être tout à fait honnête, l'engouement qui naît d'emblée du concept a tendance à fondre comme neige au soleil tant le réalisateur, une fois le scénario entre les mains, gâche le concept en ne proposant finalement qu'un tout petit film, certes plutôt bien rythmé, mais dont le public visé paraît être les jeunes spectateurs. Flight of the Navigator, c'est tout d'abord quarante ou quarante-cinq premières minutes relativement passionnantes, lors desquelles le récit fait participer la science et un imaginaire plus ou moins réaliste autour du phénomène d'ovnis. Là où le récit se gâte se situe dès lors que David monte à bord du vaisseau afin de retourner chez lui (et par là même, aider l'ordinateur de bord, Max (doublé chez nous par Marc de Georgi). Des dizaines de minutes lors desquelles Randal Kleiser se focalise essentiellement sur les rapports entre David et l'ordinateur central, proposant en outre une scène toute mimi mettant en scène des créatures venues d'autres planètes (les gamins vont se régaler) mais aussi et surtout, des séquences de vol longues, sans intérêt et donc à force, relativement pénibles. On pourra arguer que le film est une œuvre de science-fiction familiale et que par conséquent on ne pouvait s'attendre qu'à ce genre de produit. Mais l'on peut également arguer de ce qu'aurait pu être le Flight of the Navigator si son auteur avait eu dans le viseur un tout autre type de public. Reste que le long-métrage est plutôt divertissant bien qu'un peu bébête durant la seconde moitié du récit. Notons la présence de Cliff De Young dans le rôle du père de David, de Veronica Cartwright, grande habituée de la science-fiction après L'invasion des profanateurs en 1978, Alien, le huitième passager en 1979 et L'étoffe des héros en 1983, qui quant à elle interprète celui de la mère. Notons enfin la présence de l'actrice Sarah Jessica Parker, future vedette de la série Sex and the City qui interprète ici le rôle de l'assistance du docteur Faraday, Carolyn McAdams...

 

dimanche 25 août 2024

Aporia de Jared Moshé (2023) - ★★★★★★★☆☆☆

 


 

On a droit de s'y être ennuyé. De n'y avoir pas saisi certaines subtilités. D'y avoir été totalement réfractaire. Ou de ne ne pas aimer tout simplement la science-fiction dramatico-intimiste... Mais de là à dire que Aporia est mauvais, mince... Quel manque d'appréciation. Alors, bien sûr, le long-métrage de Jared Moshé ne fait pas partie de cette catégorie de longs-métrages grandiloquents, gavés d'effets-spéciaux numériques qui en mettent plein la vue mais apportent si peu en terme de réflexion. En la matière, il est vrai, le simple fait que le réalisateur et scénariste se soit contenté du minimum pour décrire le concept de cette machine conçue par deux amis risque d'en faire tiquer certains. Dont je fis partie au préalable avant de rapidement réajuster mon opinion. À vrai dire, mieux vaut comme ici n'en point trop dire sur le fonctionnement de la dite machine que de perdre le spectateur lors de théories dont la complexité est telle qu'il est pratiquement impossible de tenir au-delà des dix premières minutes. Je pense notamment au Primer de Shane Carruth, si hermétique dans ses explications techniques que le néophyte n'a aucune chance de deviner le sens réel des propos qui y sont tenus ! Aporia aurait pu causer des dommages collatéraux aussi importants que lors de la projection de Primer s'il n'avait pas eu la clairvoyance de n'entamer qu'une toute petite partie du récit pour nous expliquer les intentions de Jabir Karim (l'acteur Pauman Maadi). Sophie Rice (Judy Greer) est veuve depuis huit mois. Vivant désormais seule avec sa fille Riley (Faithe Herman), la jeune femme surmonte difficilement la mort de Malcolm (Edi Gathegi) et doit également surmonter certaines difficultés. Comme celles qui concernent Riley, laquelle est à l'école, beaucoup moins assidue qu'à l'époque où son père était encore en vie. Devant la détresse de Sophie, Jabir révèle un secret que seul Malcolm est lui partageaient jusqu'à maintenant. Les deux hommes travaillèrent ensemble durant trois ans sur une machine qui pour faire court devait être capable de modifier le cours du temps en changeant le passé. Une drôle de machine, d'ailleurs, visuellement plus proche de ces étranges sculptures que l'on découvre parfois dans des jardins et créées par des artistes à partir d'objets de récupération.


Du métal, des câbles à foison, un très vieil écran d'ordinateur relié à un portable et un réseau électrique très peu fiable. Voilà sur quoi compte Jabir pour rendre à Sophie ce qu'elle a perdu de plus cher : Malcolm ! Très technique dans sa description du fonctionnement de la machine, le réalisateur à en revanche l'excellente idée de ne pas trop s’appesantir sur le sujet. Évidemment, la machine fonctionne et quelques instants plus tard, Sophie reçoit un appel de Malcolm qui l'attend avec leur fille dans un parc pas très loin de là. Une fois son époux ''revenu à la vie'', c'est là que les choses se compliquent. D'une part, pour les personnages. Et d'autre part, pour le spectateur qui aura, même sans rien y connaître au sujet de la mécanique quantique, quelques réserves à faire concernant certains aspect de ce que l'on nomme les paradoxes temporels... Pour Sophie et Jabir, rien de plus évident que de sacrifier dans le passé la vie du chauffard qui coûta celle de Malcolm. La mort du premier signera le retour du second. Mais alors, que fait-on de ce concept qui veut que toute modification du passé en engendre davantage dans le présent ? C'est d'abord là que se joue toute la subtilité de Aporia qui contrairement à la concurrence fait dans la sobriété. De petits détails qui laissent transparaître de réelles modifications au cours des huit derniers mois dans l'existence des Rice. Mieux, Jared Moshé imagine produire des conséquences bien plus larges se répercutant sur l'ex-épouse du chauffard qui renversa Malcolm et causa son décès. Pour le spectateur se pose maintenant la question : si l'expérience menée par Jabir et Sophie a eu des conséquences pour l'instant relativement minimes sur la vie de la jeune femme, certains éléments du récit nous font tiquer. Pourquoi les deux amis sont-ils les seuls à garder le souvenir des huit derniers mois tandis que la mémoire de leur entourage semble avoir été modifiée depuis le retour de Malcolm ? En toute logique, c'est tout ou rien. De ce fait, pourquoi la mère a gardé en mémoire la mort de son époux tandis que leur fille, elle, n'en a plus le moindre souvenir ? Des questions comme celle-ci, le spectateur aura l'occasion de s'en poser régulièrement. Mais au-delà de cette interrogation (et d'une énorme invraisemblance lors du dernier quart qui aurait pu faire tout s'effondrer et que le réalisateur ne se donne même pas la peine de justifier), le film est bourré de bonnes idées où la morale tient une place importante. Sans effets superflus, sobre et concis, Aporia mérite donc mieux que l'accueil glacial que certains lui ont réservé...

 

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